Et si Notre-Dame de Paris faisait le pari du béton comme la cathédrale de Reims pour se reconstruire ?

Patrick Demouy, historien, spécialiste de la cathédrale de Reims, n'exclut pas l'idée que les futurs reconstructeurs de la cathédrale parisienne s'inspirent de l'expérience rémoise d'entre-deux-guerres. A l'époque, c'est le béton qui avait été choisi pour refaire la charpente.

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"Elle est debout, mais pantelante. Nous suivons la même route que le jour où nous la vîmes entière." Ces deux phrases ne décrivent pas Notre-Dame de Paris, ravagée par un incendie ce lundi 15 avril, mais celle de Reims et sont signées Albert Londres. En septembre 1914, les tirs de l'armée allemande causent un incendie qui détruit la charpente de Notre-Dame de Reims.

Le parallèle vient très vite à l'esprit des Rémois, et de l'historien Patrick Demouy, spécialiste de la cathédrale rémoise. Selon lui, l'expérience de Notre-Dame de Reims en 1914 prouve que l'on peut reconstruire la charpente dans un matériau différent du bois, plus léger et ininflammable.

Dans quelle mesure les incendies qu'ont connu les cathédrales de Reims et de Paris sont-ils similaires?

"L'incendie de la cathédrale de Paris nous rappelle malheureusement ce qu'a connu Reims par deux fois. La première en 1481, à la suite de plombiers qui ont mal éteint un réchaud, ce qui est assez comparable. Et la seconde en 1914 après les tirs de l'artillerie allemande. Dans les deux cas, la charpente en chêne a entièrement brûlé, mais la voute est restée intacte. C'est exactement le même cas dans l'incendie de Paris, où la voute brûle mais le monument résiste aux flammes."

"C'est pour cela qu'on a reconstruit ces grandes cathédrales avec des voutes de pierres, à cause des traumatismes que provoquaient les incendies récurrents dans l'histoire. De nombreuses cathédrales ont brûlé plusieurs fois."
 

 

Pourquoi avoir choisi le béton?

"On ne voulait pas d'un troisième incendie. 1481, 1914, ça suffit, la cathédrale ne brûlera plus. Et puis on avait des problèmes pour retrouver du bois dans notre région dévastée par la guerre, avec de nombreux impacts trouvés sur les arbres. Encore aujourd'hui se pose la question de trouver les énormes chênes nécessaires."

"Je ne sais pas ce que vont décider les monuments historiques, s'ils veulent refaire à l'identique ou utiliser de nouvelles technologies. D'ailleurs, pourquoi pas? Puisqu'on ne voit rien de l'extérieur, autant tirer parti des nouveaux matériaux, plus solides, plus résistants et ininflammables."
 
 

Paris pourrait donc s'inspirer de Reims?

"L'exemple de Reims a montré que l'on peut oser la nouveauté dans la restauration. Restituer extérieurement avec la plus grande fidélité possible ce qui a disparu. Mais pour ce qui est de la structure interne, s'adapter aux conditions économiques et technologiques du moment. Le béton n'est peut-être plus la solution. Un siècle plus tard, de nouveaux matériaux ont vu le jour… c'est aux futurs reconstructeurs de décider."

A l'époque, c'est l'architecte Henri Deneux qui a fait ce choix. Il s'est inspiré d'un architecte du XVIe siècle, Philibert Delorme, déjà confronté au problème des bois trop courts. C'est comme un jeu Mecano : un assemblage de planche de béton, de 3-4 cm d'épaisseur et pas très longues, ce qui permet de les manipuler facilement. C'est relativement simple et artisanal.



"La charpente en béton est beaucoup plus légère avec des planches assez minces et beaucoup plus ouverte, puisqu'il n'y a pas, comme dans une charpente médiévale, tout ce système d'entraide et de grandes poutres transversales et horizontales."


Les voûtes sont quant à elles restées intactes?

"Oui, elles ont été consolidées après la guerre, ce qu'il va falloir faire aussi à Paris. Mais la structure portante résiste aux flammes. Alors ce que nous voyons aujourd'hui n'a rien à voir avec la voute d'avant 1914, puisqu'Henri Deneux avait fait le choix du béton. Elle ne brûlera plus."
 

Combien de temps prendra la reconstruction de Notre-Dame de Paris?

"Dieu seul le sait d'abord, les architectes ensuite. Il va y avoir un temps assez long d'études techniques, d'évaluation des dégâts puis le choix de la restauration, de ce qu'il faut faire. Il y aura des appels d'offres, des marchés publics, puisque la cathédrale appartient à l'Etat… Il faut compter en années, ça c'est évident."
 

Les travaux de la cathédrale de Reims avaient pris 20 ans…

"Oui, il y a eu 20 ans de travaux, mais il y a eu aussi tous les dégâts liés aux bombardements. Près de 300 impacts d'obus sur la cathédrale. Donc la situation de Paris est moins grave de point de vue-là. Il a fallu attendre octobre 1937 pour l'ouverture au public et l'inauguration en 1938, avec entre temps, des ouvertures partielles pour les grandes fêtes. C'est surement ce que nous verrons à Paris, une sorte de couverture qui fait office de toit, le temps de la reconstruction."

"A Paris, il y a aussi, en dehors de la charpente, les vitraux qui ont beaucoup souffert de la chaleur, les orgues qui ont été inondées, et le mobilier qui a été encrassé par la suie."
 
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