VIDÉO. Reims : comment les habitants du quartier Châtillons deviennent les historiens de leur propre histoire

À Reims, dans le quartier Châtillons, le passé est raconté par ceux qui l’ont vécu. Avec l'association Le Son des Choses, les habitants, armés d’un microphone, deviennent les historiens de cet ensemble en pleine rénovation construit il y a 60 ans. Le but ? Conserver les mémoires de vie et les transmettre aux générations futures.

À quelques kilomètres du centre-ville de Reims, telle une station de contrôle, une tour HLM de 17 étages surplombe le quartier Châtillons. La tour des Argonautes, en référence aux héros navigateurs de la mythologie grecque, est devenue un monument historique et dispose même de sa propre page Wikipédia. Il faut dire qu’elle a vu passer de nombreuses générations d’habitants depuis sa construction en 1969.

C’est à ses pieds que l’association Le Son des choses s’est installée. Son fondateur Julien Rocipon, réalisateur de documentaires de formation, ainsi que ses deux collègues Elodie Kucharskiet et Frida Mbangossoum œuvrent à récolter la parole, les souvenirs et le vécu des habitants du quartiers à travers des formations, groupes de discussion et micros-trottoirs. “L’histoire nous est transmise par des gens qui sont lettrés, qui sont archivistes... Et on voulait qu’elle soit délivrée par ceux qui l’ont vécue. On forme les personnes à recueillir la parole car c’est très important de garder cette mémoire vivante”, raconte Julien Rocipon.

Témoigner des changements de son quartier

Depuis la fin du confinement, le quartier Châtillons bénéficie d’un programme de rénovation urbaine (ANRU). Plusieurs tours d’habitation ont déjà été détruites et vont laisser place à de nouvelles infrastructures. Le programme promet la construction de nouvelles résidences, d’un immeuble de santé, ainsi que d’une nouvelle maison de quartier. Mais ces travaux suscitent beaucoup de questionnements chez les habitants et commerçants des Châtillons.

Accompagnée par Elodie, animatrice socioculturelle, et chargée de la récolte de mémoire du quartier, Frida, jeune engagée service civique au sein de l'asso, va à leur rencontre et récolte les avis et sentiments sur ces changements importants. “C’est essentiel pour moi de récolter la parole des habitants, c’est tout simplement la transmission de l’oralité. Ce qui me plaît c’est de pouvoir ancrer l’histoire et d’ancrer la mémoire de ce quartier”. La parole n’est pas le seul support de transmission de la mémoire au sein de l’association. Les habitants peuvent également apporter des photographies, coupures de journaux ou encore des affiches à Elodie qui se charge de les archiver.

Le Son des Choses, créateur de lien

Raconter l’histoire d’un quartier c’est aussi créer du lien. A son arrivée aux Châtillons, Rachel Parizel a poussé la porte du Son des Choses par hasard, c’était en 2017. Elle qui avait tant de mal à s’exprimer, a pu trouver grâce aux différentes activités proposées et mises en œuvre au sein de la structure, un moyen d’expression inattendu. C’est elle qui a proposé à l’association de créer un groupe de parole intitulé “Qu’est-ce que je fabrique là?”.

Tous les jeudis, cette mère de deux enfants, se regroupe en compagnie d’autres habitantes de la cité, s’enregistrent et parlent librement de leur quartier, mais aussi de leur quotidien, et d’autres sujets liés à l’actualité. “Tout le monde me connaît dans le quartier, et sait ce que je fais au sein de l’association. Certains me confient leurs problèmes ou leurs inquiétudes concernant les travaux...OK, je ne suis pas le bon Dieu, mais je leur dis que je peux les enregistrer et voir ce qu’on peut faire. On dit souvent que le quartier Châtillons est un quartier chaud, que c’est un quartier mal fréquenté, mais c’est tout le contraire", conclut Rachel. Le Son des Choses, ou le remède intelligent et formateur, pour lutter contre le brouhaha de l’existence, pour le traduire en paroles, le transmettre, et le valoriser.

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