Romain Pierlot le nouveau boulanger du village de Saint-Thierry, n’en revient pas. Avec 400 clients accueillis ce mercredi 2 février, il a dépassé toutes les prévisions annoncées. Dans cette zone en mal de commerces, le retour d'une boulangerie, après quinze ans d'absence, est un événement.
Quinze ans. Quinze ans que les habitants de Saint-Thierry (Marne) n’avaient pu acheter leur baguette fraîche à la boulangerie du village. Et ils sont venus en nombre, quatre cents clients accueillis ce mercredi 2 février, date d’ouverture de leur nouveau commerce de proximité. "Ça va un peu mieux ce matin (jeudi 3 février) en terme d’organisation, sourit Romain Pierlot. Nous avons été dépassés et la journée d’ouverture a été chaotique. C’était assez dingue, on ne s’attendait pas à autant de monde".
Les gens en campagne ont envie de retrouver des commerces.
Romain Pierlot, boulanger à Saint-Thierry
Saint-Thierry, une commune située à un peu plus de 8 kilomètres de Reims, est une zone laissée pour compte en termes de commerce de proximité. Seule la pharmacie a résisté à l’envie de regagner la grande ville, toute proche. Le bar-tabac, lui, a fermé ses portes il y a quelques années déjà. Et c’est d’ailleurs dans ces locaux, que la toute nouvelle boulangerie s’est installée.
Vingt ans d’expérience et l’envie de ruralité
Sur le pont depuis 3h30 du matin, aujourd’hui comme hier et comme tous les autres jours d’ouverture, Romain Pierlot le sait, rien ne sera de tout repos. Ce métier, il le pratique avec passion depuis 20 ans. Il l’a choisi à 14 ans lorsqu’il est entré en apprentissage à Verzy avant de continuer son parcours à Reims. Installé dans les hauts de Murigny, il a quitté la grande ville. "Je ne voulais plus être à Reims, totalement saturée. Avec la Covid, les gens en campagne ont envie de retrouver des commerces. Des marchés se créent à nouveau dans les villages, comme c’est le cas ici à Saint-Thierry".
Forts de cet objectif, Romain Pierlot et son épouse ont appris que la municipalité souhaitait voir revenir une boulangerie. Une commune et ses 600 habitants, mais aussi celles autour, dépourvues, elles aussi, de commerces. "Mis à part Hermonville et Courcy, il y a un cruel manque de commerçants dans le secteur, reprend Romain Pierlot. Nous avons trouvé un local privé et la municipalité nous a donnés un coup de main pour la communication sur les réseaux sociaux et dans le journal municipal. Les conseillers ont vraiment joué le jeu."
Embauches rapides à venir
Après l’euphorie de l’ouverture, il faudra ensuite stabiliser l’affaire. "Généralement, on a deux mois à fond où l’on tourne à plein régime, puis il y a un petit creux, avant que cela reprenne avec une progression constante", explique Romain Pierlot. Il faudra donc garder le rythme et pour cela, l’entreprise aura besoin très rapidement d’embaucher. "Nous sommes aujourd'hui quatre personnes à temps plein, et si on continue à travailler comme cela, il est fort probable que nous recrutions une vendeuse et un boulanger ou un pâtissier dans les prochaines semaines."
Un pari sur l’avenir car, évidemment, il est très compliqué de savoir comment la clientèle se comportera dans les mois à venir. Dès le premier jour, "ils ont voulu découvrir plein de choses, explique le boulanger en parlant de ses premiers clients, et le panier moyen a été exceptionnel. A nous de faire de la qualité, de réaliser des choses classiques mais garnies et gourmandes et de faire en sorte que cela tourne pour éviter la lassitude."
Une seconde jeunesse
Le carnet de commandes a commencé à se remplir et la boulangerie de Saint-Thierry répondra à la demande des habitants en étant ouverte six jours sur sept. De Gueux, Thil, Pouillon, les clients viennent aussi des villages alentours où la demande est forte. "Depuis le temps qu’on l’attendait, dit cet habitant de Pouillon. Il y en avait une plus haut et elle a fermé. Cela nous évite de faire un peu plus de chemin. Avant, on profitait de nos courses sur Reims, on achetait le pain pour la semaine. Ça change un peu. Maintenant, tous les matins, on va venir."
Cette cliente de Thil imagine très bien, lorsque les chemins seront plus praticables, venir à pied chercher sa baguette. "Ça va amener un peu de monde et c’est sympa. Ça va faire un certain nombre d’années que je suis là et je n’ai jamais vu une boulangerie. C’est tout de même nécessaire dans un village", reprend encore cet habitant de Saint-Thierry.
L’installation de Romain Pierlot donnera peut-être envie, à d’autres, de se lancer à Saint-Thierry ou ailleurs, dans ce milieu rural proche de la ville qui espère un jour troquer sa vie de cité dortoir pour une seconde jeunesse.