Coronavirus : le maire de Tomblaine explique les raisons de son coup de gueule contre le gouvernement

Le maire de Tomblaine (Meurthe-et-Moselle), Hervé Feron, explique les raisons de sa vidéo de coup de gueule contre le gouvernement sur sa gestion de la crise sanitaire liée au Covid-19. L’élu de Tomblaine a répondu à nos questions.

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Publiée sur sa page Facebook, lundi 30 mars 2020, la vidéo du maire de Tomblaine (Meurthe-et-Moselle) a connu une belle audience. Près d'un demi-million de vues en moins de 48 heures. Le coup de gueule a bel et bien réussi. Dans la vidéo largement partagée par les internautes, l’élu local reproche au gouvernement sa gestion de la crise sanitaire provoquée par le covid19. Le premier citoyen de la commune nous explique. 

Dans la vidéo publiée ce lundi 30 mars, vous exprimez votre colère vis-à-vis du gouvernement et vous lui reprochez sa gestion de la crise sanitaire liée au covid19. Quelle est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase ?
Il y a trois raisons à mon avis. La première, en tant que maire, et comme tous les maires des petites et moyennes communes nous sommes mobilisés quasiment 24 heures sur 24 pour la cohésion sociale, la solidarité pour secourir les gens. Cette colère on l’entend partout. La preuve que c’est partagé, au bout de 48 heures, la vidéo a récolté près de 500.000 de vues et 60.000 partages. Je pense que ce n’est pas seulement ma colère, mais la colère de toute la population.

La deuxième raison. En tant qu’élu, je suis témoin depuis trop longtemps de l’irresponsabilité des gouvernements successifs et de celui-là en particulier qui ont complètement démoli le service public d’accès aux soins. Ils s’attaquent frontalement avec une violence incroyable à notre service de protection sociale. Depuis des années ils ont supprimé des lits et des centaines de milliers de postes dans les hôpitaux publics et là d’un seul coup, ils se rendent compte que les personnels soignants sont importants. C'est aujourd'hui qu'il faut les honorer. Je trouve qu’ils n’ont pas de honte. Avant la crise, on manquait de lits, on faisait la queue dans les urgences.

Enfin, je voulais exprimer ma colère de façon à ce qu'après la crise on s’en souvienne. Et que l’histoire juge ces gens-là. Parce qu’ils n’ont pas assumé leur responsabilité. Le pire, la situation continue à se dégrader.

J’ai un foyer de personnes âgées dans ma commune avec 56 résidents. Il y a un mois et demi, j’avais écrit à l’Agence régionale de santé (ARS), j’avais envoyé un SMS au directeur de l’ARS. Il n’avait même pas daigné me répondre. Je lui ai demandé tout simplement des masques de protection pour nos personnels municipaux.


Après la publication de la vidéo, avez-vous reçu un appel d’un représentant du gouvernement ? Avez-vous eu des retours ?
Oui. Le préfet du département (Eric Freysselinard) m’a appelé. Je pensais qu’il allait me dire qu’il n’était pas content. Et je m’étais préparé à cette discussion. Et pas du tout. Il m’a dit qu’il avait lu le texte (qui accompagne la vidéo) avec la plus grande attention, et qu’il comprenait bien ma colère. Et que son appel c’était uniquement pour me proposer son aide.


Il vous a proposé quoi comme aide ?
Ils se sont enfin réveillés. Ils nous ont donné toute l’aide dont on avait besoin. L’ARS m’a donné 300 masques. Ils m’ont donné du savon antiseptique. Moi j’ai poussé un coup de gueule comme ça et du coup tout le monde se réveille. Je suis très content. Mais je pense aussi à tous les autres foyers de personnes âgées dans les autres communes.

Je vous explique : cela fait plus de 12 ans que les gouvernements successifs baissent les dotations aux communes. Les maires n’ont plus de moyens financiers. Dans le même temps on nous confisque nos domaines de compétences, parce qu’il y a des barons locaux comme André Rossinot (président de la Métropole du Grand Nancy), qui sont à la tête des métropoles et qui prennent toutes les compétences. Donc les maires sont pieds et poings liés, ils ne peuvent plus agir sur leur territoire. Mais quand il y a des crises, on se souvient qu’ils existent.


D’après vous, le gouvernement a réagi trop tard pour freiner la progression de la pandémie en France ?
Le gouvernement a réagi beaucoup trop tard. Il y a un débat: "Est-ce qu’ils l’ont su suffisamment tôt ou pas?" Il me semble évident que depuis novembre-décembre 2019, on avait connaissance de l’émergence de cette pandémie. Admettons que le gouvernement n’ait pas vu venir la pandémie, mais le problème c’est qu’on n’était pas prêt. Les gouvernants ont la responsabilité de la protection de la population. C’est-à-dire qu’on doit anticiper sur une éventuelle guerre comme on doit anticiper sur une éventuelle épidémie en permanence. Ce n’est pas un hasard si le système de protection social français est né à la fin de la guerre. C’est parce qu’ils (les gouvernants de l’époque) s’étaient rendu compte qu’on avait rien prévu. Donc, on l’a créé pour se protéger. Et durant ces dernières années on a tout abandonné. Les hôpitaux n’étaient pas prêts pour faire face à cette pandémie. 

Il y quatre ans j’ai créé une maison de santé pluri-professionnelle à Tomblaine. Il y a 35 professionnels de santé, un laboratoire d’analyse médical. Le président de la Métropole, André Rossinot, m’a combattu sur ce sujet. Il n’en voulait pas. Mais heureusement que j’avais prévu ça, parce que dans ma commune on a sauvé des vies avec cette structure.


Démenti de la métropole du Grand Nancy

Contacté par la rédaction suite aux propos du maire, Hervé Feron, contre le président de la Métropole du Grand Nancy, le service de presse nous fait savoir ce vendredi 3 avril 2020, que "la Métropole a soutenu la maison médicale de Tomblaine à hauteur 90.000 euros, tout comme elle apporte des aides aux autres maisons médicales du territoire". "La toute dernière qui a ouvert à Villers-Clairlieu a reçu une subvention de 50.000 euros", ajoute-t-il.

Hervé Féron n’est pas à son premier coup de gueule contre l’exécutif. En janvier 2019, dans une vidéo publiée sur Facebook, il avait appelé ses collègues à ne pas organiser le débat national voulu par le président Macron suite aux mouvements des gilets jaunes.
 
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