Crise du logement : les primo-accédants à la propriété ont disparu

Flambée des taux de crédit, inflation en hausse et augmentation du coût de la construction plongent la filière du bâtiment en plein marasme. A la veille du congrès nationale de la fédération du bâtiment à Nancy jeudi 15 et vendredi 16 juin, deux professionnels lorrains du secteur expriment leurs inquiétudes.

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Flambée des taux de crédit (+3,3%) inflation en hausse (+ 6,6%), augmentation du coût de la construction, baisse des prix du marché, voici les quatre facteurs responsables du marasme dans lequel se trouve plongé le secteur du bâtiment. Le ministre du logement Olivier Klein a utilisé les termes de "bombe sociale" pour qualifier la situation. Le segment le plus impacté est celui de la construction des logements neufs.

La Fédération Française du Bâtiment tire la sonnette d'alarme : "les ventes aux particuliers tant chez les constructeurs de maisons individuelles que chez les promoteurs s'effondrent, respectivement de 38,2% et 30,9%." Côté bancaire, la production de crédits a chuté de 44,7%. Crédit cher et inflation rendent difficiles voire impossibles pour les primo-accédants disposant d'un revenu mensuel entre 1800 et 3000 euros, d'acheter un bien en empruntant 100% du prix d'achat.

Les primo-accédants je ne les vois plus, ils ont disparu

Fabrice Lucas, Promoteur, dirigeant de la société Novémia

Fabrice Lucas promoteur immobilier sur Nancy (Meurthe-et-Moselle) et Metz (Moselle) ne vend plus qu'à des clients déjà propriétaires ou disposant d'un capital important : "ce sont des secundo-accédants, souvent des seniors ou des investisseurs. Les primo-accédants je ne les vois plus, ils ont disparu." 

En février 2022, sur un ensemble de dix-huit logements construits sur le plateau de Haye à Nancy, Fabrice Lucas en a vendu quinze à des primo-accédants. Pour son prochain projet prévu en octobre 2023 à Seichamps (Meurthe-et-Moselle), c'est zéro.

Les entreprises de second œuvre particulièrement impactées

L'effondrement de la construction de logements neufs affecte toute la chaîne de la construction. Les majors comme les artisans. Les entreprises dites de "second œuvre" sont particulièrement impactées. Par rapport au gros œuvre, elles assurent les travaux plus légers comme l'isolation, la menuiserie ou encore l'électricité ou la peinture. Ce sont souvent des PME ou de très petites entreprises (TPE). Arnaud Tisserand est le PDG de Lagarde-Meregnani basée à Maxéville (Meurthe-et-Moselle). L'entreprise est spécialisée dans les travaux de second œuvre et emploie 210 salariés dont 195 compagnons.

Si les travaux d'isolation dans le cadre de la transition énergétique porte l'activité de l'entreprise, de l'avis du dirigeant, c'est un trompe-l'oeil car ce segment ne peut suffire à compenser la chute de la construction de logements neufs : "on se rend bien compte qu'il y a un réel souci pour l'avenir. Aujourd'hui beaucoup de projets sont à l'arrêt et on craint une baisse d'activité très rapide."

Vigilant sans être alarmiste, Arnaud Tisserand déplore aussi le manque de perspective à moyen terme. Les travaux se décident deux à trois ans à l'avance. Aujourd'hui c'est le flou total. Confrontées à la hausse du coup de l'énergie, les collectivités qui représentent un important donneur d'ordre pour  Lagarde et Meregnani, déprogramment des travaux de rénovation de leurs bâtiments.

Côté promoteurs, la suppression du dispositif fiscal "Pinel" découragent les investisseurs potentiels.

"Nous faisons de la rénovation énergétique mais à côté on a de la peinture, du revêtement de sol, ou du carrelage. Vous avez de l'activité dans ces métiers-là quand il y a des grands ensembles hospitaliers ou des établissements d'enseignement qui se construisent ou se rénovent."

Selon les professionnels du bâtiment, 2024 ne s'annonce pas sous les meilleurs auspices. On se dirige tout droit vers une baisse d'activité. Une situation qui freine aussi les projets d'investissement de Lagarde et Meregnani : "c'est sûr que ça ne nous incite pas à faire des investissements dans des locaux, du matériel et à recruter du personnel. Avec le Covid, ça fait 4 ans que ça dure."

Comme pour les métiers de l'industrie s'ajoute également un manque cruel de main-d'œuvre et un déficit de formation. Quant au plan présenté le 5 juin 2023 par le Gouvernement pour sortir de la crise du logement, il a déçu la Fédération Française du Bâtiment "qui attendait un électrochoc".

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