REPLAY. Roberto Fonseca trio "Yesun" en concert au Nancy Jazz Pulsations, le piano jazz cubain à l'honneur

Ancien membre du Buena Vista Social Club, Roberto Fonseca a présenté son album "Yesun" au festival Nancy Jazz Pulsations lors d'un concert événement enregistré le 12 octobre 2021. Laissez-vous emporter par les rythmes de jazz cubain de ce pianiste virtuose.

Symbole du renouveau du jazz cubain, Roberto Fonseca livre un concert passionnant au Nancy Jazz Pulsations, enregistré le 12 octobre 2021. C'est en trio, accompagné de son contrebassiste Yandy Martinez Rodriguez et du batteur Raúl Herrera, qu'il présente son album Yesun.

Un concert mené d'une main de maître par un pianiste passionné de musique cubaine, qui n'hésite pas à explorer son art, à se laisser guider par de brillantes improvisations et à puiser dans d'autres registres musicaux pour nous livrer une prestation remarquable.

Roberto Fonseca, amoureux du jazz

Dès tout petit, Roberto Fonseca baigne dans la musique : son père est batteur, sa mère chanteuse professionnelle. Elle le berce de ses célèbres boléros. Il n'a que quatre ans lorsqu'il s'initie à la batterie, avant de se tourner définitivement vers le piano à l'âge de huit ans. Le petit prodige intègre le conservatoire Guillermo Tomas Bouffartigue puis le très réputé Institut supérieur des arts de La Havane.

La découverte du jazz n'arrive qu'à l'âge de onze ans quand un de ses camarades lui prête un cassette sur laquelle figure des morceaux de jazzmen américains. A cette époque-là, Cuba et les Etats-Unis sont en mauvais termes, le jazz et le rock sont alors interdits sur l'île car ces genres sont considérés comme américains. Ce nouveau style musical bouleverse la vie de Roberto Fonseca et deviendra une passion qui ne le lâchera plus.

A la fin des années 1990, Roberto Fonseca enregistre trois albums solo avant de rejoindre le très célèbre Buena Vista Social Club en 2001. En 2012, il sort l'album Yo, nommé pour un Grammy Award, puis ABUC en 2016, qui retrace "l’histoire de la musique cubaine jusqu’à nos jours, tout en présentant son futur".

En 2019, il propose Yesun, un album qu’il dit avoir toujours voulu réaliser et qui symbolise l’eau puisque comme sa musique, "elle peut épouser toutes les formes". Dans ce disque éclectique, qui marque une volonté de renouvellement du jazz cubain, il ne se limite pas et puise dans de nombreux autres styles musicaux comme dans l'électro, le funk, le rock, le classique, et bien d'autres.

Le concert, entre joie et improvisation

Sur scène, Roberto Fonseca est accompagné du bassiste et contrebassiste Yandy Martínez Rodriguez et du percussionniste Raúl Herrera. Le trio présente Yesun, le dernier album de l'artiste. Les trois musiciens sont face à un public de connaisseurs avec le Nancy Jazz Pulsations.

Un festival auquel Roberto Fonseca est d'ailleurs attaché : "Voir et ressentir comment le public comprend et ressent chaque note, chaque chanson me remplit de joie. [...] Je serai toujours heureux de revenir au Festival de Nancy."

Le concert s'ouvre avec le morceau Lluvia ("pluie" en français), un condensé de jazz cubain festif qui permet à Roberto Fonseca (et son chapeau) de se lancer dans une improvisation joyeuse saluée par le public. Le trio enchaine avec Kachucha, un morceau tout aussi festif qui permet cette fois au bassiste d'improviser.

Roberto Fonseca s'adresse au public en français : "Maintenant c'est le moment de chanter un peu". Il aime sentir vibrer l'audience et ça se voit. Les Nancéiens se montrent trop pressés, Roberto Fonseca les tempère avec amusement. Après avoir demandé au public de chanter de plus en plus fort "ahaahaaaaah, de Cuba yo soy" (en français, "moi je viens de Cuba"), le trio embraye avec Agua ("eau"), en le parsemant de nombreuses et brillantes improvisations.

L'improvisation a une place importante dans ce concert, dans le plus pur esprit jazz. Les musiciens prennent un plaisir communicatif lors de leurs solos, si bien que le public réagit et salue ces instants d'euphorie. L'improvisation c'est aussi l'art de s'écouter, de se comprendre entre musiciens, et cette complicité extraordinaire est palpable. Il en résulte une véritable joie de jouer ensemble qui fait plaisir à voir.

Une seconde moitié plus éclectique

Le quatrième morceau prend place au milieu du concert et marque un tournant dans la représentation. Besame Mucho est une reprise, le seul titre qui ne figure pas sur l'album Yesun. L'ambiance change, l'influence classique se fait sentir quand la contrebasse fait son entrée. Elle est rejointe par les percussions.

Le concert plonge dans une atmosphère plus calme, intime et feutrée. Besame Mucho permet de faire la transition vers Cadenas, un morceau fortement marqué par l'électro qui se laisse parfois porter vers des sonorités orientales, rocks ou africaines. Le batteur a lui aussi le droit à son solo et s'en donne à cœur joie.

No Soy de Esos s'ouvre sur un extrait du poème Chaka récité par Leopold Sédar Senghor. Par ce biais, Roberto Fonseca n'oublie pas les origines noires africaines du jazz cubain. Le dernier morceau de la soirée rompt totalement avec cette atmosphère.

Le concert s'achève par un titre mêlant électro et jazz cubain hyper joyeux et entrainant. Mambo Pa la Niña est de ces morceaux qui restent en tête et qui permet à Roberto Fonseca de faire participer le public pour clôturer le spectacle en beauté, sur une note joyeuse, festive et pleine d'entrain.

Avec Plage aux spectacles, du 28 juillet au 25 août 2022, retrouvez chaque jeudi soir un artiste originaire du Grand Est ou de passage en concert dans la région.