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REPLAY. "Claude Ponti, un art de l'enfance" : trois raisons de revoir le documentaire sur ce dessinateur hors norme

Claude Ponti a su se débarrasser des monstres de son enfance en les triturant dans chacun de ses ouvrages.

Que celui qui n'a jamais lu un livre de Claude Ponti à ses enfants lève la main. Le dessinateur lorrain dévoile l'étendue de son art et son rapport à l'enfance dans "Claude Ponti, un art de l'enfance" le documentaire de Thierry Kübler est à revoir en replay.

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Les parents le connaissent bien. Claude Ponti est auteur illustrateur de livres jeunesse, loin, très loin de la "culculterie" générale. Ses ouvrages, aux messages à multiples niveaux de lecture s'adressent plus à l'imaginaire de l'enfant qu'à ceux de leurs parents. 

Voici trois raisons de revoir le documentaire de Thierry Kübler en replay. (Article déjà publié le 08/04/2020)

1- Découvrir les personnages et les univers d'un artiste

Ils s'appellent Parci et Parla, Pétronille, Blaise le poussin, Mouha ou encore Okilélé. Ce sont les héros des histoires de Claude Ponti. Leur point commun : ils s'adressent tous aux enfants. Ils ont des peurs d'enfants, ils ont les mêmes problèmes, ils se cherchent et apprennent à grandir. Mais grandir par eux-mêmes en refusant les moules et les carcans dans lesquels les grandes personnes voudraient les enfermer. 

Fondamentalement, un enfant, c'est une personne en train de se construire. (...) Un enfant, c'est la puissance absolue d'être soi. Il faut empêcher tous les autres de le brider comme un bonsaï."

- Claude Ponti, auteur illustrateur

C'est ainsi que Claude Ponti s'adresse à eux, en leur parlant de tout, sans les considérer comme des petites choses fragiles. "On peut à peu près parler de tout, mais pas n'importe comment à nos enfants." déclare-t'il

Le dessinateur nous présente son travail qui consiste à mettre l'enfant, c'est-à-dire son héros, au coeur d'une histoire. "Jamais je ne commence un livre si je ne sais pas ce qu'il va se passer dedans. (...) Il me faut un personnage qui va avec l'histoire et après tout en découle."

Là, commence le travail d'auteur, légèrement dyslexique, qui s'autorise un langage tout droit sorti des contractions enfantines. Puis celui du dessinateur qui définit ses couleurs à l'aquarelle, obtenues par couches successives pour correspondre à l'univers qu'il veut créer. Il décrit des univers plein de tunnels, de galeries, de souterrains, de racines, de portes et de passages, illustrant ainsi les craintes de l'enfant : "Le souterrain, c'est une métaphore de ce qu'on est, de ce qu'on pense, mais qu'on ne sait pas forcément". 

2 - Découvrir un homme marqué par l'enfance

La sienne d'abord qu'il nous livre sans ambages. Issu une famille d'immigrés, il a dû se construire, privé de la protection qu'elle aurait dû lui fournir. À 6 ou 7 ans, il est victime de la perversité de son grand-père maternel et n'osera jamais réclamer du secours. Pire même, ses parents, par aveuglement ou par bêtise, aggraveront le traumatisme.

À l'adolescence, parce qu'il aime dessiner, on lui offre une boîte de peintures à l'huile. Mais avec la boîte vient le conseil, péremptoire: "Tu ne seras jamais peintre !" C'est en se battant contre sa propre famille, la rage au ventre, qu'il a décidé de faire malgré tout le métier de ses rêves. "C'est la rage qui m'a fait m'en sortir. se battre contre sa propre famille pour faire le métier qu'on veut faire, ça donne la rage."

Animé par son esprit libertaire et une vision personnelle de la vie, il laisse ses études s'enfuir pour chercher un métier et survivre. Ce sera coursier à L'Express, où, pour tuer le temps, il crayonne et griffonne jusqu'à se faire repérer et devenir dessinateur de presse. Après avoir connu un temps un succès d'estime en tant que peintre, il doit se rendre à l'évidence, après la vente d'une de ses oeuvres préférées à une personne qu'il n'apprécie pas du tout, que ce n'est pas sa voie. "J'ai vu que quelqu'un que je détestais avait acheté un des tableaux que j'aimais énormément. Donc, je me suis dit qu'il y avait un truc qui n'allait pas;"

À la naissance de sa fille Adèle, il se décide à écrire pour elle L'Album d'Adèle (Gallimard). Et d'un livre à l'autre, il détermine ses histoires destinées aux enfants qui grandissent. "J'ai fait un livre puis un deuxième et je ne m'étais pas rendu compte que j'avais arrêté de peindre : j'avais trouvé ma place".

3 - Mettre l'enfant au centre de ses livres

Peut-être parce que l'enfant qu'il a été n'a pas trouvé la protection qui lui était due, peut-être parce que ses peurs viennent tout droit du traumatisme datant de son enfance, peut-être parce que sa colère a longtemps été son moteur, il a, livre après livre, continué à parler à l'enfant qu'il était, aux enfants qu'il a eus, et à tous les autres enfants qui le lisent. "Ça m'arrive que des gens me disent qu'ils ont appris à lire en lisant mes livres. Il y a un tel plaisir sur leurs visages quand il me disent ça que ça me comble."

Il s'enorgueillit de son style, riche en mots inventés-contractés-collés (il pourrait dire "invencollés"), résidu sans doute d'un trouble dyslexique. Il revendique sa liberté d'oser parler de tout. 'Il y a un énorme plaisir chez moi à dire les choses autrement que ce qu'il est convenu de dire. car l'art et la manière de ce qu'il est convenu de dire, c'est une prison."

Pour moi le Petit Prince c'est un fayot.

Claude Ponti

Il se révolte contre la bien-pensance et les idées toutes faites qu'on transmet aux enfants. Comme le ton que les parents prennent pour lire les histoires, ou comme "le côté mielleux du Petit Prince" de Saint-Exupéry dont il ne supporte pas le message. "Pour moi, le Petit Prince, c'est un fayot : "apprivoise-moi !" Non alors !"

Il évoque le choix du genre, il parle du traumatisme du viol, il évoque la mort des parents ; il ne prend pas l'enfant pour un idiot. Car il sait que l'enfant doit comprendre pour grandir. "Il est absolument nécessaire de parler à des enfants comme à des personnes normales, mais en développement. La différence fondamentale entre un adulte et un enfant petit, c'est que l'enfant est en apprentissage tout le temps."

C'est là, l'une des clés de son succès: s'adresser aux enfants à hauteur d'enfant. "Il vaut mieux que les enfants sachent que certaines choses existent et qu'on peut les surmonter parce que c'est leur boulot d'enfant d'apprendre à faire des choses, même dans des circonstances difficiles."

Ils apprendront alors qu'ils peuvent trouver la protection dont ils ont besoin. Un message qu'il aurait probablement aimé comprendre lors de sa propre enfance. 

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