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DOCUMENTAIRE. Luxembourg : ma vie de travailleur frontalier, mirage ou eldorado ?

Un pavillon coquet dans un plaisant quartier. Mais à quel prix ?

Le documentaire s'appelle "Il était une fois dans l'Est", mais il aurait tout aussi bien pu s'intituler "La ruée vers l'or" ou "A la poursuite du bonheur", tant le rêve luxembourgeois des travailleurs frontaliers mosellans évoque le rêve américain. Un ailleurs où l'argent coule à flot, mais tel le "far west", cette sorte de "near east" est plus rude qu'on ne l'imagine.

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Il était une fois dans l'Est, quelque part en Moselle, une comptable, un ingénieur, un financier, un conducteur d'engin, une cheffe d'équipe de nettoyage et quelques autres comparses, qui vivaient tous dans de belles belles maisons avec des belles belles voitures.

Sans cesse, leur quartier s'agrandit au rythme des installations des nouveaux compagnons frontaliers. Quand les engins de chantiers repartent, les rues redeviennent proprettes, laissant découvrir les nouvelles maisons qui rivalisent de modernité. Un coquet quotidien, en apparence.

Le documentaire Il était une fois dans l'Est donne la parole à ces habitants de Moselle, qui franchissent la frontière chaque jour pour se rendre au Luxembourg où les salaires font rêver. Une frontière entre rêve et cauchemar ? 

Voici trois bonnes raisons de regarder le documentaire de Mehdi Ahoudig et Samuel Bollendorff Il était une fois dans l'Est en replay ci-dessus. 

1. Pour quelques euros de plus

La porte automatique de garage s'ouvre. Une voiture rutilante en sort. La porte automatique se referme. Le décor est planté. Quelque part en Moselle, dans un quartier éternellement en construction, un homme quitte sa maison et prend la route? Direction Esch-sur-Alzette ou Luxembourg-ville.

Il n'y a aucun poste en France que je pourrais faire où je toucherais la même chose.

Un employé frontalier

Des heures d'embouteillage pour rejoindre un emploi dans une banque luxembourgeoise, métier qu'il pourrait tout aussi bien exercer en France. A un détail près : "Il n'y a aucun poste en France que je pourrais faire où je toucherais la même chose. Si on regarde les courbes des revenus médians ou moyens, on fait partie des 10% de Français qui gagnent le plus". Le détail n'est plus négligeable. 

Autre décor, moderne, télé high-tech et ambiance de départ dans la vie pour une jeune couple : "En deux ans, on a eu le mariage, la maison et maintenant l'enfant qui arrive. Tout ça c'est dû au changement de travail au Luxembourg. Les salaires sont doublés c'est un peu plus facile." Le jeune conducteur d'engin enchaîne : "c'est plus les mêmes projets, on part en vacances, on fait de plus beaux voyages."

A travail égal, salaires doublés voire multipliés par trois, quatre ou dix par rapport aux salaires français. Peu de salariés résistent à cette tentation quand l'occasion se présente de se faire employer de l'autre côté de la frontière.

2. Pour savoir regarder de l'autre côté du miroir

Même travail, salaires démultipliés, mais droits différents. Si le salarié français lutte pour ses droits, si les systèmes sociaux de chômage, d'allocations diverses et de retraites sont si âprement défendus par les syndicats et les travailleurs en France, c'est qu'il y règne une longue tradition de la lutte sociale. Le libéral Luxembourg n'a pas la même histoire, les salariés n'ont pas le même vécu. Une situation de plein emploi pour ses résidents et un grand besoin de la main-d'œuvre étrangère, aussi bien pour les emplois les moins que les plus qualifiés.

L'effet attractif des salaires est tel pour les Français, qu'aucun poste ne reste vacant bien longtemps. Les candidats à l'embauche se précipitent au moindre mouvement de départ. Les employeurs le savent, les salariés français aussi. Ce qui explique qu'ils sont prêts à supporter des conditions de travail beaucoup moins avantageuses qu'en France. Et subissent un stress permanent pour atteindre les objectifs fixés. Mais l'esprit rebelle des français n'est jamais bien loin : "on n'est pas des machines, des robots, on est des êtres humains, et si toi tu tombes en panne, c'est le burn out", explique la cheffe d'équipe de nettoyage qui sait qu'une ouvrière de perdue, c'est dix de retrouvées.

Parfois ce sont des brimades. L'épouse d'un frontalier le résume ainsi : "C'est jamais assez : il faut supporter qu'on vous parle comme ça, de faire une heure de bouchon et de travailler énormément et rentrer tard le soir." Une autre personne qui témoigne évoque les horaires découpés d'un travailleuse frontalière : "Elle se lève à 4h00 pour travailler jusqu'à 11h00; puis elle revient et repart à 4h00 de l'après-midi jusqu'à 11h00 le soir; c'est dur."

Parfois c'est de la simple indifférence. Un ouvrier du bâtiment, retraité depuis neuf ans raconte : "l'intégration au début au Luxembourg c'était dur. En France tu parles de la pluie et du beau temps, c'est la convivialité. Là-bas quand ils te disent "moien" (bonjour en Luxembourgeois), la discussion c'est fini pour la journée, tu dois travailler comme une bête, ils ne te parlent plus.

3. Pour retrouver du sens à sa vie 

Bouchons. Boulot. Burn out. Certains employés frontaliers finissent par craquer ou démissionner. Il y a cette jeune femme, comptable, mère de famille, qui a préféré quitter son travail, répétitif, où on lui demandait toujours plus pour gagner en qualité de vie. Elle a pris un risque car retrouver du travail en  est un vrai défi. Malgré toutes ses démarches on sent que l'angoisse la gagne. Pourtant elle n'a aucun regret et sait qu'elle a fait le bon choix pour elle mais aussi pour sa famille. 

Le jeune conducteur d'engin de chantier lui s'enorgueillit de voir l'utilité de son travail. Bien sûr, sur les chantiers, il leur est aussi toujours demandé de travailler plus, plus vite, plus longtemps "C'est des heures supplémentaires tout le temps, je travaille même pendant les congés". Il ajoute, fier de son mode de débrouille, "il faut parler portugais, yougoslave, français, allemand mais pas le luxembourgeois. (...) Le luxembourgeois ne fait pas mon métier, jamais; jamais vous ne verrez un Luxembourgeois maçon ou machiniste, jamais: C'est nous, les frontaliers, qui avons fait le Luxembourg, pas eux.". 

Et enfin, il y a cet heureux homme, assis sur une petite chaise de jardin, installée à même le trottoir de sa rue, devant sa maison qui ne paie pas de mine. Parfois, son père le rejoint pour partager une petite mousse. Parfois ce sont des amis pour le café, un chien placide allongé à leurs pieds. Parfois la compagnie du soleil, qui change des journées brumeuses, suffit à son bonheur. A son pote "Patchouli" qui passe dans la rue pendant l'interview, il lance un joyeux "Hey Patchouli ! Ça va ou bien ?" bien lorrain. Heureux qui comme celui qui a quitté son chemin de transfrontalier. 

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