Le schéma est toujours le même. Un divorce ou un veuvage. Une grande faille sentimentale. Puis l'inscription sur un site de rencontre et la romance débute. Sauf que la rencontre réelle est impossible. Et pour cause, la personne aimée n'existe pas. Un brouteur a fait de vous sa proie. Un groupe sur un réseau social vient en aide aux victimes d'arnaques sentimentales, c'est l'objet du documentaire "Thierry et les arnacoeurs" d'Aurélia Bloch.
Il s'appelle Thierry Baut. Un jour, il entend un appel à l'aide d'une personne qui s'est fait arnaquer sur internet, par un brouteur. Il décide de l'aider et depuis il en a fait le combat de sa vie. Avec son groupe Facebook Assistance aux victimes d'arnaqueurs sentimentaux (AVAS), il aide les victimes et leurs familles à se sortir de l'emprise des escrocs.
Le documentaire Thierry et les arnacoeurs, réalisé par Aurélia Bloch, illustre comment il aide les familles de victimes de ces arnaques, victimes qui restent parfois dans le déni, malgré les preuves qu'il leur apporte.
Voici trois bonnes raisons de le regarder en lien ici.
1. Parce que tout le monde peut tomber dans le piège
"N'importe qui peut être un jour victime d'un faux profil et arnaqueur sentimental. Il suffit juste d'être dans une période difficile, à un moment où on se sent seul et en manque de communication, d'attention". C'est sur cette phrase, prononcée par Thierry Baut, que débute le documentaire Thierry et les arnacoeurs.
Il suffit d'un sentiment de vide affectif et monsieur ou madame Tout-le-Monde peut tomber dans le panneau. Il faut dire qu'à l'autre bout de la toile, l'arnaqueur sait tirer le fil. L'escroc, souvent basé quelque part en Afrique, a tendu le piège et sait ferrer sa proie quand elle se présente. Il a créé un faux profil sur un site de rencontres, un autre sur un réseau social et il repère les victimes potentielles. Il tente une approche et si une première touche se fait, si la personne est justement en manque d'affection, c'est bingo. Il saura tôt ou tard lui soutirer un premier versement d'argent, puis un second et ainsi de suite, récupérant parfois des sommes astronomiques.
Nulle question de naïveté dans cette manipulation, il s'agit d'emprise. D'ailleurs, Jean-Michel, l'une des victimes qui témoigne dans ce documentaire, le dit lui-même : "Il y a quatre mois, on m'aurait dit, tu vas témoigner comme victime d'arnaque sentimentale, j'aurais rigolé. Moi ! Jamais. Il n'y a que les cons qui tombent là-dedans, les naïfs".
Mais non, les professionnels le savent tous les milieux sociaux sont touchés, des gens éduqués, intelligents. Chacun est une cible pour ces professionnels de l'arnaque à l'affectif. La seule faille, c'est le manque d'affection.
2. Parce qu'il faut savoir que les victimes peuvent être aidées
À travers le cas de Robert, harponné par une certaine – fausse – Cécile, on découvre toute l'impuissance des familles, ou de l'entourage amical, à aider leur proche. Plus le doute s'installe dans l'entourage qui comprend vite que l'argent est le moteur de la "relation", plus la victime est poussée dans ses retranchements. Les deux sœurs de Robert cherchent à estimer le préjudice : il pourrait se monter à 300.000 ou 350.000 euros.
Le déni s'installe et toute discussion visant à lui faire ouvrir les yeux, risque de tourner à l'altercation, voire à la rupture. Alors les familles, les amis marchent sur des œufs et cherchent de l'aide.
La police ? Elle a déjà trop de plaintes et surtout, c'est à la victime de porter plaine elle-même, pas à un tiers. Les avocats ? Qui ne proposent comme arme juridique que la mise sous tutelle, dont la conséquence risque aussi d'être la rupture. Les psys ? Qui certes savent décrypter et donner des pistes d'échanges pour renouer le dialogue, mais ne peuvent agir sur la victime si elle ne consulte pas elle-même.
La solution qui se présente pour les familles qui sont déterminées à chercher et à trouver de l'aide, c'est de contacter de Thierry Baut, par le biais de son groupe Facebook. L'Assistance aux victimes d'arnaqueurs sentimentaux (l'AVAS). L'homme est sensibilisé depuis longtemps au drame personnel que vivent les victimes, qui, en plus d'être flouées sentimentalement, le sont aussi financièrement. Depuis le premier cas qui l'a particulièrement touché, il a consacré une partie de son temps à trouver des outils pour repérer l'origine des fraudeurs. Pour donner des preuves de l'inexistence des personnes. Il prouve l'usurpation d'identité. Il géolocalise l'escroc. Il déjoue les armes des délinquants.
Le travail de reconquête de la réalité peut alors commencer.
3. Parce que le chemin vers la vérité est long
Accepter de donner suite à ses doutes. Les laisser affleurer. Puis écouter les arguments des personnes réelles qui vous veulent du bien. Rouvrir les yeux. C'est une première étape.
Mais il faut aussi retrouver la confiance en soi. Être conscient qu'on n'est pas humilié, mais qu'on est bel et bien une victime, digne de l'aide des autres. Accepter l'aide.
Plus facile à dire qu'à faire.
Aurélia Bloch, suit avec discrétion et bienveillance les acteurs de son documentaire. Françoise qui veut aider son frère médecin, qui refuse, contre toute évidence, d'admettre l'inexistence de son interlocutrice. Jean-Michel, qui tout au long du documentaire passe par tous les sentiments. Et surtout Thierry, en soutien indéfectible des familles et des victimes, ne perdant pas son calme, persévérant et revenant à la charge par différentes voies pour amener son prochain à retrouver pied.
Thierry et les arnacoeurs, un documentaire d'Aurélia Bloch (France Télévisions / Nomades)