Déconfinement à Metz : c'est la folie pour la réparation et la vente des vélos

Depuis le déconfinement le 11 mai, les magasins de cycles ne désemplissent pas. A Metz, ils ont même été littéralement pris d'assaut, que ce soit pour les ventes de cycles neufs et d'occasion ou pour les ateliers de réparation. Retour sur ce phénomène.

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Phénoménal. Incroyable. Inédit. Du jamais vu.
Les superlatifs manquent pour qualifier ce qui se passe depuis le 11 mai 2020 dans les magasins de cycles de la région messine.
Alors que nous avions rencontré des vendeurs qui faisaient grise mine pendant le déconfinement, certains allant jusqu'à envisager le dépôt de bilan, c'est un tout autre sentiment qui prévaut dans les magasins ce jeudi 04 juin.

Une reprise sur les chapeaux de roues

En effet depuis le 11 mai, les clients affluent dans les magasins. Stéphane, patron de Véloland une grande enseigne indépendante de la région messine explique qu'après des semaines de calme plat les choses ont commencé à bouger quelques jours avant le déconfinement, "le téléphone a recommencé à sonner, un peu puis de plus en plus. Les clients voulaient savoir quand nous allions ouvrir et dans quelles condition", explique ce professionnel.

Le temps de communiquer sur les réseaux sociaux que le magasin était ''prêt"...

... Ensuite tout est allé très vite et le magasin a vu affluer énormément de clients dès les premiers jours. "Ce qui nous a surpris, c'est que nos clients habituels sont revenus comme nous nous y attendions, mais que beaucoup de nouveaux clients sont arrivés également", raconte Stéphane qui a vu ainsi arriver au moins 30% de nouvelle clientèle dans son magasin.

Stock pris d'assaut

Tous les catégories de vélos sont concernées, le vélo compétition, le vélo plaisir, le vélo nature, le vélo pour aller au travail... Plus de 40 vélos sortent chaque jour du magasin contre une vingtaine habituellement en pleine saison. En moins de trois semaines le stock de vélos neufs a littéralement fondu, les vélos d'occasion aussi sont partis et l'activité ne désemplit pas dans les ateliers.

La prime vélo encore appelée Coup de pouce vélo créée par le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire afin d’encourager la pratique du vélo dans le cadre du déconfinement n'y est pas étrangère. L'enveloppe de vingt millions d'euros permet à tous les propriétaires d'un vélo de le faire réparer ou entretenir à hauteur de 50 euros. "Le succès du dispositif a été immédiat", raconte Stéphane, à tel point que les délais en atelier sont très long, plus d'un mois en moyenne, ce qui crée un stress car "tout le monde veut tout, tout de suite". Un bémol cependant, la lourdeur administrative est réelle car il faut à chaque fois constituer un dossier, ce qui prend beaucoup de temps et a nécessité de mettre une personne à temps plein rien que sur ce poste. Pas de panique cependant, le dispositif, valable à partir du 11 mai 2020 va durer jusqu' au 31 décembre 2020.

Depuis des semaines nous avons des horaires de fous. 6h00 -21h00 tous les jours pour préparer les vélos vendus et réparer les vélos qu'on nous confie.

- Stéphane G, patron de Véloland

Ce magasin n'est pas le seul à profiter de cet engouement général pour le cycle. Du côté des vélos électriques, là aussi les ventes s'envolent.  France 3 était allé à la rencontre début mai de Julien Gavillon, patron de Loisibike.

Perdu au milieu de son énorme stock de vélos invendus, ce professionnel avait alors songé à mettre la clef sous la porte si la situation était amenée à durer. Entretemps, le déconfinement est arrivé et les vélos sont partis. Plus de 300 vélos, les 2/3 du stock initial, ont été vendus en seulement trois semaines. "C'est du jamais vu, des clients sont même venus de bien au-delà de notre zone de chalandise habituelle!", s'exclame Julien Gavillon qui envisage d'embaucher une personne de plus dans l'équipe pour faire face à ce surcroît d'activité inédit.

Le patron précise cependant qu'il s'agira d'un emploi en CDD, car, et c'est là le point sur lequel les professionnels insistent, rien n'indique que l'embellie va durer dans le temps.

En effet, aucun des professionnels interrogés sur ce point ne veut, ou ne peut, s'avancer aujourd'hui. "Au mieux, nous allons limiter la casse et peut-être réaliser une année tout juste correcte", explique Julien Gavillon. Qui constate déjà un léger tassement en terme de fréquentation. "On a peut-être atteint notre pic", explique-t-il.

Il faut savoir que l'activité des professionnels de la vente de vélos est saisonnière, et c'est encore plus vrai dans la Région Grand Est. Passés les beaux jours, il est plus difficile de vendre des vélos. Autrement dit, il ne reste plus beaucoup de semaines pour réaliser des ventes. Même son de cloche du côté des autres magasins, dont Véloland, où le patron estime que le pire aura été évité si et seulement si les ventes continuent au même rythme en juin et en juillet. Or, à ce niveau, de nombreuses inconnues subsistent.

Combien de temps l'embellie va-t-elle durer?

Premier élément de réponse, la météo. En effet les vélos se vendent mieux lorsqu'il fait beau. De ce point de vue les vendeurs de cycles sont en partie tributaires des caprices du temps. Lorsque la pleine saison des ventes est étalées sur plusieurs mois, en gros d'avril à septembre, un ou deux mois de mauvais temps peuvent se rattraper. En revanche quand les ventes doivent se réaliser sur 3 mois, cela devient plus problématique

Deuxième élément, plus inquiétant, les stocks. Les vendeurs de cycles devraient avoir vendu sous peu la plus grande partie de leur stock, c'est un fait. Mais le diable comme chacun sait se cache dans les détails. A quelques exceptions près, dont Loisibike qui, en tant que plus grand magasin de vélos électriques de France dispose de centaines de vélos, la plupart des autres magasins n'ont de gros stocks, faute de place et/ou de trésorerie. 

Ces stocks une fois vendus pourront-t-il être reconstitués en cours de saison? Sera-t-il  tout simplement possible de se réapprovisionner? Rien n'est moins sûr. En effet la plupart des fournisseurs et des marques ont fait savoir que d'autres magasins en Europe ont déjà acheté les stocks de vélos restants. Ces magasins sont situés dans des pays qui ont confiné leur population moins drastiquement qu'en France ou qui l'ont déconfinée plus tôt. C'est le cas de L'Autriche, de l'Allemagne et d'autres pays de l'Europe du nord.

Premiers déconfinés, premiers servis. Et comme les chaines de production, situées pour la plupart en Asie n'ont repris leur cadence que très tardivement, il est probable que les gammes 2020 qui devaient être produites au printemps seront arrêtées pour faire place à la production des vélos de l'année suivante.

En quoi est-ce un problème?

Stéphane le patron de Véloland explique que "quand les derniers vélos en stock auront été vendus courant juin, nous n'aurons peut-être plus de vélos à proposer à nos clients avant l'arrivée de la nouvelle gamme, au mieux en septembre".

Un trou d'air de trois mois pourrait donc se profiler pour de nombreux magasins qui n'ont pas pu constituer de gros stocks. Problème. Voilà pourquoi les vendeurs de vélos, s'ils se réjouissent de l'afflux dans les magasins, savent qu'il faut rester très prudent en termes de projections. "Pas de plan sur la comète", résume Julien Gavillon en insistant sur le fait que si une deuxième vague de l'épidémie devait survenir son magasin n'y résisterait pas, ni aucun autre d'ailleurs.

Une dernière question pourrait titiller les amateurs de vélos, celle des prix. Pourraient-ils baisser? Pourrait-il y avoir des déstockages massifs, des remises de prix importantes? C'est peu probable pour les responsables de magasins que nous avons joints. Malgré les ventes actuelles, les professionnels sont pris à la gorge et ne savent pas quel sera le marché du vélo dans les prochains mois, notamment si l'embellie s'avère être un feu de paille. La crise économique pourrait altérer les ardeurs des acheteurs mais aussi faire disparaitre de nombreux acteurs du monde du vélo.

Il n'est pas dans notre intérêt, pour la survie même de nos entreprises, de vendre des vélos au rabais, cela reviendrait à nous tirer une balle dans le pied. Nos clients doivent le comprendre.

- Julien Gavillon, patron de Loisibike

Au mois de mai, en plein coeur du confinement, nous nous posions la question de savoir si la crise du coronavirus serait fatale aux magasins de cycles. En ce début juin, malgré des signes encourageants,  la question se pose toujours, peut-être pas dans les mêmes délais. Les prochains mois seront déterminants pour ce secteur comme pour tant d'autres.

 

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