La crise sanitaire a des conséquences économiques lourdes, notamment dans le secteur du vin. Déjà affaiblis lors de la première vague, les vignerons lorrains craignent que le confinement du mois de novembre 2020 entraîne une nouvelle rechute de leur chiffre d’affaire.
Depuis le début de la crise sanitaire liée au Covid-19, plusieurs salons des vins ont été annulés et la plupart des restaurants, qui représentent en moyenne 40% de la clientèle des vignerons, ont dû fermer leurs portes durant plusieurs mois. Par conséquent, les vignerons lorrains souffrent d’un gros manque à gagner, malgré de bonnes récoltes cette année.
Des pertes financières considérables
Et le reconfinement de ce mois de novembre 2020 est un nouveau coup dur pour la profession. Après le premier confinement qui a fait chuter le chiffre d’affaires annuel de 15 à 20% en moyenne, les viticulteurs lorrains s’organisent. Leurs magasins peuvent rester ouverts et les clients peuvent leur passer commande en ligne ou passer directement dans leurs caves.Pour arriver à faire 40% de notre chiffre d’affaires durant la première vague, on a du se démener.
Le Château de Vaux (AOC Moselle), vend 80.000 à 90.000 bouteilles par an, en temps normal. Début novembre, un peu moins de 60.000 bouteilles ont été vendues. Marie-Geneviève Molozay, l’exploitante, a perdu 60% de son chiffre d’affaires durant la première vague et n’a pas encore récupéré la perte des mois de mars, avril et mai 2020. "Pour arriver à faire 40% de notre chiffre d’affaires durant la première vague, on a du se démener", explique la viticultrice.
La santé financière des clients est amoindrie, l’ambiance est morose, l’heure n’est pas à la fête.
Même constat dans le Toulois. La maison Laroppe (AOP Côtes-de-Toul), dont le domaine est constitué d’une vingtaine d’hectares situés principalement à Bruley en Meurthe-et-Moselle, a vu son chiffre d’affaires dégringoler. Comme leurs confrères, ces vignerons voient d’un très mauvais oeil cette deuxième vague, à quelques semaines de Noël. "On a peur qu’elle soit bien pire que la première, la santé financière des clients est amoindrie, l’ambiance est morose, l’heure n’est pas à la fête", s’inquiète Marie-Paule Legay, la comptable du domaine.
"S’adapter" pour survivre à la crise
Durant ce second confinement, les commerçants de vin ont le droit d’ouvrir. Des livraisons sont possibles et les clients peuvent venir retirer leurs commandes en magasin. À l'image des autres vignerons, la maison Laroppe (AOP Côtes-de-Toul) a réagencé ses locaux et son protocole sanitaire depuis mars 2020 : parois en PVC, gel hydroalcoolique, masques obligatoires, barrière devant la caisse, désinfection entre chaque client. Pour le moment, les ventes sont en baisse et très peu de clients se déplacent.On navigue un peu à vue, on n’a pas de vision à long terme et on ne peut pas prévoir ni anticiper. C’est ce qui est le plus dur.
Pour ne pas se faire oublier, les viticulteurs communiquent plus que d’accoutumée et recontactent leur clients, comme nous le raconte Alexandre Vosgien, vigneron indépendant à Blénod-lès-Toul : "Les salons d’automne sont annulés, on a envoyé un courrier pour prévenir nos clients. On ne se voit pas mais on essaye de garder le contact". D’habitude la vente aux professionnels (cavistes et restaurants) représente 50% du chiffre d’affaires de l'exploitation familiale Claude Vosgien, spécialisée dans le vin 100% bio. Avec la fermeture des restaurants et l'annulation des salons des vins, Alexandre craint un impact considérable : "Cet automne, quatre gros salons et un ou deux plus petits ont été annulés. Pour un petit vigneron indépendant comme nous, ce sont des évènements très importants. (...) On navigue un peu à vue, on n’a pas de vision à long terme et on ne peut pas prévoir ni anticiper. C’est ce qui est le plus dur".
Pour maintenir ses ventes, le Château de Vaux (AOC Moselle) a aussi dû s’adapter. Ici, on propose la livraison gratuite à partir de 36 bouteilles. Pour les commandes de 12 ou 24 bouteilles, les frais de port sont réduits. L’exploitante a même embauché deux personnes cette année, dont une pour l’aider à gérer la partie commerciale pour "être au plus près des clients" car les commandes se font plus rares.
Les viticulteurs lorrains appréhendent la période des fêtes de fin d’année. "On sent que les apéros Skype ne sont plus vraiment d’actualité pendant la deuxième vague, l’ambiance est plus morne", nous confie Marie-Geneviève Molozay, exploitante du Château de Vaux.