1940, la bataille de France au jour le jour : 21 mai, Rommel se heurte aux blindés alliés, près d'Arras

EPISODE 13 - C'était il y a 80 ans. Rommel et sa 7e Panzerdivision tentaient de contourner Arras pour s'emparer des ponts de la Scarpe, mais ils se heurtaient cette fois à une forte opposition des blindés britanniques et français. Le célèbre général allemand faillit même y laisser la vie.

Dans la forêt de Mormal, les combats font rage toute la nuit. Vers 8 heures, les tirailleurs de la 5e division d’Infanterie Nord-Africaine veulent sortir de la forêt pour tenter d’échapper à l’encerclement. A Englefontaine, ils attaquent à la baïonnette contre des nids de mitrailleuses.
 


300 seront fauchés dans la plaine à la sortie des bois, une centaine d’hommes seulement parviendra à s’enfuir. 
 


A Berlin, la tension n’est pas retombée au sein de l’Etat-major allemand. Hitler a donné aux Panzers l’autorisation de repartir de l’avant, mais il reste inquiet. Dans son journal de guerre, le général Franz Halder, chef d’Etat-major de la Wehrmacht écrit : "La journée commence dans une atmosphère extrêmement tendue. Les rapports indiquent une sérieuse pression sur le flanc Nord de la IVe armée. La VIe armée se heurte à un front solide" (cité par Dominique Lormier dans La bataille de Dunkerque).
 


Il faut dire qu'Adolf Hitler et l’Etat-major allemand, contrairement aux officiers alliés, ont une vision très précise de ce qui se déroule sur le front. Dans l’armée allemande, il y a 12 fois plus d’opérateurs radio que dans l’armée française. Les communications sont donc bien plus sûres.

La 7e Panzerdivision en difficulté


A nouveau libre de ses mouvements, le général Rommel quitte Cambrai pour attaquer Arras. Très chanceux jusque-là, Rommel et sa 7e Panzerdivision doivent contourner la ville par l’ouest et remonter vers le nord pour prendre des ponts sur la Scarpe, non loin d’Aubigny-en-Artois.
 


D’après l’historien militaire Karl-Heinz Frieser, Rommel est "euphorique" et sans doute trop confiant. 
 


Le général allemand veut renouveler ses exploits de l’Avesnois et fait partir ses chars à toute allure.


Derrière, la division motorisée SS Totenkopf et l’infanterie ne suivent pas le rythme. C’est justement là que Britanniques et Français ont décidé de contre-attaquer en début d’après-midi. L’infanterie allemande se retrouve nez à nez avec une offensive de 88 chars britanniques aux alentours d’Achicourt.

 


Parmi les blindés britanniques, 14 chars Matilda au blindage de 80mm. L’infanterie allemande ne peut rien contre eux.

Même à faible distance, nos propres canons antichars ne sont pas assez efficaces contre les chars lourds des Anglais.

Erwin Rommel, général allemand.

Dans le journal de marche de 7e Panzerdivision Rommel écrit : "Même à faible distance, nos propres canons antichars ne sont pas assez efficaces contre les chars lourds des Anglais. Les fronts défensifs que nous avons formés sont percés par les ennemis, les pièces d’artillerie détruites par des tirs ou écrasées, la plupart des artilleurs abattus" (cité par Karl-Heinz Frieser, dans Le Mythe de la Guerre-éclair).
 


60 chars français attaquent plus à l’ouest vers Dainville. L’attaque est si violente que les lignes d’infanterie allemandes sont percées. A 16 heures, Rommel fait faire demi-tour à ses blindés pour venir en aide à ses fantassins.
 


Victorieuse au début, la contre-attaque alliée s’essouffle rapidement. Mal préparée par un Etat-major en plein remaniement, les problèmes de synchronisation entre forces françaises et anglaises se multiplient : erreur de traduction des ordres, manque de liaisons radio, officiers supérieurs trop loin du front...

Cela crée des situations tragiques : le 7e bataillon de Royal Tank Regiment attaque sur une mauvaise route et à Duisans, il engage le combat contre des chars français qu’il prend pour des Allemands. Des chars Somua français, eux, pensent avoir détruit un barrage de canons antichars allemands, il s’agit en fait d’artilleurs britanniques.

Rommel perd 700 hommes en une après-midi


Localement, les chars alliés remportent des combats. Lorsque des chars Matilda écrasent sous leurs chenilles une batterie de canons et ses artilleurs, la panique gagne de nombreux hommes de la division SS Totenkopf. Mais Rommel reprend les choses en main au plus près du terrain, sur le front, s’exposant énormément et frôlant la mort. Son officier d’ordonnance est mortellement blessé juste à côté de lui.
 
Finalement en utilisant des canons anti-aériens de 88mm en tir tendu, les Allemands trouvent la parade au blindage des chars alliés. Avec 300 interventions aériennes de Stukas, l’attaque est définitivement stoppée vers 20h30 à hauteur de Tilloy et Mercatel.
 


Seuls 28 chars britanniques sur les 88 engagés parviennent à quitter le champ de bataille. Les chars français affrontent violemment les Panzers de Rommel pour permettre aux troupes britanniques de se replier vers le nord. En fin de journée, 20 blindés français sont détruits.
 


Sans appui aérien, avec trop peu d’infanterie et d’artillerie, l’offensive des chars alliés était vouée à l’échec. Malgré tout, les divisions allemandes ont été stoppées et ont subi de lourdes pertes : 700 hommes en une après-midi et une vingtaine de blindés.

A Berlin, l’Etat-Major devient fébrile et imagine qu’une autre contre-attaque est possible. Il ordonne une nouvelle fois de stopper l’avancée des Panzers. Les Britanniques en profitent pour se retrancher dans Arras, alors que les Français s’organisent pour bloquer l’avancée allemande vers le bassin minier en s’établissant solidement autour du Mont-Saint-Eloi.
 


La Ville d’Arras avait prévu cette année des commémorations pour les 80 ans de cette bataille qui s'est tenue du 19 au 23 mai 1940. Mais la crise sanitaire liée au Covid-19 en a voulu autrement et les cérémonies ont dû être reportées à 2021. La mairie publie actuellement une série de textes et de photos relatant ces événements.
 

 

La chance fuit les Alliés


Ce 21 mai 1940, vers 21h, les Allemands tentent un premier assaut contre le fort de Boussois, près de Maubeuge.
 


Les commandos allemands sont repoussés mais la fortification est endommagée, une partie de l’armement et du système de ventilation sont détruits.
 


La chance fuit les Alliés.... Maxime Weygand, le nouveau général en chef français, prend l’avion vers Ypres en Belgique. Il y arrive à 15h et rencontre le Roi des Belges et le Général Billotte qui commande l’armée française dans le Nord. Gort, le commandant en chef britannique, n’a pas fait le déplacement, ce n’est pas bon signe. 
 
Weygand donne ses instructions pour contre-attaquer vers le sud pour casser l’encerclement. Le sort n’est décidemment pas du côté des Français : lorsque le général Billotte repart de cette réunion en voiture, il est victime d’un accident de la route à Locre, près de Bailleul.
 


Gravement blessé, il décédera à Ypres le 23 mai. Sa disparition brutale désorganisera un peu plus la conduite des forces françaises.
 


"C'était vraiment trop de malheurs à la fois", commentera Weygand, 20 ans plus tard dans un témoignage télévisé. 
 

Témoignage du général Maxime Weygand, ancien commandant en chef de l'Armée française de 1940, pour l'émission "Le Magazine du Passé" sur la RTF en 1960.



La guerre change de visage


Face à la dureté inédite des combats notamment autour d’Arras, certaines unités allemandes cèdent à la tentation des représailles. Elles sont tenues en échec à certains endroits, leurs pertes augmentent. Alors elles se vengent sur des prisonniers et des civils dans les villages de l’Arrageois.
 


A Mercatel, 6 civils sont abattus par des SS. A Simencourt, juste après la fin des combats, des fermes sont incendiées et 5 civils tués. A Habarcq, une habitante, un réfugié belge et sa fille de 17 ans sont abattus. Ce ne sont que les débuts des représailles dans la région.

Les Français, Britanniques, Belges et les quelques unités polonaises qui ont réussi à fuir leur pays pour continuer la lutte en France, sont les seuls en mai/juin 40 à combattre militairement les Nazis.
 


Ces combattants alliés ne le savent pas encore mais cette guerre ne ressemblera à aucune autre. La veille en Pologne, un camp de "rétention " vient d’être inauguré par les Allemands. Pour l’instant, il est destiné à recevoir des opposants politiques, des résistants polonais et des prisonniers de guerre. Il est situé dans une ancienne caserne de l’armée polonaise, à Auschwitz...


► La suite de notre série demain avec la journée du 22 mai 1940. Vous pouvez relire les épisodes précédents dans le récapitulatif ci-dessous :
 

 

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