Neuf hommes de plusieurs nationalités soupçonnés d'avoir pris part à un trafic de cigarettes contrefaites entre la France et la Belgique seront jugés jeudi et vendredi par le tribunal correctionnel d'Arras.
L'organisation fonctionnait avec "des fournisseurs en Belgique, des commanditaires à Paris et des intermédiaires à Lille", a expliqué à l'AFP Me Stéphanie Lepoutre , dont le client est considéré comme "l'une des têtes du réseau", ce qu'il conteste.
L'enquête avait démarré en avril 2011, après l'interpellation de deux hommes au péage de Fresnes-lès-Montauban (Pas-de-Calais), sur l'autoroute A1, près d'Arras. "250 kilos de cigarettes" sont alors saisis dans leur véhicule, selon Me Lepoutre.
"Des taux de métaux lourds jusqu'à dix fois supérieurs aux taux admis"
Des téléphones trouvés sur les deux hommes permettront aux enquêteurs de remonter peu à peu le réseau, notamment grâce à des écoutes téléphoniques. Les investigations dureront jusqu'au printemps 2012, permettant au total la saisie d'1,25 million de cigarettes contrefaites, selon l'accusation.
Les analyses scientifiques révèlent des taux de métaux lourds jusqu'à dix fois supérieurs aux taux admis. Les faux paquets imitaient la marque Marlboro, dont le propriétaire Philip Morris s'est porté partie civile.
"C'est évidemment une violation de nos droits de propriété intellectuelle", a expliqué Me Kami Haeri. Les prévenus sont de nationalité tunisienne, marocaine, irakienne et algérienne.
Un homme d'origine géorgienne, soupçonné d'être le fournisseur du réseau, bénéficie du statut de réfugié politique en Belgique, selon son avocate Me Julie Diligent. Ils risquent jusqu'à dix ans de prison, ainsi qu'une amende douanière pouvant aller jusqu'à cinq fois la valeur de la marchandise. Philip Morris réclame par ailleurs des dommages et intérêts.
Lors du procès, la défense devrait tenter de minimiser l'importance du réseau. L'accusation "compare cela à une organisation qui se rapproche du trafic de stupéfiants, avec des voitures ouvreuses, des voitures de transport... Mais il faut relativiser les choses", estime Me Lepoutre.
"Une affaire lourde"
Ainsi, selon l'avocate, lors du "transport d'avril 2011, (les trafiquants) n'ont pas de voiture et pas de main d'oeuvre, ils sont obligés de recruter sur place",
à l'inverse du trafic de drogue "où on sait à l'avance qui fait quoi". Me Lepoutre conteste également le fait que son client ait continué à organiser
le trafic depuis sa cellule, grâce à un téléphone qu'il avait sur lui en prison. "C'est une affaire lourde en ce qu'elle révèle ce qu'est aujourd'hui la structure
de la contrefaçon: de vrais réseaux", a souligné Me Haeri, précisant que Philip
Morris souhaitait "attirer l'attention des tribunaux sur la modification du type de délinquance attachée au tabac". "On va vous dire que pour Philip Morris c'est le dossier de la décennie, alors que (...) ce genre de prise arrive très souvent, notamment dans le sud de la France", répond Me Diligent, craignant qu'on essaie "d'en faire un exemple".
La partie civile réclame environ 25.000 euros au titre du préjudice matériel aux prévenus et 60.000 euros pour le préjudice moral.