Le numéro deux français du transport routier de colis, Mory Ducros, qui emploie plus de 5.000 personnes, a été placé mardi en redressement judiciaire avec une période d'observation de six mois pour tenter de surmonter ses difficultés et trouver un repreneur.
Le tribunal de commerce de Pontoise (Val-d'Oise) a ouvert, comme le sollicitait l'entreprise, une procédure de redressement avec une période d'observation de six mois.
"Cette période d'observation est l'occasion d'élaborer avec le soutien des pouvoirs publics une solution pour l'avenir", a déclaré à la presse André Lebrun, président d'Arcole Industries, propriétaire de Mory Ducros.
"Salaires seront versés, 13e mois compris"
Aujourd'hui, "il est essentiel de conserver la confiance de l'ensemble des clients", a-t-il ajouté, s'employant également à rassurer les salariés: "les salaires seront payés, 13e mois compris".Dans un communiqué, la direction de Mory Ducros a assuré qu'elle visait "une solution de reprise globale". Mory Ducros et Arcole Industries se disent "convaincus de la possibilité de bâtir un périmètre viable au sein du groupe", sans préciser les contours d'un éventuel plan de restructuration.
"Des investisseurs de premier plan, industriels et financiers, ont d'ores et déjà marqué leur intérêt", ces contacts laissant "penser qu'un projet de reprise pourrait être présenté rapidement", a ajouté la direction.
La mise en redressement fait suite au dépôt de bilan de l'entreprise, annoncé vendredi aux salariés, l'un des plus importants en France depuis la faillite de Moulinex en 2001.
Prochaine audience 20 décembre
La procédure, qui gèle temporairement les dettes antérieures de l'entreprise, va lui permettre de poursuivre son activité. Le tribunal a retenu le 31 octobre comme date de cessation des paiements et une prochaine audience fixée au 20 décembre.
"L'objectif est maintenant de sauver l'entreprise et un maximum d'emplois. Tout le monde va se retrousser les manches (...) et dès demain tout le monde repart au boulot pour rassurer les clients", a affirmé le secrétaire du comité d'entreprise, Denis Jean-Baptiste (CFDT), qui s'exprimait au nom de tous les syndicats.
Le CE était représenté à l'audience par Thomas Hollande, fils du président et avocat au cabinet LBBA. Le tribunal de commerce a désigné deux administrateurs judiciaires, dont l'un chargé spécialement de faire le lien avec les salariés.
"Les salariés vont payer les pots cassés"
A l'annonce de la décision, certains salariés ont laissé explosé leur colère, à l'image d'Ahmed Jaouid, persuadé que "les salariés vont payer les pots cassés à la fin des six mois". Celui-ci attend maintenant du gouvernement qu'il mette "de l'argent sur la table".
Avant l'audience, une centaine de conducteurs de camions avaient manifesté devant le tribunal où se jouait leur avenir, mais aussi celui de 2.000 sous-traitants. Au Mans, une cinquantaine ont défilé jusqu'à la préfecture, où une délégation a été reçue, comme à Toulouse.
Les syndicats craignent des suppressions d'emplois massives. Le ministre des Transports Frédéric Cuvillier a déjà laissé entrevoir des milliers de suppressions d'emplois. "Tout va être mobilisé, tout va être étudié" pour espérer le "sauvetage de 2.000 emplois au moins", a-t-il déclaré vendredi.
Alors que le gouvernement dit examiner tous les scénarios, y compris celui d'une reprise "site par site", le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg a confirmé que Mory Ducros était éligible au fonds spécial de 380 millions, récemment réactivé et abondé pour les entreprises en difficultés.
Les préfets des régions concernées devaient être reçus mardi au ministère de l'Intérieur afin d'"étudier l'ensemble des situations", avant les organisations syndicales jeudi à Bercy.
Depuis le début de l'année, Mory Ducros perd, selon M. Montebourg, "5 millions d'euros par mois". L'an dernier, le transporteur a réalisé un chiffre d'affaires de 670 millions d'euros.
La CFDT évalue les besoins de financement de l'entreprise à une quarantaine de millions. Mory Ducros est né de la fusion fin 2012 de deux entreprises malades, l'entreprise de messagerie Ducros et le transporteur Mory, tous deux rachetés par Arcole Industries, spécialisé dans la reprise de sociétés en difficultés.
Mais l'entreprise, qui dispose d'une flotte d'environ 4.500 véhicules, n'a pas résisté à la crise du secteur. Ces derniers mois, elle a vu le nombre de ses agences en France passer de 115 à 84.