Wizernes : portes ouvertes à la papeterie Arjowiggins, menacée de fermeture

La papeterie Arjowiggins a été visitée par des centaines de personnes ce samedi à Wizernes. 

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"Faut faire voir aux gens que c'est un outil qui tourne, qu'on veut pas fermer la boutique", lance Olivier, ouvrier chez Arjowiggins à Wizernes (Pas-de-Calais), en guidant un groupe de visiteurs dans cette papeterie menacée de fermeture.

Munies de gilets fluos et de bouchons pour les oreilles, au moins 2.000 personnes, selon le décompte effectué à l'entrée du site, sont venues samedi voir fonctionner l'usine de papier couché - ou papier glacé - pour cette journée portes ouvertes organisée par les syndicats et les salariés.


"On nous menace de fermer, mais on travaille !", insiste Olivier, 49 ans, dont une trentaine passés à l'usine de Wizernes. Ces "menaces" ? Celles du papetier Sequana, maison-mère d'Arjowiggins, qui a annoncé en avril un plan de restructuration prévoyant la cession de deux sites en France - Charavines, en Isère, et Wizernes - ou, à défaut, leur fermeture. Si aucun repreneur n'est trouvé d'ici un an, Wizernes, usine fondée en 1834, dont les 307 salariés produisent 140.000 tonnes de papier par an, mettra la clé sous la porte.

Ainsi, c'est autant par curiosité - les dernières portes ouvertes, organisées par la direction, remontent à 2002 - que pour soutenir les employés inquiets que les visiteurs se pressent, en suivant par petits groupes leur guide attitré. Dans le groupe mené par Olivier, syndiqué à la CGT, des questions fusent : "Qu'est-ce que vous fabriquez ?" "Est-ce qu'on utilise moins de papier qu'avant ?" "Qu'est-ce que ça va devenir, alors, une friche industrielle ?" "Vous avez des contacts avec le gouvernement ?"

"On fait les magazines, les papiers à cigarettes, les affiches qui sont dans les grands hypermarchés", énumère le guide improvisé, avant de décrire les maux de son industrie : "La concurrence croissante d'internet, les prix des matières premières qui augmentent". 

Un repreneur ? "Faut y croire"

Les salariés tentent de mobiliser élus locaux et gouvernement pour sauver leur usine. Dans une pétition distribuée aux visiteurs, ils demandent le placement du site, par préemption, sous la protection de l'Etat et des collectivités territoriales. Pensent-ils qu'un repreneur se manifestera ? Olivier, confiant : "Ouais, ouais. Faut y croire".

La direction, invisible pendant les deux heures que dure la visite, "veut ouvrir les négociations sur le plan de sauvegarde de l'emploi. Mais on n'en veut pas. Si on les ouvre maintenant, en septembre, on n'est plus là", assure l'ouvrier. A 90 kilomètres de là, la papeterie Stora Enso de Corbehem, qui fabrique elle aussi du papier couché, semblait condamnée à la fermeture. Le ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, vient d'annoncer un "accord de négociation exclusive" avec un repreneur potentiel. Une bonne nouvelle et un espoir pour Wizernes, acquiesce Olivier.

Fiers de leur usine, qui fonctionne tous les jours de l'année "sauf le 25 décembre", les ouvriers dévoilent à ces visiteurs acquis à leur cause les étapes de fabrication d'une feuille de papier couché, en particulier la monstrueuse "machine à papier" qui transforme la pâte en feuilles.
"Ce serait dommage de la casser", observe un quinquagénaire. "Elle date de 1986, c'est l'une des plus modernes d'Europe", lâche le guide, sur un ton de tristesse et révolte contenues.

A chaque stade de la production, des panneaux explicatifs réalisés pour l'occasion. Des schémas, clairs et précis, de petits textes et, sous l'intitulé "Les hommes", des photos des équipes, dont les emplois sont menacés. "Regardez tout ce qu'il y a là !", s'enthousiasme Serge, gérant d'une baraque
à frites à Arques, petite ville voisine, en désignant d'un grand geste l'activité des ouvriers dans le hangar où est découpé le papier. "On a du mal à le croire, que ça pourrait fermer".

Michel, retraité octogénaire venu de Longuenesse, autre localité de la périphérie de Saint-Omer, se fait pensif : "Si tout ça doit disparaître, il faut en avoir conscience. Il ne faut pas que ça disparaisse sans qu'on se pose des questions".

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