La grossesse, un moment clé pour détecter les violences conjugales

Les violences conjugales débutent ou s'exacerbent souvent quand les femmes sont enceintes. Il s'agit donc d'un moment clé pour les détecter, s'accordent les spécialistes, qui plaident pour une formation généralisée du corps médical à un repérage pendant la grossesse.

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Chaque année en France, 201 000 femmes âgées de 18 à 59 ans sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur ancien ou actuel compagnon. Plusieurs enquêtes ont montré que dans 40% des cas, les violences du conjoint débutaient à la première grossesse, et que dans 40% des cas, elles redoublaient durant la grossesse. Une autre étude a souligné que 23% des demandes d'interruption volontaire de grossesse (IVG) étaient directement liées à des violences (viols, violences conjugales, violences familiales).

"La grossesse est un facteur de risque d'apparition des violences conjugales", confirme Richard Matis, gynécologue et coordinateur dans le Pas-de-Calais d'un centre de lutte contre ces violences. Ces statistiques peuvent s'expliquer par une vulnérabilité accrue des femmes durant cette période, par la perspective déstabilisatrice de l'arrivée d'une troisième personne, ou encore par le fait que la femme devient le centre des attentions, ce que l'auteur des violences ne supporte pas. Ces violences peuvent aussi jouer le même rôle que le tabac ou l'alcool et conduire à "des grossesses dites à risque", souligne Richard Matis, pour qui il est donc "doublement important de les détecter". Et ces risques ne sont pas anodins. Emmanuelle Piet, médecin de protection maternelle et infantile, présidente du collectif féministe contre le viol, rapporte les résultats d'une étude réalisée en 2012 sur des femmes enceintes victimes de violences: "Ces femmes avaient trois fois plus de chances d'accoucher prématurément que la moyenne, une grande proportion d'entre elles (7%) ont accouché à la maison, pas par choix mais par contrainte, un tiers d'entre elles ont reçu des coups sur le ventre et 82% ont subi des violences sexuelles".

"Un état de tension permanent"

Les choses devraient pouvoir s'améliorer, la grossesse étant justement le moment où une femme est amenée à rencontrer un grand nombre de professionnels du corps médical, susceptibles de pouvoir déceler le phénomène. "C'est une formidable opportunité pour pouvoir repérer les violences et aider les femmes à en parler", estime Gilles Lazimi, médecin généraliste, membre du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Car les victimes sont "extrêmement soulagées de pouvoir parler". Dans le cadre du plan de lutte contre les violences faites aux femmes, le gouvernement a chargé la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences (Miprof) d'organiser une formation initiale et continue spécifique pour les professionnels, notamment de santé. Certaines universités de médecine proposent déjà une formation, mais l'objectif est de généraliser le dispositif et de former aussi les sages-femmes.

"Plus on sera formées tôt, mieux on sera à même de déceler les signes de violence et d'accompagner ces femmes", juge Mathilde Delespine, sage-femme à Montreuil, qui tient une consultation dédiée aux victimes. "Ce que l'on peut faire, c'est écouter la femme, car parfois ce sera la première fois pour elle, la croire, et essayer de voir ce qu'elle a envie de faire pour sortir de cette situation", estime-t-elle. "Pour réparer une femme qui a subi des violences, il faut faire le contraire de son agresseur", poursuit-elle: "recréer du lien, par exemple en l'incitant à suivre des cours de préparation à l'accouchement, car, lui, l'isole; la valoriser car, lui, l'humilie, et bien renvoyer la responsabilité des violences à l'agresseur, quand il la culpabilise". "Une femme qui subit des violences conjugales est dans le même état que si elle vivait dans un pays en guerre: un état de peur et de tension permanent", insiste-t-elle.
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