Berck : pour aller au boulot, elle dit marcher 4 heures par jour (mais ce n'est pas exact)

Une habitante de Berck a raconté marcher 4 heures par jour depuis 2 ans pour aller au travail. Mais après enquête, c'est loin d'être exact. Décryptage. 

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L'article de La Voix du Nord intitulé "Berck : elle doit marcher 24 km tous les jours pour aller travailler" a beaucoup interpellé, ému, touché. Il a été repris tel quel par de nombreux médias français dans la journée de lundi. Provoquant souvent des réactions légitimes de compassion, d'indignation, d'admiration... Près de 10 000 likes sur la page Facebook de l'Express par exemple. Ce mardi, La Voix du Nord parlait même d'élan de solidarité, de proposition d'aide... L'histoire prend de l'ampleur mais il y a un "mais"...

12km aller, 12 km retour pour un salaire de 600 €

Posted by L'Express on lundi 20 avril 2015

Nous avons contacté les principaux protagonistes de cette histoire. Résultat : la vérité risque bien de gâcher un peu la "belle histoire". Christelle Blondel, habitante de Berck, femme de ménage, travaille bien au village de vacances EDF de Merlimont qui se trouve à une bonne dizaine de kilomètres de chez elle mais elle n'y est envoyée que de temps en temps par une association d'insertion, "Espoir" à Montreuil-sur-mer. Un emploi précaire, saisonnier et aléatoire, comme c'est courant dans ce secteur d'activité.

Cette association nous a assuré que Mme Blondel n'avait par exemple travaillé qu'environ 150 h en 2014 à faire le ménage dans ces gîtes. "Mme Blondel est très courageuse, explique le directeur, Emmanuel Lebouc. Elle a envie de travailler. Il lui arrive de faire un long trajet à pied pour aller travailler. Mais elle ne le fait pas du tout au quotidien. Dire qu'elle fait 24 km en marchant tous les jours depuis 2 ans n'est pas exact." En février, elle a travaillé 16h, en mars 60h. Entre septembre et janvier, pratiquement aucune heure, toujours selon l'association. 

La CCAS, village de vacances EDF, confirme ces éléments et précise que, bien souvent, Mme Blondel est ramenée chez elle par une collègue-amie. Ce lundi, elle a par exemple travaillé 3 heures à Merlimont, a été reconduite en voiture chez elle et elle ne reviendra plus travailler avant dimanche. 

Buzz, embarras et réalité

Christelle Blondel aurait-elle donc un peu "grossi" sa situation ? Non, assure-t-elle au téléphone. Elle maintient les propos tenus dans l'interview à La Voix du Nord. "Je me mets en route tôt le matin car j’ai presque deux heures de marche, raconte-t-elle. Parfois, je fais de l’auto-stop, mais je suis rarement prise. Je marche depuis deux ans, par tous les temps, de février à décembre. Deux fois par semaine, une collègue de travail me ramène chez moi. (...) C’est dommage qu’il n’y ait pas de navette ou de covoiturage pour les gens qui travaillent et qui n’ont pas de moyen de transport, comme moi. » Au téléphone, après plusieurs questions, elle reconnaît tout de même qu'elle ne se rend pas tous les jours à Merlimont. Elle ne se plaint d'ailleurs pas de son sort.

L'association Espoir précise également que des contrats de ménage plus proches de chez elle ont été proposés à Mme Blondel mais qu'elle les refuse le plus souvent parce qu'elle préfère travailler au village de vacances EDF de Merlimont. 

L'affaire devient embarrassante. Mais après de nombreux coups de fil, tout se recoupe et se vérifie. Le titre et le contenu de l'article qui fait le "buzz" ne correspondent pas à la réalité.
Une certitude : le rapprochement -tentant- avec l'histoire de cet Américain qui faisait 33 km par jour est malvenu. L'histoire de Christelle Blondel a quelques points communs mais...

Il y a deux mois environ, l'histoire de James Robertson avait effectivement ému dans le monde entier. Cet homme de 56 ans devait marcher 33 km par jour pour se rendre l'usine. Il est devenu quasiment un héros aux Etats-Unis. Un étudiant avait organisé une collecte qui avait permis de rassembler 342 000 dollars, soit l'équivalent de 30 ans de son salaire. James Robertson s'était même vu offrir une voiture par un concessionnaire. 
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