À visiter pendant les vacances : le centre historique du monde du travail à Vassogne et ses 12 000 outils et objets d'art populaire

Créé par un passionné d'histoire de la reconstruction des années 1920, le centre historique du monde du travail à Vassogne dans l'Aisne est un musée associatif. À découvrir :12 000 outils et objets d'art populaire de différents métiers dans une scénographie moderne et dynamique. (Première publication le 21/08/2021)

Si vous visitez le Chemin des Dames, vous vous rendrez vraisemblablement à la Caverne du Dragon, sur les traces des poilus qui ont tant souffert pendant la Première Guerre mondiale.

Mais pour sortir de la guerre destructrice, vous pourrez en apprendre beaucoup sur la reconstruction de ces territoires meurtris lancée dès les années 1920 en vous rendant à Vassogne. Ce petit village de 88 habitants accueille depuis 2010 le Centre historique du monde du travail. Le lieu propose des expositions temporaires et une riche collection d'objets et d'archives.

Un petit musée né dans la tête d'un enfant, il y a trente ans.

Un trésor dans une écurie

"C’était un corps de ferme et également le lieu d’une ancienne entreprise de maçonnerie qui a reconstruit en partie le Chemin des Dames. Il y avait déjà tout un univers d’objets et d’archives conservés à cet endroit." Lorsque les parents de Stéphane Bedhome héritent une ferme à Vassogne, au centre du triangle Soissons-Laon-Reims, ils sont loin d'imaginer qu'ils vont changer la vie de leur fils à tout jamais.

Un des corps de ferme est plein de vieux outils. Mais il est hors de question de remplir des remorques pour la déchetterie : "mes parents font les brocantes et aiment bien les objets anciens, ils en achètent aussi pour eux."

Stéphane, lui, y voit un trésor. Et du haut de ses huit ans, il se lance dans un classement précis : "je complète les métiers que j’ai pu reconstituer à partir de quelques livres que mes parents m’achètent autour de ça. À l’époque, j’ai vidé une ancienne écurie qui est dans ce corps de ferme et qui est devenue une salle de conservation. J’avais aménagé un petit musée que je faisais visiter à mes parents. Je leur montrais les objets".

Une amitié déterminante

Quand beaucoup d'enfants se seraient rapidement lassés, le jeune Axonais enrichit sa collection. Mais d'une salle d'exposition familiale à un musée, il y a un monde. Et c'est une rencontre qui va tout faire basculer. "J’étais au lycée Charles-Péguy à Châlons-en-Champagne. Une exposition était organisée par la prof d’arts plastiques de l’époque sur la Maison de l'outil et de la pensée ouvrière de Troyes et le scénographe était là. Je vais le voir, je lui dis que j’ai un petit musée, que je collectionne les outils. Il a été un peu interloqué. Il m’a dit très bien, je vais venir voir et je t’invite chez moi. Là, c’est le choc, parce que je découvre une collection extraordinaire. Un personnage extraordinaire qui m’a appris énormément de choses en fait."

Ce personnage extraordinaire, c'est Daniel Pillant. Il est alors professeur à l’école d’art et de design de Reims. Dans ses jeunes années, il avait, excusez du peu, dessiné les salles à manger du paquebot France. Le designer avait ensuite consacré son travail à l’outil et aux objets populaires, devenus sa spécialité.

Une vraie amitié se crée entre l'artiste et le jeune homme. "À partir de là, on fait beaucoup de foires, de marchés ensemble, car lui est collectionneur, moi aussi. Je travaille avec lui sur certains projets. Et à partir de 2007, on commence à parler de créer un musée. Et il me dit OK, je vais t’accompagner."

Trois ans seront nécessaires pour imaginer un projet moderne, digne des grands musées. "Quand on travaille avec quelqu’un comme Daniel Pillant, la barre est très haute. C’était quelqu’un de très exigeant, très dur, il n’était pas question de faire la grange enchantée. Il faut des projets, des scénographies, des dessins, des choix de couleurs, des choix de matières, des choix d’objets car une collection c’est aussi une unité dans les choix."

La barre était haute, comme la détermination de Stéphane Bedhome qui a validé entre-temps une thèse de doctorat en Histoire militaire intitulée... Reconstruire le Chemin des Dames (1919-1939) !

250 mètres linéaires d’archives

Deux salles d’exposition sont inaugurées en 2010 dans un premier bâtiment. Six ans plus tard, suivra le conservatoire des collections, un concept de réserve visitable. Le musée est riche de 12 000 outils et autres objets d’art populaire de la France entière, ainsi que de 250 mètres linéaires d’archives. "Il y a eu énormément de dons et de dépôts. Des archives de cafetiers, d’épiciers, de menuisiers. Mais on ne collecte que les archives pour l’Aisne", précise Stéphane Bedhome, bien décidé à ne pas se laisser submerger.

Le Centre historique du monde du travail présente les objets comme des sculptures. Et comme il n'est pas un grand fan de vidéo, Stéphane préfère reconstituer le mouvement de l’objet dans l’espace en le démultipliant : "au lieu de présenter une binette statique, on va en présenter dix se succédant les unes aux autres, recréant le mouvement de biner."

Des objets et des artistes contemporains

Plus surprenant, parmi les curieux se cachent aussi des personnes du milieu de l’art attirées par une spécificité à laquelle tient particulièrement Stéphane Bedhome, les créations contemporaines. À l'occasion de la dernière exposition "Sucre & Vous", l'équipe du musée a donné carte blanche à la photographe plasticienne Seylvie Pelsen. L'artiste a créé "une œuvre en sucre réalisée à partir des fers à gaufrer des fleuristes artificiels qu’on conserve dans nos réserves."

Vassogne est semble-t-il aussi dans l'air du temps, car les objets présentés apportent selon Stéphane "un certain nombre de réponses dans le réemploi, dans la réutilisation, dans l’utilisation de matériaux durables et maintenant on a public de plus en plus sensible à ça. Quand ils voient la collection de ruches en paille, il y a un vrai intérêt qu’il n’y avait pas il y a cinq ou six ans."

Mais ce beau projet ne tient que grâce aux bénévoles engagés qui se battent pour le musée en faisant des visites, en réalisant des éléments de mobilier, en prêtant un camion. "Dans l’association, il y a un menuisier, un métallier, un électricien, différentes personnes dans différents corps de métier qui réalisent les scénographies. On met tous la main à la pâte. Mon père fait des travaux, ma mère des visites, je fais de la maçonnerie, de la couverture. On n’a pas le choix. Sans ça, on ne pourrait pas le faire."

Cette abnégation permet des miracles. S'il fallait faire appel à des professionnels, les expositions coûteraient 80 000 euros à chaque fois. Les bénévoles de Vassogne parviennent à limiter les budgets à 5000 euros, catalogue compris. 

Avec Gontran Giraudeau / FTV

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