Les députés de la majorité et de droite ont rejeté ce mercredi une proposition de loi contre la désertification médicale qui proposait de restreindre la liberté d'installation des médecins. Une proposition par ailleurs unanimement décriée par les syndicats de praticiens...
Contre les pénuries de médecins, la groupe Nouvelle gauche a prêché dans le désert à l'Assemblée: son texte "contre la désertification médicale" a été repoussé par la commission des affaires sociales.
La première proposition consistait à limiter les installations de médecins libéraux dans les zones en "fort excédent": le praticien qui voudrait s'y établir devrait attendre qu'un autre s'en aille, sinon ses patients ne seraient pas remboursés par l'assurance maladie.
Un forme de "conventionnement sélectif" qui avait également été défendu fin 2017 par la Cour des comptes et le Conseil économique, social et environnemental (Cese). "La régulation est nécessaire, c'est la seule solution qu'on n'ait pas essayée", affirme Guillaume Garot, rapporteur de la proposition de loi, assurant que "ce n'est pas une mesure de coercition".
Et pourtant, la liberté d'installation reste une ligne rouge pour les syndicats médicaux. Six organisations d'internes et jeunes médecins ont dénoncé dans un communiqué une mesure qui "ne peut que (les) décourager" d'exercer en libéral.
Cette réaction commune a reçu le "total soutien" de la CSMF, premier syndicat de médecins libéraux, tandis que Jacques Battistoni, président de MG France - principale organisation chez les généralistes - a fustigé une "erreur de diagnostic" des parlementaires de gauche.
"La liberté a toujours été la meilleure incitation pour la médecine", a pour sa part estimé Philippe Vermesch, président du SML.
"Inciter davantage"
Les mêmes arguments ont été utilisés par les députés de la majorité et de la droite pour battre en brèche la proposition de loi en commission. Le texte envoie "un message de coercition (qui) tue l'attractivité" du métier, a ainsi reproché Julien Borowczyk, élu LREM et médecin."Plus on contraindra les médecins libéraux, moins la médecine libérale sera attractive", a abondé son confrère Cyrille Isaac-Sibille (Modem), tandis que Josiane Corneloup, députée LR et pharmacienne, a affirmé qu'"il ne faut pas imposer, il faut libérer" et "inciter davantage".
Le second volet de cette proposition de loi, qui prévoyait d'instaurer le tiers payant dans les maisons et centres de santé, subira le même sort. Cette mesure devait "libérer du temps médical" et "inciter les médecins à venir s'installer dans ces structures collectives", qui sont "un des outils mis en avant par le gouvernement pour lutter contre la désertification médicale", selon M. Garot.
Mais la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a décidé en octobre de reporter sine die la généralisation du tiers payant à l'ensemble des assurés sociaux, jugeant le projet "techniquement pas faisable" dans les délais prévus.
Pour lutter contre les déserts médicaux, le gouvernement a présenté à la même époque un plan reposant surtout sur des incitations financières: cumul emploi-retraite, télémédecine, détachement dans les zones sous-denses.
Ces territoires, dans lesquels les médecins peuvent bénéficier d'aides à l'installation, seront par ailleurs redéfinis cette année et "représenteront 18% de la population nationale contre 7% actuellement", selon le ministère.