Un trou de 17 mètres se forme au milieu des vignes de Champagne : "ça peut être très brutal, d'où la dangerosité du phénomène"

À Crouttes-sur-Marne, au sud-ouest de Château-Thierry, dans l'Aisne, un effondrement de parcelles agricoles s'est produit début août 2024 et a formé un trou béant. Depuis quelques années, plusieurs phénomènes similaires ont été observés dans le département. Explications.

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C'est une image qui détonne : un trou de 16 à 17 mètres de diamètre et de 8 mètres de profondeur en plein milieu des vignes. À Crouttes-sur-Marne, dans l'Aisne, un éboulement de parcelles viticoles a eu lieu début août 2024.

Ici, au cœur du vignoble de Champagne, les raisins ont été engloutis. "C'est vraiment impressionnant de voir les vignes suspendues en l'air. Ça fait des belles photos, mais pour les vignerons, c'est quand même une contrainte. Il faut arracher à peu près 500 pieds de vignes", explique Hubert Adam, maire de la commune. Depuis quatre jours, les agriculteurs s’emploient également à reboucher au plus vite la cavité.

La composition des sols expliquerait ce phénomène. "C'est lié à la dégradation d'une ancienne carrière de gypse qui a été exploitée pour la production de plâtre. Sur les plateaux nord de la vallée de la Marne, il y a une couche géologique qui contient du gypse qui a été exploité en souterrains", précise Baptiste Meire, ingénieur géologue au BRGM des Hauts-de-France.

Le gypse, une roche tendre

"Le gypse, c'est un peu comme du sel donc c'est très sensible à l'eau. Ces carrières ont été abandonnées, elles ne sont plus entretenues. Ce sont notamment les apports d'eau météoriques, par les pluies tout simplement, qui vont dégrader petit à petit la voûte des cavités. Ça va entrainer progressivement une dégradation qui va remonter en surface. Le jour où ça remonte, ça provoque un effondrement circulaire que l'on appelle fontis."

Dans le secteur, ces effondrements sont assez fréquents. En 2022, à une centaine de mètres de la parcelle de vignes, une autre fosse s'était formée. "Lors de notre première expertise, on avait identifié via les photos aériennes et les observations de terrains, une quantité assez importante et assez inédite d'effondrements circulaires de même nature et de même taille. C'est un évènement que l'on peut considérer comme relativement courant sur les plateaux au nord de Crouttes-sur-Marne", confirme le spécialiste. Il y en aurait une trentaine en tout dans les environs. "On parle de galeries de plusieurs centaines de mètres de long, 5 mètres de large et 6 mètres de haut, ça reste des vides très importants", insiste-t-il.

Un phénomène difficile à anticiper

Toutefois, le réseau des anciennes galeries n'est pas précisément connu. Les spécialistes du bureau de recherches géologiques et minières se sont saisis du dossier depuis plusieurs années car le risque est imprévisible. "C'est assez difficile d'identifier des phénomènes précurseurs. Il est possible, si on est là quelques heures avant, de potentiellement voir l'apparition de fissures dans le terrain. Mais ça reste des évènements brutaux, ça arrive à un instant T."

La plupart du temps, l'effondrement se déclenche quand il y a une pluie ou une surcharge mécanique, par exemple le passage d'un engin assez lourd. Ça peut être très brutal, d'où la dangerosité du phénomène.

Baptiste Meire, ingénieur géologue au BRGM des Hauts-de-France

Quid des routes départementales ?

Les terrains sont principalement des parcelles agricoles. Aucune habitation ne semblerait concernée. Néanmoins, le danger pourrait être plus important, d'après les experts : "Il y en a des routes départementales sur les hauts plateaux. Est-ce que ces routes sont sous-clavées ? Est-ce qu'un jour il pourrait y avoir un phénomène similaire qui affecte ces routes ? Dans ce cas-là, ça pourrait être beaucoup plus grave."

Le BRGM préconise de cartographier les anciennes galeries et d'identifier les zones de croisements. L'idée étant de localiser en surface les zones à risque et de prévoir de travaux de sécurisation et/ou de comblements localisés. Une réunion devrait se tenir avec les autorités en septembre 2024 pour faire le point.

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