"C'est un voyage dans l'Iran du 19e, à l'époque des Qajars", résume Christian Lacroix, scénographe de la première rétrospective consacrée à l'art fastueux et méconnu de cette dynastie, qui s'ouvre mercredi au musée du Louvre-Lens.
Pour accéder à l'exposition "L'Empire des Roses", référence à un recueil d'un poète persan et au palais des premiers souverains qajars, les visiteurs doivent passer sous une monumentale porte reprenant la triple arcade des ruines du palais d'Ashraf.
"Cette porte est destinée à donner l'impression de pénétrer dans un palais, nous avons souhaité que les gens se sentent transportés ailleurs", commente le créateur Christian Lacroix.
Ainsi, les espaces sont marqués d'une couleur vive et séparés par des ruelles intérieures recouvertes de moquette rappelant les productions textiles iraniennes. De la musique classique persane berce l'exposition. "Plus qu'une exposition, c'est un véritable voyage", a estimé la ministre de la Culture Françoise Nyssen en inaugurant l'exposition mardi.
Avant un panorama culturel de la période, les visiteurs sont amenés sur les traces de voyageurs européens, dont le peintre Jules Laurens et l'architecte Pascal Coste qui ont joué un rôle essentiel dans la découverte de l'Iran qajar en Europe. L'Iran du 18e siècle est la proie d'une guerre civile entre trois principales tribus. Parmi elles, les Qajars, dont le chef, Aqa Muhammad Khan, parvient progressivement à réunifier l'ensemble du pays sous son autorité, raconte l'exposition. Plusieurs souverains se succéderont de 1786 à 1925.
Au fil des pièces, de nombreux portraits de ces souverains sont exposés. Souvent de couleurs vives, ils jouent un rôle essentiel dans la construction de l'image triomphale de cette monarchie iranienne.
Plus de 400 oeuvres
"L'art qajar est un art politique, qui a servi à assurer l'image d'une dynastie qui pouvait parfois, dans les faits, être assez faible, alors que dans l'image qu'elle voulait donner, elle se représentait comme étant flamboyante et forte", explique Gwenaëlle Fellinger, la commissaire de l'exposition.
On observe notamment les majestueux portraits sur toile des souverains Fath Ali Shah sur son trône et de Nassir al-Din Shah représenté en apothéose "à la manière d'une Madone de la renaissance italienne", décrit un cartel.
Une galerie de l'exposition est aussi consacrée aux "us et costumes" de la cour, qui jouent un grand rôle dans l'apparat des souverains : manteaux, costumes militaires, chaussures et armes (sabres, épées, poignards). Tapis, peintures, dessins, bijoux... Au total, plus de 400 oeuvres, dont certaines
en exclusivité mondiale, issues de collections privées, d'institutions européennes et de musées iraniens, sont présentées.
[L’Empire des roses] Surprenante, immersive, originale… L’exposition transporte les visiteurs au coeur d’un somptueux palais iranien.
— Louvre-Lens (@MuseeLouvreLens) 27 mars 2018
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Un somptueux candélabre en cristal de Baccarat salue le visiteur au terme du parcours. "Une prouesse technologique et esthétique importée d'Europe, qui montre à quel point les Qajars avaient un goût" pour ce continent, affirme Mme Fellinger.
Au fil des années, de nouvelles techniques artistiques seront pratiquées en Iran, "avec notamment la photographie, qui aura un impact dans la peinture, mais aussi dans les productions d'objets d'art", ajoute-t-elle.
"Les oeuvres iraniennes reprennent souvent des formes européennes, tout en conservant des techniques traditionnelles de décor. Elles reflètent les tensions et les recherches d'une nouvelle identité iranienne, au sein d'un monde marqué par l'arrivée de la modernité", explique un cartel.
Au début du 20e siècle, le pouvoir est contesté par le peuple et les religieux et, en 1906, la révolution constitutionnelle marque le début de la longue chute de la dynastie des Qajars.
L'exposition se tient jusqu'au 23 juillet.