Brexit : qu'est-ce-que ça change pour le Nord Pas-de-Calais ?

La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne va-t-elle avoir un impact pour le Nord Pas-de-Calais ? 

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Difficile évidemment de mesurer clairement l'impact de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. Mais la question se pose clairement dans notre région, prinicipal point de passage vers l'Angleterre. Economie, politique, vie pratique : on fait le point que ce qui va bouger, ce qui va peut-être changer, ce qui ne sera pas du tout impacté.

Eurotunnel 

La société qui assure l'exploitation du Tunnel sous la Manche a immédiatement tenu à se montrer rassurente. Pour ses clients et ses actionnaires. "L'issue du référendum ne devrait pas affecter les activités de la concession du tunnel sous la Manche et groupe Eurotunnel maintient par conséquent ses objectifs", indique un communiqué. Les Britanniques se sont prononcés jeudi en faveur d'une sortie de l'UE, le "Brexit" (pour "British Exit") l'emportant avec 51,9% des voix, une nouvelle qui a provoqué vendredi un effondrement de la livre sur le marché des changes.

"Une baisse de la livre sterling ferait baisser le montant de la dette du groupe dans cette monnaie, augmenterait les coûts des concurrents maritimes et pourrait soutenir les exportations britanniques, ce qui compenserait les éventuels effets négatifs", explique Eurotunnel. 

Port de Boulogne-Calais

Même style de discours au Port de Boulogne-Calais, premier port français de voyageurs et le leader du fret transmanche maritime. Le Royaume-Uni n’ayant jamais fait partie de l’espace Schengen, le Brexit n’aura aucun impact sur le transit des personnes et des biens via Calais.

Jean-Marc Puissesseau, PDG du Port Boulogne Calais déclare : « Le Brexit nous peine mais ne nous inquiète pas. Le Port Boulogne Calais restera le point de passage privilégié entre la France et le Royaume-Uni et un lien vital pour Londres. »

Passagers-Touristes

Pas de changement à prévoir de ce côté. Il faut rappeler que le Royaume-Uni n'est ni dans l'espace Shengen. Au moins, dans un premier temps. Eurotunnel a d'ailleurs assuré que "les biens et personnes transitant par le Tunnel sous la Manche resteraient soumis aux mêmes procédures qu'actuellement" . 

"Il n'y a aucun changement concernant la sécurité ou l'immigration", a également assuré Eurostar.

 

Pour les Britanniques vivant au Royaume-Uni, l'effet le plus immédiat et perceptible du Brexit devrait se faire sentir sur la liberté de déplacement des ressortissants britanniques au sein des autres pays de l'Union européenne. Si un simple document d'identité suffisait jusqu'à présent pour se déplacer au sein de l'espace Schengen, bien que le Royaume-Uni n'en soit pas membre, la sortie du pays du bloc des 28 devrait désormais s'accompagner de la nécessité pour les ressortissants britanniques de demander un visa en cas de voyage en Europe continentale. A l'heure actuelle, seuls 44 pays sur 219 imposent des visas à l'avance aux ressortissants britanniques.

Livre sterling

Les ménages britanniques devraient également se préparer à débourser davantage qu'auparavant pour aller passer leurs vacances sur le Vieux Continent. Non seulement parce que la chute de la livre face à l'euro va inévitablement réduire leur p ouvoir d'achat, mais également en vertu d'accords communautaires qui permettent à toute compagnie européenne d'opérer sans limite de fréquence, de capacité ou de prix dans l'espace aérien européen.  Sans parler des frais d'itinérance pour les téléphones mobiles, qui ont eux aussi été harmonisés à l'échelle européenne, ou des règles européennes permettant d'obtenir une compensation financière en cas de retard ou d'annulation d'un vol.

A l'inverse, pour les Nordistes, la vie pourrait être un peu moins cher en Angleterre.

Duty-free

Le duty free (commerce détaxé) n'existe plus depuis 2000. Pourrait-il réapparaître ? Oui, mais alors les quantités de marchyandises autorisées diminueraient alors sensiblement, ce qui inquiète els commerçants calaisiens. « Si les compagnies maritimes le remettent en place, que cela leur permet de rentabiliser leurs entreprises grâce à leurs boutiques, peut-être que cela leur permettrait de baisser le prix des traversées et donc de compenser par le volume. Mais on ignore encore quelle sera leur politique », nuance dans La Voix du Nord, Jérôme Pont, responsable du magasin Calais Vins.

Economie

La Grande-Bretagne est actuellement le troisième partenaire commercial du Nord Pas-de-Calais et le cinquième investisseur étranger. On ignore les conséquences éventuelles sur cette économie capitale pour la région.

Frontière-migrants

Le Brexit aidera-t-il les migrants de Calais à gagner le Royaume-Uni ? Si le traité du Touquet sur la gestion de la frontière est un texte bilatéral, l'idée d'une dénonciation gagne en poids politique en France après le vote britannique pour sortir de l'UE. Dans les heures qui ont suivi les résultats du référendum, plusieurs responsables politiques ont appelé à remettre en cause cet accord datant de 2003. "Le peuple britannique a tranché, je demande au gouvernement français de renégocier les accords du Touquet", a tweeté Xavier Bertrand, président LR de la région Les Hauts de France.

L'eurodéputée écologiste Karima Delli a pour affirmé sur Twitter que "François Hollande doit renvoyer les accords du Touquet aux oubliettes". Le parallèle entre Brexit et Touquet n'est pas récent. Début mars, le ministre de l'économie Emmanuel Macron avait clairement averti que "le jour où cette relation sera rompue, les migrants ne seront plus à Calais".

Cet avertissement, à remettre dans le contexte pré-referendum, allait à l'encontre de la position française, et le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve s'était fortement agacé du "buzz" de son collègue de l'Economie, affirmant que "la question ne se pose pas". Le traité du Touquet est en effet un texte bilatéral, conçu pour lutter contre l'immigration illégale, et signé après la fermeture du camp de Sangatte qui avait fermé en 2002. Il prévoit bien une clause de sortie, avec un délai de deux ans. Confiant les premiers contrôles d'immigration au pays de départ, ce traité a entraîné de fait un glissement de la frontière britannique dans les ports français.

"Un accord injuste"
"A présent que la Grande-Bretagne n'est plus dans l'UE, il n'y a aucune raison que la frontière se trouve encore à Calais", affirme à l'AFP François Gemenne, professeur à Sciences Po, pour qui Londres s'est "défaussé de ses responsabilités" avec cet accord "injuste pour la France et pour les migrants". "Le paradoxe est que, alors que le Brexit a été majoritairement un vote anti-migration, la Grande-Bretagne pourrait se retrouver à devoir accueillir davantage de migrants demain", note-t-il -- d'autant que Londres ne pourra plus renvoyer les demandeurs d'asile vers le premier pays où ils ont laissé une empreinte, comme le prévoit le règlement européen dit "de Dublin".

"Jusqu'à présent les Britannique pouvaient se réclamer d'une certaine solidarité européenne, mais cela ne va plus être possible", abonde Henri Labayle, professeur à l'université de Pau et spécialiste des questions migratoires. De plus, cet accord "coûte très cher sur le plan politique, les partis populistes se nourrissant de cette situation", ajoute-t-il. L'universitaire met toutefois en garde: le campement de migrants de Calais ne disparaîtra pas avec la dénonciation du Touquet, car "il y a un obstacle physique" avec la mer. La population sur la "Jungle" a ainsi à nouveau augmenté ces dernières semaines, à près de 4.500 personnes, selon la préfète du Pas-de-Calais. Côté français, on souligne au ministère de l'Intérieur que la position sur le sujet n'a pas changé avec ce référendum.
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