Bruxelles : accusés de racisme, les "Noirauds" ne défileront plus avec le visage teint en noir

Les "Noirauds" se grimeront désormais le visage aux couleurs du drapeau belge. Cette pratique, qui remonte à l'époque coloniale, a été assimilée à un "blackface", représentation caricaturale et raciste des personnes noires.

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C'est la fin d'une tradition qui date de la période coloniale en Belgique. Chaque année depuis 140 ans, les "Noirauds" défilent dans les rues de Bruxelles pendant le carnaval, le visage teint en noir, entrant dans les cafés et les restaurants pour réunir des fonds au bénéfice de l'enfance.

Les membre de cette association, dont la présidente d'honneur est l'ancienne reine des Belges Paola, ont annoncé ce mercredi 13 mars mettre fin à leur grimage noir qu'ils utilisaient pour se déguiser en notable africain. A la place, ils se teindront le visage de rouge, jaune et noir, aux couleurs du drapeau national.
 

Les Noirauds

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Cette tradition, lancée par des bourgeois bruxellois qui, pour préserver leur anonymat, se teignaient le visage, a été assimilée à un "blackface". Une représentation caricaturale et raciste des personnes de couleur développée au XIXe siècle, aux Etats-Unis, quand des comédiens blancs incarnaient des personnes noires en se grimant le visage.

 

Polémique après polémique...


"Ca faisait quelques années qu'on réfléchissait à évoluer" afin d'"éviter les polémiques" et "de se heurter à quelques personnes qui trouveraient que ce maquillage noir n'est plus d'actualité", a expliqué à l'AFP Albert Vermeiren, ancien président de l'association caritative bruxelloise.

Cette tradition a été hautement critiquée ces dernières années dans un pays qui a été la puissance coloniale du Congo, du Rwanda et du Burundi jusqu'au début des années 1960. L'ex-correspondant de France 2 à Bruxelles, François Beaudonnet, avant notamment dénoncé que Didier Reynders, le ministre belge des Affaires étrangères, se soit grimé en roi africain d'opérette en 2015.
 
A l'époque, il avait été taxé de "paternalisme" par de nombreux défenseurs de cette tradition. La presse belge ne s'était pas non plus émue de la participation d'un ministre à ce défilé, comme la RTBF qui se demandait si le reportage du journaliste français n'était pas une "tentative d'allumer une polémique (...) en décelant des relents colonialistes où ils ne se trouvent pas".
 
"Allez-vous vous présenter avec ce visage teint en noir lors de votre prochaine rencontre avec des responsables africains ? Honte à vous !", avait lancé sur Twitter Peter Bouckaert, de l'ONG Human Rights Watch. L'actrice et activiste américaine Mia Farrow avait également réagi. Quatre ans après la polémique, la pratique vient tout juste d'être abandonnée. "Cela a été bien long, mais les mentalités évoluent et c'est tant mieux", commente François Beaudonnet sur Twitter.
 
Leur "nouveau look plus dans l'air du temps", permettra aux Noirauds "de conserver leur anonymat" et renforcera "le caractère festif" de la manifestation, écrit l'association caritative dans un communiqué. Mais la décision a mis du temps à mûrir, certains membres restant opposés aux nouvelles couleurs. "Sincèrement, il y en a qui s'opposent et disent « Pourquoi se plier ? ». Mais c'est une minorité", a affirmé Albert Vermeiren.

Luc Rentmeesters, l'actuel président de l'association, dit "avoir poussé" pour ce nouveau maquillage car "ça trainait". Les Noirauds défileront pour la première fois avec leurs nouvelles couleurs dès samedi dans les rues de Bruxelles. La statue de Manneken Pis, symbole de la ville, traditionnellement vêtue d'un costume de "Noiraud" pour l'occasion, sera elle aussi désormais grimée aux couleurs du pays.
 
 
Et la "Nuit des Noirs" du carnaval de Dunkerque ?
Programmée au Kursaal pendant le carnaval de Dunkerque, la "Nuit des Noirs" avait suscité pour la 1ère fois une vive émotion en 2018. Les organisateurs avaient dévoilé l'affiche de l'événement au moment de la polémique sur le "blackface" d'Antoine Griezmann, ce qui avait déclenché un tollé. Le Conseil représentatif des associations noires de France (Cran) et l’alliance noire citoyenne (ANC) avaient déposé un référé auprès du tribunal administratif de Lille pour le faire interdire. L'événement avait finalement eu lieu comme prévu.

"Dunkerque a été une ville négrière, il y a eu plus de 60 bateaux négriers qui sont partis d'ici et non seulement on n'évoque pas la mémoire de ces ancêtres, de ces esclaves dans cette ville, mais on tourne en dérision les Africains avec des images de propagande coloniale", avait commenté Louis-Georges Tin, président du Cran.

Du fait de la présence de militants antiracistes devant l'entrée de la salle pour contester la tenue de ce bal, quelques heurts avaient éclaté avec les carnavaleux.

 
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