Coronavirus et confinement - une semaine après la fermeture de l'UPJV, enseignants et étudiants avancent à tâtons

La fermeture des universités en raison de la crise sanitaire liée au coronavirus a soulevé de nombreuses questions. Comment assurer la continuité pédagogique ? Comment évaluer les étudiants ? À l'université de Picardie-Jules Verne, ce n'est facile ni pour les étudiants, ni pour les enseignants. 

"L'année prochaine, j'avais prévu de faire un master en alternance sur Paris, je ne sais pas du tout si je vais pouvoir...", s'inquiète William Aubatin, étudiant en troisième année de licence STAPS à l'Université Picardie-Jules Verne. L'annonce de la fermeture de l'université et les mesures de confinement rendent son avenir incertain. "Je devais passer ma soutenance de stage, mais il a été interrompu à cause de la crise sanitaire.", explique-t-il. "Cette soutenance compte coefficient 12, c'est très important, ça détermine le fait de valider son année ou pas." Et donc la poursuite d'études. 

Avancer dans l'incertitude

Dans cette situation inédite, l'université semble avancer encore un peu à tâtons pour que la crise sanitaire n'ait pas un impact négatif sur le cursus des étudiants. William et les étudiants de sa promo ont dû répondre à un questionnaire pour indiquer s'ils avaient pu ou non poursuivre leur stage et s'ils étaient en mesure de passer une soutenance. "Sur quoi on va être évalués si on n'a pas fini notre stage ? Les soutenances vont-elles être décalées en septembre ?" L'équipe pédagogique cherche elle-même encore les réponses.

Car la situation n'est pas simple non plus pour les enseignants. Dominique Choisy enseigne l'écriture scénaristique et la réalisation dans la filière cinéma. "La présidence est en train de chercher des solutions pour les évaluations du second semestre et les passages dans l'année suivante. Je crois que chaque UFR (Unité de formation et de recherche, ndlr) fait comme il peut pour l'instant.", explique-t-il. Pour assurer la continuité pédagogique, chaque filière s'organise comme elle peut. Un travail "d'une complexité inouïe" à l'échelle de l'université, car il n'existe pas de solution universelle : il faut s'adapter au type de cours, à la matière, au niveau d'études. 

Les cours magistraux par exemple peuvent être communiqués sur l'Espace numérique de travail. "Certains profs nous ont envoyé leurs cours sur les plateformes informatiques, mais pas tous", précise William. 
 

Cours en visio-conférence

D'autres, comme à l'IUT d'Amiens, font des cours à distance en visio conférence. Depuis la fermeture des sites, 100% des cours ont été assurés. "Les logiciels de communication, nous les utilisons déjà depuis septembre avec les étudiants", nous explique Aymeric Lamidiaux par téléphone, entre deux "visio-cours". "Ces outils nous permettent de projeter des choses, de répondre aux questions, comme si on était en classe finalement." Il peut même voir sur son écran qui est connecté. "Par expérience, on sait que sur la durée, on finit par perdre des étudiants dans l'enseignement à distance. Mais là, les circonstances étant particulières, on a une très forte mobilisation, on est très contents de la première semaine."
 
Il aura fallu à peine 72h à l'ensemble de l'équipe pédagogique pour prendre ses dispositions. "L'annonce est tombé le jeudi soir, le lundi matin à 8h les cours étaient assurés", se réjouit Aymeric. Il admet tout de même que les enseignements de l'IUT sont propices à ce type de dispositifs. "Et puis, on est déjà très tournés vers le numérique, on utilise tous des vidéo projecteurs et des tableaux numériques." 

D'après Imane Ait Bram, étudiante en première année en DUT Gestion des entreprises et administrations, tout n'est pas encore tout à fait en place. "Pour l'instant, il y a encore peu de profs qui font des visioconférences, mais dés la semaine prochaine il devrait y en avoir plus. Les autres nous envoient des PDF avec des cours et des exercices.", précise-t-elle. "C'est intéressant parce que ça évite que la situation n'ait des conséquences désastreuses pour notre année." Elle admet néanmoins que ce n'est pas toujours évident de rester concentrée à 100%. "Du coup, pour se motiver, on fait des groupes de travail, on s'appelle à trois ou quatre, comme si on était ensemble pour travailler."
 

Adaptations au cas par cas

Malheureusement, dans certains cas, le "visio-cours" n'est pas du tout envisageable. Pour Dominique, qui fait des travaux dirigés sur le cinéma, "impossible !" Il prend l'exemple des étudiants en troisième et dernière année de licence. "Ils sont censés tourner un film pour valider leur semestre. Pour certains, c'était déjà fait, ils sont en montage. Mais pour les autres, ils ont préparé leurs films, ils étaient prêts à tourner..." Mais impossible d'aller au bout du devoir. "Alors je vais évaluer leur niveau de préparation."

Pour limiter les inégalités, il a choisi d'instaurer la règle du "10 minimum", en donnant la moyenne par défaut, "et les points au-dessus de 10, c'est du bonus". Une décision qui n'a pas été trop difficile à prendre. "Pour les TD, ils sont très rarement en-dessous de la moyenne de toute façon en temps normal, puisqu'on les accompagne dans leurs travaux.

Pour les étudiants de deuxième année, il notera le devoir de fin d'année, à faire chez eux, et pour les masters, les cours étaient presque finis. "En ce qui me concerne, ce n'est pas la cata du tout, les étudiants vont avoir les notes qu'ils auraient eu sans confinement.", conclut-il. 

Conserver la concentration

Car en dehors de la continuité des cours, la préoccupation commune à tous ceux que nous avons interrogé est bien celle de l'évaluation. Déjà, parce que les notes déterminent les validations de semestre et les éventuelles poursuites d'études, mais aussi parce que l'évaluation sert de moteur pour les élèves. Aymeric, le professeur "super-connecté" de l'IUT, le sait parfaitement. "Les étudiants savent qu'il a été décidé qu'on ne pouvait pas les évaluer sur les cours non-présentiels. Donc forcement, on risque d'avoir moins d'implication. Et comme on n'est pas avec eux dans une salle de classe, on ne peut pas forcément détecter les décrochages comme on le fait d'habitude."

Reste désormais aux étudiants de redoubler d'efforts pour rester concentrés et impliqués dans leur travail. Pas toujours facile lorsqu'on est confiné à domicile, entouré de distractions. Mais il faudra bien trouver des solutions, car lors de la reprise, l'atterrissage risque d'être difficile. À condition bien sûr que tous les outils soient mis à leur disposition. Si l'UPJV a mis en place une foire aux questions très complète pour donner un maximum d'informations aux étudiants, certains regrettent le manque d'organisation de leurs professeurs.
 
Mauvaise foi ou réelle inquiétude ? Il est sûrement trop tôt pour être catégorique sur la question. Les semaines à venir pourraient bien déterminer l'avenir universitaire des étudiants picards.



 
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