Coronavirus : les "unités de dépistage mobile" aux airs de baraques à frites permettent de tester 100 personnes par jour

Reportage auprès d'une unité mobile de dépistage du Covid-19 qui sillonne la région.

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Dans la cour d'un Ehpad lensois (Pas-de-Calais), des biologistes en surblouses et masques grimpent à bord de remorques à auvent, fabriquées sur le modèle de "baraques à frites". Inédites en France, ces "unités mobiles" des laboratoires Synlab permettent de dépister le Covid-19 massivement, "en allant au patient".

"Mouchez-vous bien, jetez l'essuie-tout et approchez-vous de la vitre !", énonce sur le parking un agent d'accueil protégé des pieds à la tête, tendant mouchoirs, masques et gel hydroalcoolique aux employés et résidents de l'Ehpad qui défilent devant lui. Amusée, une aide-soignante trottine vers la façade de plexiglas, dans laquelle six trous ovales permettent aux biologistes de passer leurs bras, sans jamais sortir de la cabine. Toutes les deux heures, ils se changent dans le "sas" immaculé installé à l'entrée.
 
"Mettez-vous de profil, penchez bien la tête en arrière...Vous allez voir, c'est désagréable mais ça ne fait pas mal !", rassure la biologiste Clémence Sagot, glissant une main sous la tête de l'aide-soignante et enfonçant délicatement de l'autre un écouvillon dans son nez. En quelques secondes, elle enferme le bâtonnet dans un tube, puis dans un sachet hermétique. "Vous aurez les résultats dans 24H à 48H !", lance-t-elle, alors qu'un assistant pulvérise du désinfectant sur les vitres. 
 


Avec ce système, "on se sent parfaitement protégés !", se réjouit Clémence Sagot. "On évite que les patients entrent dans un laboratoire et risquent de le contaminer, et on travaille dans des conditions optimales, en respectant nos protocoles". "Mais le principe, c'est surtout de dépister un maximum de patients en allant à eux, sans les obliger à se déplacer !", explique-t-elle.

Car si de nombreux "drive" - points fixes accueillant les patients en voiture ou à pied - ont fleuri partout, ceux-ci sont "difficilement déplaçables, peu mobilisables pour des dépistages massifs et rapides dans des clusters, gendarmeries, collectivités ou établissements de soin par exemple", renchérit Joséphine Piérard, directrice du réseau Synlab Hauts-de-France.

Envoyé par l'Agence régionale de Santé (ARS), le laboratoire doit tester en deux jours une centaine de résidents, et autant d'employés. "Nous n'avions pas de cas suspect mais voulions vérifier, et il était impossible de les emmener un par un !", commente la direction de l'Ehpad.
 


"Sauver l'usine"


Blanches, longues de près de cinq mètres, "ces unités ont été conçues à partir du modèle de base de nos baraques à frites, mais complètement transformées en collaboration avec les biologistes", explique dans son usine Hervé Diers, patron de la société Hedimag, qui produit habituellement des camions-magasins. Bars à huîtres, camions de pizza, rôtisseries, foodtrucks... "En mars-avril, notre saison forte, nous enregistrons normalement une trentaine de commandes par mois, mais avec l'épidémie nous n'en avons eu que deux !", déplore-t-il, jugeant la situation "catastrophique".

Craignant pour la survie de l'entreprise et inspiré par des images venues de Corée du sud, l'entrepreneur a donc "imaginé ce concept, envoyé un montage photoshop aux laboratoires et vite reçu une réponse". En deux semaines, trois véhicules sanitaires avaient vu le jour.  Les matériaux en stock,  notamment les panneaux blancs en polyester utilisés dans le secteur alimentaire, "correspondaient parfaitement aux normes des laboratoires".
 

Juchés sur des échelles, deux ouvriers masqués appliquent précautionneusement le logo "Synlab" sur une nouvelle cabine. "Ces commandes, c'est une bouffée d'air frais: j'ai pu lever le chômage partiel des ouvriers de l'usine", soit la moitié des 50 salariés, se félicite encore M. Diers. Ravi d'avoir reçu depuis plusieurs commandes, notamment de laboratoires marseillais ou lyonnais, il espère fabriquer à terme "une trentaine de véhicules", à raison de "trois tous les dix jours". 

"Si on fait ça, on sauvera peut-être l'entreprise", estime-t-il, passant devant les photographies de sa "friterie Momo", utilisée pour le film "bienvenue chez les Chtis" ou encore d'un "Paris-Dakar" en friterie mobile.

"On s'adapte vite, c'est vraiment motivant !", sourit Matthieu Voet, monteur dans l'atelier. "Et on se dit qu'on participe à quelque chose, qu'on lutte un peu contre l'épidémie".


 
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