Un détenu tué dans la prison de Vendin-le-Vieil : ce que l'on sait

Un détenu tué par un autre détenu à l'intérieur même d'une prison. Un fait très rare. Que s'est-il passé au centre pénitentiaire de Vendin-le-Vieil ce lundi ?

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Que s'est-il passé ?

Que s'est-il passé ce lundi, vers 14h dans une cellule de la prison de Vendin-le-Vieil ? Une enquête de la Police Judiciaire de Lille devra le déterminer précisément. Les images de vidéosurveillance (des couloirs) ont été visionnées. Le médecin légiste a fait les premières constatations. Les premiers interrogatoires des deux détenus soupçonnés d'avoir participé à ce meurtre ont débuté. Ce mardi, au lendemain des faits, on en sait déjà un peu plus.

C'est une bagarre très violente, dans sa cellule, qui est à l'origine du décès de Geoffrey Debouver, 27 ans. Ce dernier, habituellement isolé, seul, comme tous les détenus de cette prison accueillant des "gros profils", avait demandé ce lundi l'aide d'un autre détenu pour écrire un courrier. Un "auxilliaire", selon la terminologie de l'administration pénitentiaire, affecté à diverses tâches d'entretien et de service, s'est donc rendu dans sa cellule. Ce détenu a 28 ans.  Parallèlement, un autre détenu, âgé de 49 ans, Franck Siegler, a fait l'objet ce même lundi après-midi, d'une autorisation de se rendre au point-phone. Il a vu la porte de la cellule de Geoffrey Debouver ouverte. Il a décidé d'y pénétrer, dans des conditions qui restent à déterminer. Là, il aurait étranglé sa victime. "Il est entré dans la cellule et rapidement il a sauté à la gorge de la victime et l'a étranglée", a précisé Philippe Peyroux, procureur de la République de Béthune.

Un lacet de chaussure a été retrouvé près du corps. Ce qui pourrait laisser penser à une préméditation de l'acte. "Les deux détenus ne se connaissaient pas. Mais quand on sort de sa cellule avec un lacet de chaussure dans la poche, ce n'est pas pour téléphoner. L'intéressé a dit aux enquêteurs qu'il envisageait peut-être de tuer quelqu'un et qu'il est passé à l'acte parce que la porte d'une cellule était ouverte" , a expliqué le procureur de Béthune Philippe Peyroux. Une information judiciaire a été ouverte pour homicide volontaire mais elle pourrait être requalifiée en assassinat. 

Les surveillants pénitentiaires ont rapidement donné l'alerte. Les secours n'ont rien pu faire pour ranimer la victime, qui a été très violemment agressée. Une source syndicale évoque un déchaînement rapide de violence et un "crâne fracassé".

Le second détenu, celui qui aidait Geoffrey Debouver à rédiger un courrier a-t-il été complice ? Si oui, jusqu'à quel point ? Ou le meurtrier a-t-il simplement profité des circonstances ? L'enquête devra le déterminer. Selon un syndicaliste, il serait ressorti de la cellule en disant : "Voilà, ça c'est fait". Le procureur n'a pas confirmé ce détail.

Qui est la victime ?

Geoffrey Debouver, 27 ans, a été condamné en 2014, à 20 ans de prison pour le meurtre de l'étudiant lillois, Simon Cordier. Ce dernier, âgé de 20 ans, avait été porté disparu durant près de trois semaines. Il avait été retrouvé mort dans un cabanon de jardin. Les deux jeunes hommes s'étaient disputés au sujet du partage d'une récolte de cannabis. "Geoffrey Debouver tue son ami Simon Cordier pour vingt grammes de shit", titrait La Voix du Nord au moment du procès de ce meurtre aux Assises de Douai.

Les parents de Geoffrey Debouver seront reçus ce mercredi par le directeur de la prison de Vendin-Le-Vieil. 

Qui est le meurtrier présumé ?

Franck Siegler, 49 ans, est un "fou furieux", selon une source policière. Selon ses premières déclarations rapportées par le procureur de Béthune il ne conteste pas "avoir procédé à un homicide. C'est par hasard que c'est tombé sur la victime. Cela aurait pu être un autre". Il a reconnu les faits froidement, "sans aucune émotion". Son casier judiciaire comporte une vingtaine de mentions : homicides, violences avec arme, vols, contrefaçons et plusieurs tentatives d'évasion... Il a été condamné en 2010 pour assassinat en état de récidive. Il purge actuellement une peine de réclusion criminelle à perpétuité.
Selon les syndicats, il souhaitait être transféré dans un autre établissement pénitentiaire en France pour se rapprocher de sa compagne. Il se disait depuis quelques temps prêt à tout pour obtenir gain de cause, répétant qu'il "n'avait rien à perdre". La piste d'un réglement de comptes avec Geoffrey Debouver est a-priori écartée. Les deux détenus ne se connaissaient pas. La victime venait d'arriver dans ce secteur de la prison il y a 8 jours seulement.
 
Franck Siegler a déjà été reconnu coupable d'un meurtre par étranglement à la fin des années 80. "C'est un cas assez rare au niveau clinique, disait de lui Valérie Ritzenhaler, psychologue dans l'émission "Faites entrer l'accusé" en 2014. Il peut tuer simplement par pulsions sadiques. Il aime se vanter et dire qu'il est un grand tueur. Il aime faire peur aux autres."

Franck Siegler, d'origine alsacienne, a passé plus de 30 ans en prison et a fréquenté une trentaine de prisons différentes. 

Y-a-t-il eu un dysfonctionnement dans la prison ?

Comment des faits d'une telle violence ont-ils pu se dérouler dans un établissement hyper-sécurisé ? La question est centrale, capitale mais aussi délicate. Le procureur de Béthune ne s'est par exemple pas prononcé de manière très précise sur la nature exacte de la surveillance au moment de sfaits. Un surveillant pénitentiaire était-il présent ? Pourquoi un détenu a pu en rejoindre deux autres dans une cellule ? "Je n'ai pas d'éléments précis à l'heure actuelle. Nous verrons bien ce que les surveillants disent. Je ne peux pas vous en dire davantage. Je n'ai pas le droit de regard à ce niveau-là. Mais dans le cadre de l'enquête, les questions seront posées", a expliqué Philippe Peyroux.

Le centre pénitentiaire de Vendin-le-Vieil, conçu pour accueillir environ 230 prisonniers, est un établissement très récent, dont la construction s'est achevée en septembre 2014. C'est l'une des deux prisons les plus sécurisés de France avec celle de Condé-sur-Sarthe. Cette dernière a été filmée de l'intérieur fin 2016 par France 3 Normandie. Le reportage ci-dessous permet de mieux cerner la tension qui règne dans ce type d'établissement. 
Selon Julien Martin, délégué FO de la prison de Vendin-le-Vieil, "il y a un sentiment d'insécurité qui existe dans cet établissement depuis son ouverture. Ça manque complètement d'autorité. C'est à peu près la loi du plus fort. Les dirigeants pénitentiaires ne prennent pas leur responsabilités pour un imposer un cadre. Les détenus ont des rapports très limités avec les surveillants. Pour la paix sociale, la direction dit oui oui à tout. La tension est latente. Et ces dernières semaines, encore plus... C'est difficile à expliquer mais c'est ressenti par le personnel. On aurait pu l'anticiper, mais personne n'était préparé à un assassinat dans la prison."

Depuis son ouverture, le centre pénitentaire de Vendin-le-Vieil qui accueille une centaine de détenus pour environ 200 surveillants a été le théâtre de nombreux incidents. Mi-novembre, un détenu brésilien d'une quarantaine d'années avait été retrouvé pendu dans sa cellule de cet établissement sous haute sécurité. En juillet, un surveillant y avait été victime d'une prise d'otage par deux détenus. Trois heures durant, il avait été menacé par un manche de fourchette taillée, dans la cellule de l'un des prisonniers. Les deux détenus, qui réclamaient leur transfert vers un autre centre pénitentiaire, avaient fini par se rendre et avaient été interpellés par le Raid.

En septembre 2015, un détenu était également parvenu à retenir le numéro 2 de l'établissement sous la menace d'un couteau pendant trois heures. En février 2016, il a été condamné en appel à six ans de prison supplémentaires par la cour d'appel de Douai. Dimanche dernier, un détenu a également menacé des surveillants avec une lame de rasoir.

Ce soir, au lendemain du meurtre d'un détenu, le débat autour de cette prison de Vendin-le-Vieil, de sa nature, de son fonctionnement, est forcément relancé.
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