Laurent Pietraszewski, secrétaire d’Etat chargé de la réforme des retraites, et Adrien Quatennens, député du Nord et coordinateur national de La France Insoumise étaient invités de Dimanche en Politique pour débattre de la réforme contestée des régimes de pensions. Morceaux choisis.
► Sur la philosophie de cette réforme
Laurent Pietraszewski, secrétaire d’Etat chargé de la réforme des retraites, met une nouvelle fois en avant "un projet de justice sociale", "pour les retraités qui vont percevoir moins de 1400 euros de retraite". "Le texte a pour but de redistribuer aux 40% des futurs retraités les plus vulnérables", assure-t-il. "Vous ne pouvez pas passer sous silence cette dimension qui est une dimension essentielle du texte."
"On a l’habitude que des réformes que moi je juge antisociales soient bien emballées, avec un maquillage qui est somme toute alléchant", rétorque Adrien Quatennens, député (LFI) du Nord. "L’universalité dans la bouche de ce gouvernement n’est qu’un alibi. Evidemment, si Emmanuel Macron s’était présenté devant les Français et leur avait dit « comme je ne consens pas à mieux répartir la richesse produite, vous allez devoir travailler toujours plus, plus longtemps et au-delà de l’espérance de vie en bonne santé », je crois qu’il y aurait encore plus que 61% des Français qui seraient opposés à cette réforme."
► Sur les régimes spéciaux
"Il y a 42 régimes de retraite différents, la réalité, c’est qu’il y a une inégalité devant la retraite des Français, c’est en cela que nous créons l’universalité", avance Laurent Pietraszewski.
"Pour moi c’est faire le pari que la jalousie des Français entre eux serait supérieure à l’aspiration générale à de bons niveaux de pensions", répond Adrien Quatennens, qui conteste le chiffre de 42 régimes spéciaux. "Je crois que c’est un pari perdu et que les enquêtes d’opinion le montrent".
► Sur le financement du système des retraites
"L’étude d’impact est très claire", explique Laurent Pietraszewski. "Elle présente une trajectoire budgétaire qui s’exprime en pourcentage du Produit Intérieur Brut, de la richesse nationale annuelle. Nous avons rappelé que nous faisons cette transformation des retraites à enveloppe constante. Nous ne faisons pas d’économie. C’est la différence entre la transformation de société que nous portons et les réformes budgétaires, technique, qui ont pu être faites précédemment".
"Nous avons dans les 10 dernières années vu 2 millions de Français en plus devenir retraités", ajoute le secrétaire d'Etat. "Nous avons vu les pensions moyennes augmenter de 20% et tout cela en restant sous la part de 14% du Produit Intérieur Brut. Pourquoi ? Parce que cette richesse nationale, elle se développe, elle se développe plus vite que le besoin financier pour avoir de bonnes retraites."
Pour autant, "il manque 12 milliards (d'euros) et c’est l’objet de la conférence de financement que de réfléchir au retour à l’équilibre pour 2027".
"Il faut relativiser le poids du trou sur l’ensemble de ce que pèse l’ensemble des retraites", estime de son côté Adrien Quatennens. "C’est 330 milliards d’euros les retraites. Mais je ne vais pas biaiser sur le fait qu’il existe un déficit. (…) D’où provient ce déficit ? Il provient notamment du fait que les salaires des fonctionnaires soient gelé, il provient d’une baisse de recettes, il provient aussi du fait que quand Emmanuel Macron poursuit une politique inefficace d’exonérations sociales et fiscales, il creuse lui-même un trou dans la caisse."
"Même si notre système de retraite a déjà subi quelques coups de canif importants depuis quelques dizaines d’années, à mesure que la part des séniors dans la population française augmentait, on augmentait proportionnellement la part de richesse consacrée aux retraites", argue le député de La France Insoumise. "En disant (…) que 14% (du PIB) serait un plafond, c’est une annonce d’un potentiel décrochage puisqu’on peut anticiper que la part des séniors, elle, va continuer à augmenter."
"Le système actuel est accusé de toutes les tares, alors que même s’il a subi les réformes précédentes, il permet que le taux de pauvreté des séniors en France, comparativement à nos voisins européens, soit inférieur", avance enfin l'élu de la première circonscription du Nord.
► Sur l'âge de départ à la retraite
"Est-ce que le gouvernement est dans un dynamique de faire travailler plus longtemps les uns et les autres ? La réponse est non", déclare Laurent Pietraszewski. "Il est dans une dynamique qui vise à redistribuer aux plus modestes. Mais il dit aussi, puisque c’est un gouvernement responsable qu’il faut que cela soit équilibré. Moi, j’ai un engagement de responsabilité vis-à-vis des générations qui nous suivent. Et je ne veux pas leur laisser : 1/ la dette du pays ; 2/ la charge de payer les pensions des futurs retraités".
"Si l'espérance de vie progresse, naturellement l'âge d'équilibre pourra progresser", reconnait-il.
"Travailler plus longtemps aujourd’hui en France, est-ce que cela fonctionne ?", interroge Adrien Quatennens. "Vous avez un actif sur deux à l’âge d’arriver à la retraite qui n’est déjà plus en emploi. (…) Travailler plus longtemps aura comme impact d’aggraver le chômage aux deux extrémités de la vie active : d’un côté, le chômage des séniors et de l’autre le chômage des jeunes qui peinent à s’insérer dans la vie active". "Les gens partent déjà de mon point de vue trop tard et trop pauvres", ajoute-t-il.