DOCUMENTAIRE. Le temps est venu. Tour d'horizon des entreprises régionales en avance sur le "monde d'après"

Mars 2020, le Covid 19 met le monde sur "pause". La mondialisation montre ses limites : la dépendance. Pendant ce temps, en Hauts-de-France, des femmes et des hommes travaillent déjà à la relocalisation, à la distribution en circuits courts ou au recyclage 2.0. On les prenait pour des fous, ils sont aujourd'hui des "sages", des précurseurs et les consommateurs approuvent.

C'est une phrase de Philippe Vasseur qui donne son titre à l'enquête de Guillaume Desplanques : "le temps est venu". Le temps est venu de changer nos habitudes, nos façons de consommer, de se nourrir, de se déplacer ou de se chauffer. 

Le passé minier de la région, la raréfaction du pétrole et sa flambée des prix ou le gaz qui viendrait à manquer en cas de guerre nous prouvent qu'aucune ressource ne dure. Entrepreneurs aguerris ou non, bénévoles ou simples citoyens militent pour une économie plus durable, une économie qui pourrait réparer le monde.
Qui sont-ils ?

Camille et Eddy Deligne

Père et fille sont les concepteurs de "mon gobelet en lin". Respectivement ancien métallurgiste et ingénieure textile, ils ont développé dans leur garage un gobelet entièrement naturel, à base de lin. 

La France est le 1er producteur mondial de lin. Les Hauts-de-France sont la deuxième productrice française, juste derrière la Normandie. 
Une plante résistante demandant peu de soin et peu d'arrosage, elle régénère même les sols sur lesquels elle pousse. 

Plastique et Gobelets : les chiffres qui alertent 

Chaque année, uniquement en France, ce sont

• 4 milliards (4 000 000 000) de gobelets plastiques qui sont utilisés pour boire café ou eau.
• Ils génèrent 30 000 tonnes de déchets.
• 4 sur 10 sont enfouis et 6 sur 10 sont incinérés mais jamais réellement recyclés.
• 50% de ces gobelets sont utilisés uniquement durant les festivals.

(source : Planetoscope)

L'histoire du "jetable" remonte à l'invention de la lame jetable par King Camp Gillette à la toute fin du 19ème siècle. Le gobelet, quant à lui apparaît en 1907 sous le nom de Dixie cup. C'est Laurent Luellen qui l'invente après la lecture d'études sur l'hygiène prouvant que les louches dans les barils d'eau commune étaient vectrices d'épidémies.

C'est après la Seconde Guerre mondiale, sous les Trente Glorieuses et l'avènement du pétrole que le gobelet plastique apparaît, croît et se multiplie. 

Evolution de la production de plastique mondiale depuis 1950, des chiffres effrayants :

• 1950 : 1 tonne 
• 1985 : 100 millions de tonnes
• 2000 : 200 millions de tonnes
• 2020 : 400 millions de tonnes
• Prévisions 2030 : 600 millions de tonnes

Soit une production totale de 9 milliards de tonnes depuis 1950.

(Source : Jobimpact)

Pour la première fois, en ce mois de mars 2022, une étude menée par l'université libre d'Amsterdam a prouvé la présence de microparticules plastiques dans le sang humain. 

Le lin toujours avec Olivier Ducatillion

A la tête de Lemaître - Demeester et Fils, la dernière entreprise régionale de tissage de lin fondée en 1835 sur les bords de la Lys, Olivier s'émeut de devoir acheter à l'étranger du fil de lin à tisser alors que la région produit 100 000 de lin teillé par an. 
Depuis le tournage du documentaire, une filature qui avait délocalisé son activité en Pologne est en cours de ré-ouverture à Roubaix.

Une nouvelle qui devrait ravir Olivier Ducatillion et permettre à cette entreprise qui exporte dans 40 pays de se lancer dans le prêt-à-porter de luxe conçu en lin 100% français, une matière entièrement recyclable, loin de la pollution générée par la fast fashion (mode rapide) des trusts mondiaux du vêtement-que l'on-ne-met-qu'une-fois-et-qui-reste-dans-l'armoire.

"Une mode éthique est-elle possible ?" - Madjouline Sbai

Sociologue de l'environnement, auteure et vice-présidente de Fashion Green Hub, Madjouline s'interroge sur la possibilité du retour à une mode éthique, d'une "slow fashion" qui laisserait le temps aux vêtements de vieillir, de s'échanger, de se revendre.

A l'instar de la fast-food, la fast fashion utilise des matières premières de moindre qualité et une main-d'œuvre sous-payée afin de proposer des vêtements moins chers, donc vendus plus rapidement, au plus grand nombre de consommateurs. 

Ce qui ressemble à une bénédiction pour le porte-monnaie s'avère un cataclysme environnemental doublé d'un drame social.

Les chiffres qui alertent

• 130 milliards de vêtements sont consommés chaque année dans le monde
• 10kg : c'est le poids total de textile et chaussure achetés chaque année par français
• 68% de nos garde-robes n'ont pas été portées dans les 12 derniers mois
• Le lavage des vêtements en polyester, matière la plus utilisée en mode, rejettent l'équivalent de 50 milliards de bouteilles plastique d'eau chaque année dans les mers
• Le coton est la fibre naturelle qui utilise le plus de pesticide. Alors que la production ne couvre que 2.5% des terres agricoles, elle utilise 11% de la totalité des pesticides
• la production d'un jean utilise 7500l d'eau (près de 10 000 si il est délavé) soit 50 baignoires remplies
• 20% de la pollution mondiale de l'eau est causée par les teintures textiles
• Un jean peut parcourir jusqu'à 65 000km avant d'atteindre son lieu de vente
• 70% des vêtements vendus en France sont fabriqués en Asie du sud-est, nous rendant complice de salaires indécemment bas. Une ouvrière gagne 0.29€ au Bengladesh et 0.49$ au Pakistan

(Sources : Greenpeace & Oxfam)

Du gobelet à la brosse à dent en passant par les boutiques éthiques ou slow fashion, Guillaume Desplanques a croisé la route d'entrepreneurs littéralement entreprenants, engagés, motivés, à l'humeur solaire. 

Le temps est venu
Réal. G. Desplanques
Une production Cercle Bleu avec le soutien de France Télévisions. 

A voir le jeudi 31 Mars 2022 à 23h00

Replay disponible 30 jours sur france.tv