Dans un communiqué intitulé "la vocation d’un camp humanitaire est d’accueillir les réfugiés, pas de les refouler", Médecins sans frontières dénonce une sélection des migrants désormais accueillis dans le camp humanitaire de Grande-Synthe.
Un camp humanitaire interdit aux hommes seuls qui s'y présentent, alors qu'il a pour vocation à accueillir toutes les personnes vulnérables, de façon inconditionnelle, c'est ce que dénonce ce mardi Médecins sans frontières.
Dans un communiqué, l'ONG relate ainsi que le 7 juillet, six hommes afghans se sont vu refuser l’accès au camp humanitaire de La Linière, créé en mars dernier par MSF en coopération avec la ville de Grande-Synthe.
"80 % des gens qui composent ce camp sont des hommes voyageant seuls", explique Franck Esnée, chef de mission pour MSF. "En leur refusant l’accès au camp, c’est à la vocation même de ce lieu destiné à héberger dignement les exilés quels qu’ils soient que les autorités décident de s’attaquer".
Des migrants vulnérables refoulés par l'organisme mandaté par l'Etat
Et l'ONG d'enfoncer le clou, en ajoutant qu'entre le 22 juin et le 2 juillet, 34 autres migrants – dont 3 mineurs, une personne handicapée et une femme enceinte –, se sont eux aussi vus refuser dans un premier temps l’accès au camp par l'AFEJI, "en dépit de places disponibles".L'AFEJI est l'organisme qui gère le camp de La Linière depuis mai dernier, en vertu d'une convention avec la ville et l'Etat, qui a repris la main sur ce camp après avoir refusé d'en assurer une partie du financement et mis en garde sur les questions de sécurité.
Cette convention stipulait toutefois "la fermeture progressive du camp au fur et à mesure des départs des personnes migrantes". "On ne peut pas avoir un camp de 1.500 ad vitam aeternam et il n'est pas extensible à l'infini", déclarait dès le 14 mars le maire (EELV) de Grande-Synthe, Damien Carême, Les abris ont ainsi été retirés au fur et à mesure des départs.
Un camp dont la vocation à terme est de fermer
Contacté ce mardi, l'édile assure n'avoir pas dévié d'un iota de sa ligne de départ, et confirme que le camp est aujourd"hui "complet" avec quelques 800 migrants hébergés. "On n'accueille plus personne, c'était prévu comme cela. J'ai obtenu du sous-préfet de Dunkerque que l'on continue à accueillir les femmes, les enfants et les personnes les plus en difficultés, et c'est ce qui se passe", explique Damien Carême. "On m'avait dit que l'ouverture du camp humanitaire créerait un appel d'air, cela ne s'est pas produit. On continue de bien maîtriser la situation, le camp se réduit au fur et à mesure des départs, et ça continue de bien se passer avec ma population."Toute présence prolongée désormais proscrite à La Linière
MSF pointe aussi une lettre de la sous-préfecture de Dunkerque affichée dans le camp. Le camp "n'est en aucun cas destiné à être un campement dans l'attente d'un passage en Grande-Bretagne (...) illégal et rendu impossible par le renforcement des contrôles aux frontières (...). Toute présence prolongée est proscrite et pourrait se solder par une interdiction de rester sur le campement", peut-on notamment y lire.Là encore, l'ONG dénonce un principe contraire à l'esprit d'un camp humanitaire.
Utopia 56, l'association qui gérait le camp avant sa reprise en main par l'Etat, et continue d'y intervenir à titre humanitaire, s'associe à l'indignation portée par Médecins sans frontières. "Nous nous sommes retirés de l'accueil parce que nous ne cautionnons pas ce tri des réfugiés", explique Antoine Bazin, coordinateur de terrain. "Nous si on accueille, on accueille tout le monde", conclut-il.
Mercredi, ce sont 9 parlementaires européens qui ont visé le camp de Grande-Synthe pour se rendre compte de la situation sur place