La fédération socialiste affronte au tribunal le magazine qu'elle accuse de diffamation au sujet de son financement.
La fédération socialiste du Pas-de-Calais et le magazine les "Inrocks" avaient rendez-vous aujourd'hui devant les juges, à Paris. Le PS poursuit en diffamation l'hebdomadaire et deux de ses journalistes, à la suite d'un article détaillant un système de financement occulte.
"J'assure, sur l'honneur, que le financement est totalement transparent et provient
de trois sources: les cotisations des militants, des élus" et le reste "provient du niveau national", a assuré Catherine Génisson, sénatrice et première secrétaire de la fédération socialiste du Pas-de-Calais, au tribunal de grande instance de Paris. Elle a demandé aux juges de condamner les Inrockuptibles pour avoir écrit le contraire. La fédération, qui estime avoir été diffamée, réclame à l'hebdomadaire 50.000 euros de dommages et intérêts.
Selon la sénatrice, "la fédération bénéficie de ces seules sources de financement et est imperméable à toute autre source de financement". D'ailleurs, a-t-elle rappelé, "c'est à mon initiative que nous avons demandé à la première secrétaire Martine Aubry de mettre en place une commission d'enquête interne". Créée début 2012 et présidée par le sénateur Alain Richard, la commission est toujours en activité.
L'enquête litigieuse, intitulée "La bombe judiciaire qui menace le PS", a été publiée par Les "Inrocks" le 7 décembre. Les journalistes Benoît Collombat et David Servenay y faisaient état de malversations financières visant notamment le député-maire PS de Liévin Jean-Pierre Kucheida et l'ancien maire socialiste d'Hénin-Beaumont, Gérard Dalongeville.
"A l'image de l'affaire des marchés publics d'Ile-de-France", écrivaient les "Inrocks", "une partie de l'argent du chauffage urbain serait, selon l'ancien maire d'Hénin-Beaumont, détourné vers une cagnotte politique, celle du parti socialiste". Dans leur enquête, les "Inrocks" décrivaient les relations incestueuses présumées entre la fédération socialiste du Pas-de-Calais et certaines sociétés d'économie mixte comme Adevia, dirigée par Jean-Pierre Kucheida.
"Je peux vous assurer sur l'honneur qu'il n'y a aucune connexion entre ces sociétés
et la fédération socialiste du Pas-de-Calais", a affirmé Catherine Génisson, avant de rappeler que Gérard Dalongeville avait été exclu du PS en 2001.
"Il est un peu facile d'affirmer officiellement que le financement est transparent", lui a répondu le journaliste David Servenay, car "les financements parallèles ont été externalisés". Mais, a-t-il précisé, il y a "une assez nette différence entre le pouvoir formel", incarné par Mme Génisson, vue selon lui par certains comme "une potiche" placée là par commodité, "et le pouvoir réel qui s'appuie sur des modes de financement parallèles".
Gérard Dalongeville à la barre
Mis en examen en avril 2009 pour détournement de fonds publics et alors incarcéré durant huit mois, Gérard Dalongeville est venu enfoncer le clou devant les juges. Les propos publiés par les Inrocks sont "tout à fait ceux que j'ai tenus dans les courriers que j'ai adressés au juge d'instruction", a témoigné l'ancien maire d'Hénin-Beaumont, qui a détaillé dans un livre paru il y a quinze jours, "Rose Mafia", les malversations présumées de la fédération PS du Pas-de-Calais. "Sur un certain nombre de marchés, des consignes étaient données", a-t-il affirmé.
Selon lui, "pas un responsable politique ne pouvait ignorer cela". Une commission d'enquête interne est une bonne chose mais "on ne trouvera que ce qu'on veut chercher", a-t-il averti. Ils doivent "regarder d'où viennent les financements par chèque".
A l'issue de l'audience, le tribunal devait mettre son jugement en délibéré à
quelques semaines.
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