A l'ombre de Calais, des centaines de migrants vivent discrètement dans de mini-camps

Steenvoorde, Norrent-Fontes, Angres, Tatinghem, Setques, Chocques... Dans le nord de la France, à l'écart des camps de Calais et Grande-Synthe, des centaines de migrants vivent discrètement dans de micros-campements qui se peuplent doucement à chaque rétrécissement de la "Lande" de Calais.

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Le long de l'A25 Lille-Dunkerque, à Steenvoorde (Nord), commune de 4 000 habitants, une centaine de Soudanais et d'Erythréens vivent depuis 2008 sous des tentes, au milieu d'un champ boueux, à côté de quelques vaches. Comme la plupart des autres camps de la région, il se situe à proximité d'une aire de repos où des camions stationnent : la nuit tombée, les migrants tentent de grimper dans les poids-lourds pour rejoindre l'Angleterre. 

En marge de Calais, "il y a moins de surveillance, les migrants peuvent plus facilement monter dans des camions sans être repérés. En se dispersant, ils multiplient leurs chances de rejoindre l'Angleterre", explique Michel Janssens, de MSF. Toutefois, même en embarquant en amont de Calais, traverser la frontière "devient de plus en plus difficile. A Stenvoorde, ce n'est même pas un passage par semaine, contre une dizaine il y a encore quelques mois. Cela entraîne une accumulation de personnes dans les petits camps", affirme le président de l'association Terre d'Errance, Damien Defrance, qui indique qu'à Steenvoorde la population a doublé en deux ans.

Selon lui, certains migrants s'éloignent aussi de Calais pour "fuir la violence", même si ces "jungles" n'échappent pas à la pression des passeurs : à Norrent-Fontes par exemple, commune du Pas-de-Calais bordée par l'A26 Reims-Calais, les nouveaux arrivés doivent s'acquitter d'un droit d'entrée pour s'installer dans ce camp où vivent 250 migrants, explique Nan Suel, de Terre d'Errance, bénévole sur ce campement.

Par ailleurs, ces bidonvilles existent "depuis une vingtaine d'années, mais se sont développés avec la fermeture de Sangatte en 2002", selon M. Defrance. Désormais "dès qu'une expulsion est annoncée à Calais, on constate une augmentation de migrants, on l'a vu avec l'évacuation de la bande des 100 mètres et le démantèlement de la partie sud de la +Jungle+ de Calais", rapporte Nan Suel qui affirme que 50 migrants sont arrivés à Norrent-Fontes après l'annonce du dernier démantèlement. 

"Des camps de Dieppe à Zeebruges"

L'éparpillement des migrants est un phénomène craint par les associations : "Les micro-bidonvilles autour de Calais ont été regroupés dans la +Jungle+ pour un meilleur encadrement des migrants avec notamment un accès aux soins. Sur les mini-sites, il y a des aides ponctuelles, mais pas de véritable organisation", déplore Raphaël Etcheberry, de MSF.

A l'annonce du démantèlement de la partie sud de la "Jungle", les associatifs avaient alarmé les autorités sur ce risque. Mais pour l'heure, ni la préfecture, ni les associations ne relatent un tel phénomène. Il existe, mais on ne peut pas parler "d'explosion" des mini-camps, "en fait, sur les 3500 personnes que les associations avaient recensées dans la zone sud à Calais, nous estimons qu'environ 300 sont parties dans d'autres camps, la plupart sont allées dans la partie nord du campement", affirme Christian Salomé, de l'Auberge des migrants.

"Personne n'a intérêt à en parler"

Toutefois, la multiplication des camps, "personne n'a intérêt à en parler", admet François Guennoc de l'Auberge des migrants. "Ni le gouvernement, ce serait avouer que la démolition de la partie sud n'a pas eu l'effet escompté et que les propositions de l'Etat ne conviennent pas. Et du côté des associations, on ne veut pas faire de la publicité pour ces camps car la police pourrait les déloger", concède-t-il.

Mais, "ce qui est sûr, c'est le constat d'un phénomène nouveau: le départ des migrants pour la Normandie et la Belgique. Des camps de migrants, il y en a maintenant de Dieppe à Zeebruges", ajoute-t-il. En outre, ces camps ne sont pas à l'abri d'un démantèlement: en novembre dernier, le mairie de Téteghem (Nord) a exigé l'évacuation - effective depuis - de 250 migrants installés sur sa commune, et en mars la justice a ordonné à une quinzaine de migrants installés sur un terrain appartenant à la SNCF à Chocques (Pas-de-Calais) de quitter les lieux avant la fin du mois d'avril.
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