Les présidents des conseils départementaux picards étaient tous pour un retour à 90 km/h, mais maintenant qu'un assouplissement a été voté, ils ne semblent pas pressés d'agir.
Jeudi 6 juin, l'Assemblée nationale a voté l'article du projet de loi mobilités assouplissant la limitation de vitesse à 80 km/h. En moins d'un an, la fameuse réforme a permis d'éviter 127 morts selon le gouvernement, mais a participé au soulèvement des gilets jaunes et a toujours été contestée par les 3 présidents des conseils départementaux de Picardie.
Désormais, les maires et les présidents de conseils départementaux pourront déroger à la règle - donc revenir à 90 km/h - sur les routes secondaires dont ils ont la responsabilité (donc pas les Nationales) et "après avis de la commission départementale de la sécurité routière, sur la base d'une étude d'accidentalité portant sur les sections de routes concernées", précise un amendement des députés LREM.
Ce vote est définitif, car le gouvernement a engagé la "procédure accélérée" : le texte n'aura pas à repasser devant le Sénat. Les élus sont donc certains désormais qu'ils pourront, lorsque la loi sera promulguée, user de ce nouveau pouvoir. Mais bizarrement, pour eux, il semble urgent d'attrendre.
Dans la Somme : "On attend les modalités"
Le conseil départemental de la Somme assure n'avoir encore rien décidé et attendre "le décret d'application". La majorité Les Républicains sera consultée par le président (LR) Laurent Somon, mais pour le moment ce dernier "attend" de connaître toutes "les modalités".
Principale interrogation : quelle sera "la responsabilité" du Département "s'il y a un accident par exemple", sur une route qu'il aura repassée à 90 km/h ?
Si la plupart des conseils départementaux (et des Français, selon les sondages) est contre les 80 km/h, beaucoup auraient préféré ne pas prendre de responsabilité en la matière et laisser l'Etat se renier, plutôt que de leur refiler ainsi la patate chaude.
Dans l'Aisne : pas de réponse
Contacté également, le conseil départemental de l'Aisne n'a pour le moment trouvé personne pour nous répondre.
Il y a trois semaines, le président (UDI) Nicolas Fricoteaux s'inquiétait seulement de la multiplication potentielle des limites de vitesse : "Faut pas non plus qu'on ait un tas de panneaux, qu’à un moment on ait 110, 90, 80, 70 (…). Il faut de la lisibilité pour l’usager."
L'Oise : pas au courant
Le 20 mai, son homologue de l'Oise, Nadège Lefebvre (LR), avait publié un communiqué suite aux propos du premier ministre Edouard Philippe, qui annoncaient grosso modo ce que les députés ont entériné hier. Elle faisait la même analyse : "je souhaite par avance bien du courage à l'automobiliste qui devra traverser plusieurs départements, avec des politiques différentes, à trois vitesses".
"(Ma position) est d’une grande clarté", poursuivait la présidente. "Je demande le retour au 90km/h, comme c’était déjà le cas auparavant, avec des portions à 70km/h laissées à la libre appréciation des Conseils départementaux qui connaissent mieux que quiconque leur réseau routier départemental."
Son appel n'a pas été entendu. Les 80 km/h restent la règle. Mais fera-t-elle le choix d'y revenir sur certaines portions, comme la loi va l'autoriser, puisque les conseils départementaux "connaissent mieux que quiconque leur réseau routier" ?
Manifestement pas au courant de la procédure accélérée qui rend le vote des députés définitif, le conseil départemental dit attendre "la navette parlementaire" pour communiquer.