Alors que le déconfinement reste très limité et progressif, des foules se sont rassemblées pour des rassemblements illégaux dans la région et la tension semble monter dans certains quartiers. Exemples à Amiens et Compiègne.
Des tirs de mortier d'artifice. Partout en France, les policiers commencent à connaître. Dans la nuit de mardi à mercredi, ceux d'Amiens en ont été les cibles. Selon une source policière, il s'agirait de l'oeuvre d'une dizaine de jeunes, qui sont allés à l'affrontement à plusieurs reprises, principalement dans la zone de sécurité prioritaire d'Amiens Nord.
"Il n'y a pas eu de blessés, mais les policiers ont dû riposter avec leurs propres moyens pour se dégager", raconte cette source.
Le déconfinement complet total tarderait-il trop ? L'interdiction du sport collectif, la fermeture des collèges et lycées, des parcs et jardins, serait-elles en train de faire exploser une frustration ? "Il y a simplement des personnes qui ont de la civilité et d'autres qui n'en ont pas", nous répond-on.
150 personnes pour un match de foot, un organisateur présumé auditionné
Sans que le lien ne soit formellement établi, ces échauffourées font écho à un autre événement, ce weekend, dans le sud-est d'Amiens. "150 personnes", selon le procureur de la République, se sont rassemblées samedi au Stade Soufflot, un terrain synthétique normalement fermé, pour y disputer ou observer un match de football, en violation des règles sanitaires en vigueur.
"Il y a toujours quelques jeunes qui viennent jouer là, déjà pendant le confinement", confient des Amiénois. Mais cette fois, le regroupement semble inédit par son ampleur. Et il s'agissait d'un événement bien organisé, avec une sono, des maillots, des drapeaux...
Le lendemain, dimanche, quelques dizaines de jeunes sont revenus pour une rencontre similaire, cette fois stoppée à temps, dans le calme, par la police.
En attendant l'éventuelle réautorisation des sports collectifs, Amiens Métropole a décidé de désinstaller les cages de buts de tous les stades de la ville, en commencant par Soufflot. La police nationale aurait également ajusté ses rondes pour surveiller les enceintes et éviter de nouveaux rassemblements similaires.
Une enquête pour mise en danger de la vie d'autrui a été ouverte. Un homme "suspecté d'être l'un des organisateurs" a été auditionné ce mercredi, mais "une autre audition demeure nécessaire", déclare le Procureur de la République, sans donner d'indices sur l'identité des suspects.
Des trois responsables de clubs amiénois de foot amateur que nous avons contactés, aucun n'a d'idée sur la question, si ce n'est, selon l'un d'eux, qu'il s'agit de "malades", vu le risque épidémique qui court toujours.
A Compiègne, 80 personnes pour un enterrement...
Les règles sanitaires s'appliquent aussi en matière de deuil. Les obsèques ne peuvent toujours pas rassembler plus de 20 personnes. Cette règle a pourtant été violée elle aussi, cette fois à Compiègne, et à deux reprises en une semaine.
Le samedi 9 mai, la procureure de la République confirme qu'une trentaine de personnes, "réparties en petits groupes et porteurs de gants et masques", ont été rejointes par cinquante autres à l'entrée du cimetière. Elles venaient célébrer les obsèques d'un membre de la communauté des gens du voyage. Les forces de l'ordre l'ont toléré, bien que la limite légale soit dépassée de 300%.
"Les fonctionnaires du commissariat de police de Compiègne ont noté que le climat était serein et propice au recueillement, que la distanciation sociale était respectée dans les allées du cimetière et autour de la tombe, et qu'il n'y avait pas d'effusion entre les membres de la famille et les autres proches, explique la Procureure. Eu égard au contexte, à la durée très limitée du rassemblement, et au respect des règles de distanciation durant ledit rassemblement, il n'a pas été procédé à des verbalisations, ni à l'ouverture de procédure judiciaire."
...et 650 pour un autre
Moins d'une semaine plus tard, le vendredi 15 mai, ce sont "près de 650 personnes" qui se rassemblaient devant le cimetière nord, pour l'enterrement d'un homme emporté par une crise cardiaque sur le stade du Clos-des-Roses, quartier sensible de la ville. "Là encore, compte tenu de ce que l'ordre public a été maintenu sans heurt avec les personnes présentes, hormis des embarras de circulation, aucune verbalisation n'a été dressée, ni aucune procédure ouverte", assume la Procureure.
La préfecture de l'Oise précise de son côté que le rassemblement n'a "évidemment pas été autorisé" mais "spontané, décidé dans des délais très courts via les réseaux sociaux", et rappelle que "ce type d'événement peut être organisé bien en amont, en liaison avec le maire de la commune concernée".
Le temps dira si ces divers écarts aux règles sanitaires ont eu des conséquences. L'Agence régionale de santé n'organisera pas de tests de dépistage massifs, mais elle affirme qu’elle sera "particulièrement attentive" quant à l’émergence éventuelle de foyers épidémiques à Amiens et Compiègne.