Après Orléans et Versailles, le syndicat d’assainissement du denaisis va réaliser des prélèvements d’eaux usées pour détecter la présence de Covid et prévenir en amont d’un regain de l’épidémie à l’échelle d’une ville ou même d’un quartier. On vous explique.
Près de 40 000 personnes concernées, réparties entre les six communes composant le syndicat d’assainissement du Denaisis (Wavrechain-soous-Denain, Lourches, Hélesmes, Haulchin, Escaudain et Denain). À partir de lundi 11 janvier, et pour une première phase de six mois, les eaux usées de Denain et ses alentours vont être analysées pour détecter la présence de Covid.
C’est Suez, l’exploitant du réseau d’assainissement du Denaisis, qui a proposé une solution clé en mains au syndicat pour mettre cette technique en place. On vous explique.
Mais pourquoi les eaux usées ?
Retrouver la présence de Covid dans les eaux usées, une idée saugrenue ? "Absolument pas" affirme Renaud Camus, directeur de Suez dans le département du Nord. Les prélèvements dans les eaux usées permettent de "détecter les marqueurs du virus avant même l’apparition de symptômes chez les habitants" explique Suez. Révolutionnaire, n’est-ce pas ?
Des expérimentations ont été menées dans une quinzaine de stations d’épuration en France depuis mars dernier, afin de s’assurer du lien de corrélation entre concentration du Covid dans les effluents et nombre de cas détectés dans les jours suivants. "Je vous confirme qu’on a vu très nettement la corrélation parfaite entre la concentration en ARN de Covid dans les effluents et le nombre de cas détectés sur un territoire, avec 5 à 10 jours d’avance sur l’apparition des symptômes", résume Renaud Camus.
"Je vous confirme qu’on a vu très nettement la corrélation parfaite entre la concentration en ARN de Covid dans les effluents et le nombre de cas détectés sur un territoire, avec 5 à 10 jours d’avance sur l’apparition des symptômes."
C’est précisément cet argument qui a séduit la maire de Denain et présidente du syndicat d’assainissement du denaisis, Anne-Lise Dufour-Tonini. "Il y a quelques mois, j’avais entendu des scientifiques qui faisaient un parallèle entre la détection d’ARN qui signe l’augmentation de la circulation de la Covid dans les eaux usées et que cette augmentation d’ARN précédait de 7 à 10 jours le pic de gens hospitalisés pour des Covid graves."
Comment ça va se passer ?
Très concrètement, le procédé consiste à mesurer la concentration en ARN de Covid dans les effluents, car "quand on est contaminé, le Covid est présent dans les selles, explique le directeur de Suez dans le Nord. Et normalement, tout le monde va aux toilettes une fois par jour."
Dans le denaisis, quatre points de prélèvement journaliers vont être déployés : un à l’entrée de la station d’épuration de Wavrechain-sous-Denain et trois autres sur des bassins versants "pour avoir des échantillons qui correspondent à l’ensemble de la population" explique Anne-Lise Dufour-Tonini.
"On ne peut pas dire si au 15 de la rue Danton, tel habitant est malade. Mais on peut dire quartier par quartier si la situation bouge, si le nombre de contaminations va évoluer."
Chaque jour, des agents de Suez vont effectuer des dizaines de micro-prélèvements à intervalle régulier pour avoir un échantillon représentatif toutes les 24 heures. Ces échantillons vont ensuite être analysés et permettront ainsi d’anticiper l’apparition de foyers de contamination à l’échelle ultra-locale.
Car au-delà des quatre points de prélèvements installés, Suez peut adapter son offre très rapidement aux vues des résultats. "Le point qu’on mesure le plus, c’est le point le plus aval à l’entrée de la station car il est le plus représentatif, simplifie Renaud Camus. Mais on peut mailler en amont dans les réseaux d’assainissement et rajouter des points de prélèvements, quartier par quartier ou à la sortie d’un ehpad par exemple."
"L’idée ce n’est pas de soigner, mais de prévenir"
Objectif : prévenir les collectivités locales le plus rapidement possible d’un rebond de l’épidémie en prenant de cours de 5 à 10 jours l’apparition des symptômes.
"On délivre une information précieuse aux collectivités de manière très globale et sur mesure en allant zoomer à l’échelle d’une ville, d’un quartier."
Au-delà d’un renforcement des restrictions sanitaires si besoin, ces données seront communiquées à l’hôpital de Denain, afin de prévenir une augmentation soudaine des hospitalisations. "L’idée, ce n’est pas de soigner mais de prévenir, notamment l’hôpital, pour leur dire : on a un pic, vous allez surement avoir une augmentation des hospitalisations dans les prochains jours", raconte la maire de Denain. Ce qui ravie la direction de l’hôpital, car 5 jours d’avance permettent de s’organiser, d’anticiper, d’armer des lits ou encore de renforcer le personnel.
Coût de l’opération pour la première phase de six mois : 90 000 euros. "Un coût certes, avance la maire de Denain, mais la santé avant tout."