Déserts médicaux : les disparités entre les départements se creusent dans les Hauts-de-France

Les départements urbains, dotés d'un CHU, réussissent à conserver des médecins alors que dans les campagnes, les effectifs vieillissent et diminuent. La profession évolue aussi, avec le développement du salariat, la féminisation et une baisse générale du nombre de généralistes. Portrait de la profession dans les Hauts-de-France.

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Avec 18 330 médecins en activité en 2024, la région des Hauts-de-France rassemble 7,7 % des médecins de France, pour 9,2 % de la population française. Mais de très fortes disparités existent entre ses départements et elles ont tendance à s'accentuer ces quinze dernières années.

C'est ce que révèle l'Atlas de la démographie médicale publié le 2 octobre par le Conseil national de l'Ordre des médecins. La profession change également de visage, avec une augmentation du salariat et de la proportion de spécialistes par rapport aux généralistes, ainsi qu'une forte féminisation des jeunes générations de médecins.

Le Nord, la Somme et le Pas-de-Calais attirent, l'Aisne et l'Oise se désertifient

Pour comprendre la dynamique médicale de chaque département depuis quinze ans, l'atlas compare l'évolution générale de la population entre 2010 et 2024 et celle du nombre de médecins. De façon surprenante, ce n'est pas là où la population augmente le plus que le plus grand nombre de praticiens s'installe.

Dans la Somme, par exemple, le nombre d'habitants a baissé de 0,5 % sur la période étudiée, alors que le nombre de médecins a augmenté de 15,4 %. La même tendance s'observe dans le Nord, où la population n'a progressé que de 0,2 % alors que le département compte 11,8 % de médecins en plus qu'en 2010. Dans le Pas-de-Calais, le mouvement est similaire, mais moins marqué : la population a chuté de 0,7 % et il y a 3,4 % de médecins en plus.

Le phénomène inverse est à l'œuvre dans l'Aisne et dans l'Oise. Alors que la démographie de ce dernier département est la plus dynamique des Hauts-de-France, avec 1,3 % d'Isariens supplémentaires en quinze ans, le nombre de médecins a diminué de 3,8 %. Dans l'Aisne, si la population baisse de 1,9 % sur la période, le nombre de médecins s'effondre : -7,4 % en un an.

Une désertification qui risque de s'accentuer dans les prochaines années, en raison du vieillissement des médecins en activité : au niveau national, le nombre de médecins en activité qui ont atteint l'âge de la retraite a quasiment quadruplé. Près de 40 % des praticiens de l'Aisne ont plus de 60 ans, seuls 18 % ont moins de 40 ans. Ces proportions sont semblables dans l'Oise, alors que les autres départements affichent une répartition des âges plus équilibrée. Dans le Nord et la Somme, plus d'un tiers des médecins ont moins de 40 ans et seulement un quart ont plus de 60 ans.

Ces écarts qui se creusent s'expliquent par l'attractivité des territoires et notamment, d'après l'Ordre des médecins, par la présence d'un CHU dans le département. Les médecins seraient ainsi plus susceptibles de s'installer à proximité de leur lieu d'études, surtout s'il s'agit d'un département urbanisé (ce qui peut expliquer la bonne performance du Pas-de-Calais, malgré l'absence de CHU). La solitude du médecin de campagne continue à effrayer.

Une profession qui change de visage

L'effectif des médecins se féminise, une tendance particulièrement nette dans les plus jeunes générations : les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes parmi les médecins de moins de 35 ans. La part de femmes médecins dans chaque département suit donc généralement la démographie de ceux-ci.

Ainsi, près de la moitié des médecins sont des femmes dans le Nord et dans la Somme (respectivement 47,7 % et 47 % des effectifs), le taux de féminisation atteint 41,6 % dans le Pas-de-Calais. Malgré ses effectifs vieillissants, l'Oise a l'originalité de compter 45,4 % de femmes médecins. Dans l'Aisne, en revanche, seulement 34,8 % des médecins sont des femmes.

Autre tendance lourde dans la profession, l'arrivée de médecins diplômés à l'étranger, qui viennent renforcer les rangs d'un métier en manque d'effectifs. Leur nombre a doublé au niveau national en quinze ans. Dans la région, c'est dans l'Aisne où leur proportion a le plus augmenté : elle a été multipliée par deux entre 2010 et 2024, ils sont maintenant 436 sur un total de 1157 médecins, ce qui représente plus d'un tiers des praticiens du territoire.

Le Pas-de-Calais et l'Oise ont également attiré environ 200 médecins diplômés à l'étranger, ce qui représente respectivement 67,2 % et 75,4 % d'augmentation de leurs effectifs. Le Nord et la Somme voient le nombre de médecins diplômés à l'étranger augmenter, pour seulement 8 % dans la Somme.

Les modes d'exercice de la profession évoluent aussi, avec une part accrue de la proportion de médecins salariés, particulièrement chez les spécialistes. Ces derniers représentent d'ailleurs une part croissante des médecins en activité, leur nombre a augmenté de 21 %, au détriment du nombre de médecins généralistes, qui est en recul en 2 %.

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