Aurélie Langelin, mère de 33 ans, est morte sous les coups de son conjoint à Auby près de Douai, dans la nuit du 30 au 31 mai 2021. Huit mois plus tard, Marie-Josée Zerrouk, sa maman, a accepté de rencontrer les journalistes de France Télévisions Nathalie Perez et Alexandre Remond. Une mère inconsolable qui livre un témoignage bouleversant.
"Je ne l’ai pas vue, je n’ai pas pu lui dire au revoir. Ils n’ont pas voulu que je la vois tellement elle était abimée". Ces mots sont ceux de Marie-Josée Zerrouk. Sa fille, Aurélie Langelin, a été tuée dans la nuit du 30 au 31 mai 2021 à Douai. Son conjoint, principal suspect, a été mis en examen d’homicide volontaire par conjoint et placé en détention provisoire.
Ce lundi 31 mai 2021, Marie-Josée Zerrouk était à la CAF lorsqu’elle a reçu un coup de téléphone de la police. "Ils m’ont dit : « c’est la police de Douai, vous êtes où madame ? » Je leur ai demandé ce qu’il se passait". Elle se souvient alors avoir eu un "déclic". "J’ai lâché mes papiers et j’ai dit : « il s’est passé quelque chose avec ma fille ? » Réponse de la police. « Oui, il faut revenir tout de suite madame ». Quand je suis arrivée, ils m’ont dit qu’elle était décédée. Qu’elle avait été frappée par son compagnon et qu’elle était décédée".
"Il m’avait dit : je vais tous vous tuer"
Cette mère de famille connaissait les problèmes d’alcool et de drogue du compagnon de sa fille. Il avait été violent à plusieurs reprises avec Aurélie, et menaçant avec elle. "Il m’avait appelé une fois la nuit, il était saoul et drogué, et il m’avait dit : « de toute façon je vais vous tuer tous, toi et ton fils, la petite (la fille d’Aurélie, ndlr) et elle. C’est des coups de tournevis que je vais lui donner dans son dos, tu vas voir".
Au moins deux plaintes à son encontre ont été déposées. "Il avait été condamné il y a deux ans après avoir donné un coup de couteau à ma fille au niveau du nez, se rappelle Marie-Josée Zerrouk. Elle avait porté plainte et ils étaient venus le chercher. Il sortait alors de prison". Pour ces faits, il a écopé de deux ans de prison. "Mais 9 mois plus tard, comme il se tenait bien, ils l’ont fait sortir avec bracelet électronique, mais il ne faisait pas son suivi".
Y a-t-il eu manquement de la part des policiers ?
Dans les semaines qui ont précédé le drame, la maman d’Aurélie raconte avoir envoyée sa fille suivre une cure dans la Somme pour soigner ses problèmes d’alcool. "Lorsqu’elle est rentrée, elle était bien remise (…). Elle ne voulait plus le voir".
Pourtant, quelques heures avant le drame, Aurélie s’est rendue au domicile de Karim B.A., situé au dixième étage d’une tour de la cité Gayant, après que celui-ci l’ait suppliée de venir. Une violente dispute éclate et les coups pleuvent. Alertés par les bruits, plusieurs voisins appellent la police. Vers 18h30, cinq fonctionnaires de la BAC se présentent au domicile, avant de repartir sans interpeller le compagnon d’Aurélie. La jeune femme est décédée quelques heures plus tard. "Une voisine m’a raconté qu’à deux heures de l’après-midi, elle a vu ma fille qui attendait l’ascenseur avec des lunettes de soleil. Lorsqu’elle lui a demandé pourquoi elle avait ces lunettes, Aurélie les a enlevées. La dame m’a dit qu’elle avait deux coquards à ses yeux. La police, quand elle est venue, elle l’a vu ça. S'ils sont rentrés dans l’appartement, ils ont dû voir ça". Huit mois après le drame, Marie-Josée Zerrouk ne peut retenir ses larmes. Et les questions restent nombreuses : pourquoi les policiers ne sont pas intervenus ? Pourquoi sont-ils partis sans aider Aurélie ?
Signalons avoir vu cette dame dans l'appartement, ivre, présentant une trace bleue sous l'œil gauche, elle ne nous signale aucune violence. La discussion dans le couple est calme et sereine.
Extrait de la main courante déposée par les policiers
Les policiers ont rédigé une main courante à leur retour, selon un document que s’est procuré France 3. "Signalons avoir vu cette dame dans l'appartement, ivre, présentant une trace bleue sous l'œil gauche, elle ne nous signale aucune violence. La discussion dans le couple est calme et sereine".
"Ça peut plus continuer"
Accompagnée de son avocat maître Damien Legrand, elle a envoyé un courrier à Gérald Darmanin pour faire toute la lumière sur les possibles manquements des policiers ce soir-là. "Pour moi, la police a fait une faute. Il y a eu des failles". En début de semaine, le ministre de l’Intérieur a annoncé avoir saisi l’IGPN. "S’il y a eu des manquements de la police nationale, il y aura des sanctions", a-t-il assuré.
Faut éviter tout ça, ça peut plus continuer. On est à combien de féminicides depuis ? Elle était la cinquantième au mois de mai… On a passé 100, 120 !
Marie-Josée Zerrouk, mère d'Aurélie Langelin
Une "satisfaction" pour la mère d’Aurélie, qui rappelle toutefois que rien ne lui ramènera sa fille. "Faut éviter tout ça, ça peut plus continuer. On est à combien de féminicides depuis ? Elle était la cinquantième au mois de mai… On a passé 100, 120 ! On ne peut plus continuer à avoir ça, on les brule… non mais c’est quoi ça ? On ne peut plus voir ça !"