Le meurtre du jeune Philippe Coopman prend de nouvelles proportions à Grande-Synthe. Noha, le cousin d'un des auteurs présumés de l'agression de Philippe a été passé à tabac dans la nuit du 19 au 20 avril 2024. Les motivations de cette attaque ne sont pas encore connues mais la mère de Noha dénonce des représailles et fait part des menaces de mort que reçoit sa famille.
Il y a une semaine, dans la nuit du 14 au 15 avril 2024, Philippe Coopman, un habitant de Grande-Synthe âgé de 22 ans, se faisait rouer de coups et était laissé pour mort par trois jeunes, dont au moins deux mineurs. Philippe a malheureusement succombé à ses blessures, provoquant un vif émoi dans cette commune pourtant tranquille du littoral des Hauts-de-France. Ses obsèques auront lieu mercredi.
C'est dans ce cadre tragique qu'une nouvelle agression s'est déroulée à Grande-Synthe, entre le 19 et le 20 avril. Cette fois-ci, Noha, adolescent de 15 ans identifié comme le cousin d'un des agresseurs présumés de Philippe, a été passé à tabac et laissé nu sur la chaussée. Un guet-apens tendu par un de ses amis.
Samantha, mère du jeune homme, explique que sa famille est victime d'intimidations et de menaces, notamment sur les réseaux sociaux, depuis plusieurs jours. Pour elle, cette agression est une vendetta commise par des personnes voulant faire justice eux-mêmes, pour Philippe.
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Votre fils, cousin de l'un des agresseurs présumés de Philippe, a été passé à tabac dans la nuit du 19 au 20 avril. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Samantha : Noha a été agressé, il est tombé dans un guet-apens. C'est son propre copain qui lui a envoyé un message pour sortir un soir. Ça devait durer 30 minutes, il est venu le chercher en voiture, il l'a pris juste en bas de chez moi. Son ami a démarré en roulant tranquillement mais arrivés au niveau de la Porte du soleil il a accéléré d'un coup. Mon fils m'a dit qu'il pensait mourir, qu'il voulait sauter de la voiture mais pareil, il serait mort.
Il l'a ramené au niveau d'Emmaüs, où il n'y a pas beaucoup de passage. Six personnes cagoulées l'attendaient, elles l'ont tabassé, mis à nu, pris son téléphone portable et pendant un bon 40 minutes il est resté au sol. Heureusement que des passants l'ont rhabillé et l'ont ramené chez moi.
Six personnes cagoulées l'attendaient, elles l'ont tabassé, mis à nu, pris son téléphone portable et pendant un bon 40 minutes il est resté au sol.
Samantha, mère de Noha
Depuis que le visage et le nom de votre neveu ont été relayés sur les réseaux sociaux, avez-vous été menacés ?
S. : Je vis un enfer, à peine je sors de chez moi c'est des insultes à tout va. C'est plus possible. Là par exemple on m'a dit : "Je vais te tuer grosse pute", on menace mes enfants... J'ai dû bloquer mes réseaux sociaux parce que j'en avais marre de lire tout ça. Je vis dans la peur. Partir ça les ferait gagner, si je pars ce sera pour ma famille, pas pour les gens. Pour les mettre en sécurité. D'ailleurs je pense que ce ne sont même pas des gens qui connaissent l'histoire qui font ça, mais des gens qui veulent faire justice eux-mêmes et qui veulent faire du buzz sur les réseaux sociaux.
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Pourquoi s'en être pris à votre fils qui, apparemment, n'a rien à voir avec ce terrible meurtre ?
S. : Je pense qu'on s'en est pris à lui parce qu'il porte le même nom de famille que mon neveu qui était hébergé à mon domicile. Ils n'ont pas pu l'attraper vu qu'il a été directement incarcéré, donc c'est mon fils qui a tout pris. Parce que parmi les insultes certains disent "on n'a pas eu ton cousin mais toi on t'a eu". Mais lui, il n'a rien à voir dans tout ça. Noah c'est quelqu'un d'adorable, sans problème avec les gens, tout le monde l'aime bien, il a une petite fille de 8 mois, il va à l'école, il adore la cuisine... C'est un gamin pas connu des services de police, c'est de l'acharnement. Son nom de famille a été cité sur les réseaux sociaux du coup ça a pris de l'ampleur.
Je pense que ce ne sont même pas des gens qui connaissent l'histoire qui font ça, mais des gens qui veulent faire justice eux-mêmes et qui veulent faire du buzz sur les réseaux sociaux.
Samantha
Et comment se porte Noah ?
S. : Il me dit qu'il a mal, mais ce ne sont même pas les coups. C'est surtout qu'il ne pourra pas voir sa fille pendant deux bons mois parce que, vu comment il est, il ne veut pas qu'elle le voit comme ça. Quand je l'ai retrouvé je n'ai pas reconnu son visage et il ne fait que gonfler. Il a été opéré hier (vendredi 19 avril, ndlr) et je ne l'ai pas encore vu depuis. Mais il ne pourra pas parler ni se nourrir normalement pour l'instant. Il doit manger avec une paille, avec des compléments alimentaires.
Concernant votre neveu, quand avez-vous découvert ses agissements ?
S. : Ce jour-là, il est rentré chez moi vers 2h50. Il était sorti mais il devait juste aller chercher un paquet de cigarettes à côté, vers 11 heures. Je lui ai dit de rentrer avant minuit, c'est le couvre-feu que je demande aux grands, et c'est déjà pas mal. Je vois qu'à 1 heure, 2 heures, 2h30 il n’est toujours pas là. Il finit par rentrer, l'air normal, en me disant qu'il était avec un copain. Je lui dis "j'espère que t'as pas fait de bêtises" et il me jure le contraire.
Il finit par rentrer, l'air normal, en me disant qu'il était avec un copain. Je lui dis "j'espère que t'as pas fait de bêtises" et il me jure le contraire.
Samantha
Le lendemain matin je vais au travail et j'ai une vague d'appels qui me disent que mon neveu tourne sur les réseaux sociaux, sa tête est partout, il est recherché. Je quitte mon travail, je le réveille en lui demandant des comptes. Il continue de nier jusqu'à ce qu'on vienne péter ma porte à 6 heures du matin pour l'emmener.
Le meurtre, l'arrestation, les menaces... Dans ce contexte, qu'est-ce que vous aimeriez dire à votre neveu ?
S. : Que je lui en veux. Je ne pardonnerai jamais ce qu'il a fait. J'ai voulu l'aider, le sortir des foyers, mais il a mis ma famille en danger. Il m'aurait tout avoué, je l'aurais moi-même emmené à la police. Mes enfants ne dorment plus, dès qu'ils entendent un bruit ils se cachent dans la salle de bains... Ils sont traumatisés.
Avec Kévin Héliès pour franceinfo