Le 17 octobre 1918, la IIème armée britannique du général Birdwood entre dans Lille évacuée depuis fin septembre par les Allemands. La musique militaire anglaise descend la rue Nationale où une foule en liesse de 10 000 personnes chante la Marseillaise et accueille les Tommies avec des baisers, des gaufres et du café. Une libération vécue comme une délivrance après les années terribles d'occupation.
Les Lillois sortent de 210 longues semaines sous la loi martiale allemande. La ville, coupée du reste du pays a tout subi : famine, pillage, réquisition, déportation. Le quotidien n'a été qu'un cortège de souffrances. La capitale des Flandres qui comptait 217 000 habitants en 1914 n'en compte plus que 112 000 à la fin du conflit. Fin septembre 1918, les Allemands évacuent Lille. Dans leur retraite, ils font sauter les ponts et mettent le feu au théâtre, détruisant les décors et les machines de scène.
Trois semaines plus tard, les troupes britanniques libèrent Lille. Le journal l'Écho du Nord ressuscité fête la délivrance, la population fête les libérateurs. Les visites de personnalités vont se succéder : Georges Clemenceau, le président du Conseil, Raymond Poincaré, le président de la République, Pétain, le maréchal Foch, le roi George V. À Paris, le maire, Charles Delesalle est ovationné place de la Concorde devant la statue de Lille couverte de fleurs. Mais l'euphorie sera de courte durée.
Le 14 décembre 1918, un envoyé spécial du " Morning Post" arrive à Lille. Il écrit : " c'est une cité presque morte où ceux qui sont restés continuent à vivre de charité ou de crédit. Une cité sans industrie, sans transports." La libération n'a pas signifié la fin des épreuves. En janvier 1919, le préfet du Nord constate dans son rapport : "au milieu des préoccupations matérielles, la population fait preuve d'une atonie telle que la nouvelle de l'armistice n'a pas provoqué l'enthousiasme que devrait provoquer un si heureux événement."