Jean-Claude Mézières, auteur de la bande dessinée "Valérian et Laureline" et père des Arches de Lille 2004, est mort à 83 ans

Créateur de la série Valérian et Laureline, les "agents spatio-temporels de Galaxity" dont il relate les aventures pendant plus de 50 ans aux côtés de son scénariste et ami de toujours, Pierre Christin, dans la région, le nom de Jean-Claude Mézières raisonne surtout avec Lille, capitale mondiale de la culture en 2004.

En 2004, souvenez-vous, c’est à cet amoureux des grands espaces que l’on doit la création des grandes arches, qui constitueront le "chemin des étoiles" rue Faidherbe. Une rue Faidherbe, face à la gare de Lille-Flandres, qui prendra pour l’occasion des allures de pistes de décollage pour Ovni avec ces gigantesques arches futuristes.

Une collaboration, permise à l’époque par le dessinateur lillois François Boucq : "l’équipe de Lille 2004 m’avait sollicité pour trouver des dessinateurs susceptibles de collaborer à l’imaginaire de l’événement. Immédiatement, j’ai pensé à Jean-Claude Mézières. Son travail sur la série "Valérian" mais également son expérience de cow-boy lorsqu’il vivait en Amérique, dans les années 60, lui ont donné une parfaite maîtrise et un grand savoir-faire dans la mise en scène des grands espaces".

Une mission que le dessinateur reçoit comme une reconnaissance. Ses arches, qui ont ensuite tourné dans le monde entier, ont été pour lui, comme une manière de concrétiser sa notoriété. Car Francois Boucq se souvient : "il vivait avec une certaine amertume, le fait que certains grands créateurs de science-fiction américains puissent s’inspirer de son imaginaire de Valerian, sans jamais le citer".

Erreur que ne commettra pas Luc Besson qui fait appel à son talent pour "Le Cinquième Élément" et auquel Jean-Claude Mézières donnera l’idée des taxis volants.

Un maître de la composition

François Boucq, qui a connu Jean-Claude Mézières, à ses débuts, se souvient de lui comme d’un extraordinaire pédagogue. "Il excellait dans la manière de raconter une histoire et de saisir les pièges dans lesquels, il ne fallait pas tomber. Il avait même un certain plaisir à dénicher, en un quart de tour, les erreurs que l’on faisait sur nos planches, pour nous indiquer ensuite la bonne direction".

Pour François Boucq, sans aucun doute l’un des meilleurs raconteurs d’histoires en images, qui excellait dans la composition de ses planches. "Il savait optimiser le cadrage, le déroulé des images, pour que sa composition apparaisse comme une évidence pour le spectateur".

Une composition parfaite, pour amener le regard du spectateur à l’endroit où l’on veut qu’il soit, pour lui permettre de suivre l’histoire confortablement.

Un sens du détail, exacerbé, pour rendre réel, ces grands espaces imaginaires qui lui étaient si chers, mais qui lui faisait pourtant défaut, lorsqu’il s’agissait de peaufiner les traits d’un personnage. "Si il devait fignoler par exemple, les cheveux de l’un de ses personnages, c’était pour lui, un exercice extrêmement laborieux. Il y mettait comme une sorte de résistance intérieure".

Valérian, Histoire d'une création (2017) ©Un film d'Avril Tembouret © Rosebud productions / Delastre films 2017

La complexité sans aucun doute des grands créateurs

Un immense créateur, c’est également l’image que garde en mémoire Pascal Mériaux, le directeur du festival de bandes dessinées d’Amiens. "Entre le festival d’Amiens et ce dernier monstre du journal Pilote, c’est une longue histoire".

Une histoire qui débute un an après la création du festival en 1997, pour lequel Jean-Claude Mézières va réaliser un dessin en hommage à l’illustrateur et scénariste Paul Gillon, qui un an, avant lui, en 1983 avait obtenu le Grand Prix de la BD d’Angoulême.

"En 1998, se souvient Pascal Mériaux, nous avons également exposé plus d’une centaine des planches que Jean-Claude Mézières avait réalisées pour ‘le Cinquième Elément’ de Luc Besson".

Exposées également, les planches des albums "Valérian" quelques années plus tard en 2014, à la bibliothèque d’Amiens.

Des collaborations, et le souvenir également, pour le directeur du festival d’Amiens, d’un homme doté d’une grande chaleur humaine, "c’était sa grande force, être à l’écoute, avec cette capacité à transformer les demandes qui lui étaient adressées, en quelque chose de solaire".

Un immense dessinateur dont Pascal Mériaux retient surtout, cette incroyable inventivité, pour des mondes qui n’existent pas. Comme une puissance de l’imaginaire à jamais assouvie.

Décédé dans la nuit du 23 janvier 2022 à l’âge de 83 ans, celui qui apparaissait comme avant-gardiste à ses débuts, à une époque où la science-fiction intéressait peu d’auteurs de bandes dessinées, laisse aujourd’hui les amoureux du 9ème art, orphelins. Le monde de la bande dessinée en deuil.

NB : après "22 albums", traduits dans "une vingtaine de langues", l’éditeur Dargaud propose une collection dans laquelle il invite des auteurs à revisiter l’histoire de "Valérian" et "Laureline" sous forme de one-shot. S’y sont déjà essayés Larcenet, Lauffray et Lupano.

Devrait paraître prochainement celui de la dessinatrice Virginie Augustin.

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