Du 27 juillet au 11 août 2024, les épreuves préliminaires du tournoi olympique de basket-ball se déroulent au Stade Pierre-Mauroy, avant les phases finales à l'Arena de Bercy. Un livre, La face cachée des JO, sorti le 5 juin 2024, pointe le risque de condensation dans la salle. Ce qui, dans le pire des cas, pourrait blesser des joueurs ou reporter des matchs. Entretien avec Thierry Vildary, journaliste, et co-auteur du livre enquête et témoignage.
"Sébastien Chesbeuf a travaillé à Paris 2024 et a été licencié car il a pointé des problématiques et tenté d'alerter les politiques sur certaines dérives. Moi je travaille depuis longtemps sur les dossiers des Jeux, les candidatures", explique Thierry Vildary, co-auteur de La face cachée des JO avec Sébastien Chesbeuf et Jean-François Laville. Nous avons interrogé Thierry Vildary sur le cas du Stade Pierre Mauroy.
Dans votre livre, vous listez les problématiques dans l'organisation des Jeux. Pourquoi peut-il y avoir de la condensation dans la salle de basket Arena Pierre Mauroy cet été ?
On n'a jamais organisé de compétition de basket ou de handball en plein été au Stade Pierre Mauroy. Ça a eu lieu en autonome, l'hiver. Le risque est une vague de chaleur et d'humidité ce qui arrive de plus en plus ces dernières années.
Personne n'arrive à garantir un modèle mathématique qui assure qu'il n'y ait pas de risques de condensation en cas de fortes chaleurs
Thierry Vildary, journaliste, co-auteur de La face cachée des JO
Le toit du stade n'est pas totalement étanche. C'est un toit qui se déplie et qui vient recouvrir l'Arena comme une tuile sur un toit. Mais ce n'est pas hermétique, il n'y a pas de joint. Sur 100 mètres de chaque côté du toit, il y a un espace d'un mètre de hauteur par lequel l'air rentre. Avec 25 000 personnes à l'intérieur. Ça fait une importante entrée d'humidité. Les spécialistes s'échangent des études depuis un an et personne n'arrive à garantir un modèle mathématique qui assure qu'il n'y ait pas de risques de condensation en cas de fortes chaleurs. En gros au-dessus de 30° et 70% d'humidité, soit un temps lourd et orageux.
Comment faire face à ce risque ?
Le basket ne se joue pas en plein air, on ne peut donc jouer toit ouvert. Pour contrecarrer le risque de condensation avec toit fermé, un système de climatisation costaud est en train d'être installé au Stade Pierre Mauroy. Des tuyaux de climatisation sont installés à l'intérieur pour faire tomber de l'air froid et sécher l'air.
Avant chaque match, voire à la mi-temps, des techniciens, des avocats et des huissiers commandés par la FIBA contrôleront que c'est jouable. C'est quand même extraordinaire !
Thierry Vildary, journaliste
Peut-on quantifier ce risque ?
Avec la puissance de climatisation qui va être déployée, tout le monde s'accorde à dire qu'avec 60% d'humidité ça va aller. S'il fait plus chaud, et plus humide, peut-être que cela marchera mais personne ne peut assurer que cela suffira. Là on est dans un domaine inconnu où on peut, peut-être, décaler un match pour sécher la salle. Avant chaque match, voire à la mi-temps, des techniciens, des avocats et des huissiers commandés par la FIBA contrôleront que c'est jouable. C'est quand même extraordinaire ! Le problème est un problème d'impréparation... Le stade est magnifique mais il y a quand même une impréparation et d'autre part on nous a vendu des Jeux écologiques écoresponsables à bilan carbone neutre. Et là, on nous annonce une clim' de type qatari. Or, je rappelle qu'il y a une Arena toute neuve de basket à Paris, porte de la Chapelle, qui fait 8 000 places et Paris 2024 a trouvé que ce n'était pas une bonne idée d'y jouer au basket. On va y jouer au badminton à la place. Je ne sais pas où est la cohérence de tout ça.
Ça doit se jouer à l'heure dite. Sinon juridiquement et financièrement, ça risque de poser problème
Thierry Vildary, à propos des droits TV américains, notamment
En cas de condensation, quelles conséquences possibles ?
Ce qu'on explique dans le livre... Le scénario catastrophe, qui n'est pas certain, mais qui est une hypothèse qu'on ne peut écarter sérieusement : s'il y a trois ou quatre jours d'une vague importante de chaleur à 35° ou plus - c'est arrivé 4 fois sur les 6 dernières années - il y aura un risque de condensation : les joueurs peuvent glisser sur le parquet, donc on décale les matchs, on les reporte, le calendrier est bouleversé. Ça a des conséquences en cascades. Les Jeux étant un spectacle audiovisuel, avec des médias qui payent des fortunes pour retransmettre sur des grilles de programmation avec des créneaux précis. Et ça, ce sont des engagements financiers énormes que le CIO et les organisateurs s'engagent à tenir. Ça doit se jouer à l'heure dite. Sinon juridiquement et financièrement, ça risque de poser problème.