ENQUÊTE. Marches pour le climat : la mobilisation aurait-elle cette ampleur sans les réseaux sociaux ?

Greta Thunberg a commencé toute seule sa grève scolaire en août dernier devant le parlement suédois. Depuis, ils sont des milliers à manifester chaque semaine, notamment en Belgique. A l'heure d'une "grève mondiale des jeunes pour le futur", quel est le rôle joué par les réseaux sociaux ? Enquête. 

Ils veulent un futur viable, une révolution pour la planète. Ils le crient en anglais, en français et en flamand.
Ce 21 février, la jeunesse belge s'est donné rendez-vous à la gare du Nord à Bruxelles. C'est son 7e jeudi de mobilisation pour le climat. 

Lou, 15 ans, nous explique : "On a un groupe Facebook à l'école où on discute entre élèves. On s'est dit qu'il était temps de changer les choses. On a commencé chez nous à Namur. Aujourd'hui, c'est notre première à Bruxelles."

Pour ces jeunes flamands et wallons, aujourd'hui, n'est pas un jour de manifestation comme les autres. Ils reçoivent une invitée de marque : Greta Thunberg, leur icône. Encore inconnue l'été dernier, la jeune militante suédoise de 16 ans est assaillie par la presse. Une bonne vingtaine de caméras, autant de photographes manquent de l'étouffer.

Tout le monde veut l'image de celle qui en quelques mois est devenue la figure d'une jeunesse mondiale en lutte contre l'inaction climatique.
 

Greta Thunberg, devenue une icône par la viralité du web 

"Elle est incroyable, ce qu'elle fait c'est révolutionnaire !", s'extasie une jeune manifestante bruxelloise. "Elle est BAE !", s'exclame une autre. Traduisez "Before Anyone Else", nouvel acronyme en vogue chez les moins de 20 ans. "Elle est terrible, c'est une héroïne pour chacun de nous parce qu'elle sauve notre planète. On lui est très reconnaissants ! On est tous derrière elle !". Certains ont gravé son nom sur leur joue, avec des coeurs.

Comment l'ont-ils découverte ? Sur les réseaux sociaux pardi. Les images de l'adolescente aux longues nates blondes posant devant le parlement suédois avec sa pancarte "en grève pour le climat" ont été likées des dizaines de milliers de fois sur Instagram .
 

Ses vidéos se propagent plus vite que l'éclair sur la toile. Des millions de vues, partout à travers le monde. A chaque rencontre internationale, l'adolescente défie les grands de ce monde, et les accuse droit dans les yeux.

 


Une grève mondiale pour le climat 

"A quoi sert d'aller à l'école si le futur n'est pas garanti ?", demande-t-elle, imperturbable. Greta Thunberg invite les enfants du monde à faire la grève comme elle.

Message reçu. Dès la fin décembre 2018, deux jeunes flamandes lancent la mobilisation générale en Belgique. Elles s'appellent Kyra Gantois et Anuna de Wever. "Comme le dit Greta : nous serons là, que vous le vouliez ou non. A partir du 10 janvier, nous serons devant le parlement pour nous battre pour le futur", professent-elles sur  Facebook.

Leur appel est entendu. Depuis la première marche du 10 janvier, ils sont chaque jeudi 10 000 jeunes et plus à battre le pavé à travers toute la Belgique.


Ce 21 février à Bruxelles, une scène a été montée devant la gare du Midi. Greta, Anuna et Kyra sont acclamées comme des rock stars. Autour d'elles, d'autres leaders de la jeunesse sont venus d'Allemagne et des Pays-Bas.
 

"Notre futur n'est pas assuré" 


Greta Thunberg lance à la foule : "Pendant trop longtemps, les dirigeants du monde ne se sont pas préoccupés de la crise climatique. Nous voulons nous assurer qu'ils ne continueront pas comme ça. On leur cassera les c... jusqu'à ce qu'ils se décident à faire quelque chose !" Les manifestants s'époumonnent. Anuna de Wever enchaîne : "Notre futur n'est pas assuré. Nous nous battrons jusqu'à ce qu'il le soit.

Ces jeunes ne sont pas encore majeurs, mais ils sont décidés à maintenir la pression jusqu'à ce que les dirigeants au pouvoir les entendent et agissent.

Greta et ses amis ont choisi de ne plus prendre l'avion, trop polluant. Ils voudraient même interdire les vols internes en Europe, au profit du train.
Pour eux, l'heure n'est plus aux mesurettes, mais au changement radical.
 

"Avec Greta, on va changer le monde !"


"Avec Greta, on va changer le monde !", lance à son tour Adélaïde Charlier du haut de l'estrade toujours, face aux 7 500 jeunes rassemblés ce jour là à Bruxelles. Elle est la meneuse francophone de la jeunesse belge fédérée sous la bannière Youth for Climate.

Comme tous les autres, elle a découvert celle qui est devenue son modèle de lutte et d'action, Greta Thunberg, via les réseaux sociaux. : "C'est incroyable qu'une petite voix puisse créer autant de cris, autant de joie mais aussi d'inquiétude. Les jeunes sont intéressés, ils savent ce qu'il se passe pour l'environnement. Ce qu'ils nous disent dans les manifestations, c'est qu'avant de nous rejoindre, ils ont fait leurs propres recherches sur internet, ils s'informent par eux mêmes...Nous on lance l'événement et on les invite à marcher. On a un fil twitter, un compte instagram, mais c'est vraiment grâce à Facebook qui nous permet cette mobilisation là."

 
 

Créer un événement en quelques clics grâce à Facebook


Parce qu'il permet de créer un événement en quelques clics, c'est aussi sur ce réseau social qu'ont été lancées les marches pour le climat en France.

A l'origine, l'aveu d'impuissance du ministre de l'environnement Nicolas Hulot, qui annonce sa démission le 28 août 2018 sur France Inter, une vidéo devenue virale sur inernet là encore. 

Le soir même, un citoyen anonyme, Maxime Lelong, appelle à se mobiliser en masse. Une semaine plus tard, ils sont plus de 100 000 à défiler dans les rues de France.
 

Interrogé dans la manifestation, l'auteur de cette mobilisation monstre explique : "C'est la première fois que je me mobilise. je n'ai jamais fait partie d'aucune association, d'aucun parti politique. J'ai réagi à la démission de Nicols Hulot en tant que citoyen."


4000 personnes mobilisées à Lille 


A Lille, la Grand place est noire de monde. Comme ailleurs, beaucoup manifestent pour la première fois, et souvent en famille. Tous ou presque ont découvert l'appel à marcher sur les réseaux sociaux. 

Pour Xavier Galand, Président Maison régionale de l'environnement et des solidarités, et militant écologiste de toujours, l'histoire d'un homme qui parvient à mobiliser une centaine de milliers de marcheurs climatiques à lui tout seul, c'est de la belle histoire pour les médias, du "storytelling pour journalistes".

Selon lui, la force de frappe des militants écologistes chevronnés, qui ont relayé l'appel,a joué aussi : "Certes, un homme à Paris avait créé un évenement sur Facebook. Mais si des structures un peu organisées, qui ont une petite habitude et qui s'appuient sur un réseau de militants, d'adhérents, de gens sensibles, si nous on avait pas fait une partie de ce boulot, je pense que le résultat n'aurait pas été le même", analyse-t-il. Même s'il confesse avoir été surpris comme tout le monde par l'ampleur de cette mobilisation du 8 septembre. 
 

Une vingtaine de collectifs "Ensemble pour le climat" dans les Hauts-de-France


Depuis, il y a eu trois autres marches à Lille et partout dans l'hexagone. Mais surtout, la création dans les Hauts-de-France d'une vingtaine de collectifs locaux « Ensemble pour le Climat »

Celui de Marcq-en-Baoeul dans la métropole lilloise a depuis aussi lancé une opération coup de poing dans un supermarché : une plastique attack pour sensibiliser au suremballage et changer les comportements de tous, distributeurs compris. 

"Si chacun d'entre nous arrive à sensibiliser cinq personnes en une journée, et que ces cinq personnes le lendemain sensibilisent à leur tour cinq autres personnes, il faut dix jours pour sensibiliser toute la France", explique Laurence Brzozowski, d'"Ensemble pour le Climat" de Marcq-en Baroeul.


Créé à l'automne, ce collectif se réunit régulièrement pour bâtir de futures actions. Parmi eux, ils sont un certain nombre à s'engager pour la première fois dans une cause, après avoir marché pour le climat.
 

Faire pression sur les élus et décideurs locaux


L'un des objectifs: faire pression sur les élus pour engager la transition écologique dans leur ville.

"Il est dans notre rôle de rendre l'inaction inacceptable", témoigne Olivier Barre, un autre membre du collectif. "Pour tous les élus, les décideurs,  que ça leur devienne nécessaire d'agir, qu'ils n'aient pas d'autres solutions".

Laurence, qui anime les réseaux sociaux pour le groupe, conlcut : "Cet élan citoyen n'aurait peut-être pas pu exister sans la force des réseaux sociaux. Aujourd'hui, c'est un moyen d'organisation majeur, un amplificateur de mouvement. On peut commencer par un pemier pas de partage, de like, d'augmenter le nombre de like. Mais ce n'est pas le sujet. Le sujet c'est comment on agit ensemble, comment on est plus fort ensemble."
 

Inverser la courbe du réchauffement climatique


Bref, faire boule de neige sur la toile, mais s'engager dans le monde réel.

L'avenir dira si Greta, Anuna, Adélaïde et les autres auront réussi à changer le cours de l'histoire, et à stopper la course du réchauffement climatique.
 
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