A l'automne 2022, le collectif Migraction59 a entamé les rénovations d'un immeuble vacant à Roubaix, pour y accueillir des ateliers d'art et d'insertion sociale. Mais la Métropole Européenne de Lille, propriétaire du bâti, refuse de laisser la jouissance du lieu aux associatifs.
"On voulait vraiment que ce ne soit pas un squat. Dans l'attente de pouvoir occuper la maison, on a voulu montrer ce qu'on était capables de faire avec rien, en deux mois, pour être pris au sérieux" plaide Sophie Djigo, membre et fondatrice du collectif Migraction59.
Un immeuble vacant devenu atelier d'art
En septembre 2022, contacté par des artistes locaux, l'association a découvert au coeur de Roubaix un bâtiment ancien de 400m², à l'abandon depuis plusieurs années. "Ils y sont entrés parce que la porte arrière était ouverte, et ont découvert que l'électricité fonctionnait toujours, explique la militante.
"On a décidé d'occuper ce lieu, dont on avait besoin, pour proposer des ateliers d'art aux exilés qu'on reçoit le weekend en accueil de répit, pour stocker des dons alimentaires et des tentes... On a accueilli aussi l'association roubaisienne JSFR qui fait de l'insertion sociale pour les jeunes de quartier."
Après avoir assuré les premières rénovations et orné les murs de fresques de street art, le collectif a contacté la Métropole Européenne de Lille (MEL), propriétaire du bâti, pour régulariser sa situation. Mais la MEL, selon les militants, n'a pas eu la réaction attendue.
La MEL scelle les entrées
"Les différents services de la MEL nous ont opposé des réactions complètement contradictoires. De là, la métropole a fait venir un huissier et a scellé les portes. Cela fait deux mois qu'on nous promet de trouver une solution. De notre côté, la colère monte, parce qu'à l'intérieur de ce bâtiment, on a des tentes et des sacs de riz auxquels on ne peut plus accéder, alors qu'on est en plein hiver" alerte Sophie Djigo.
Contactés par France 3, les services métropolitains soutiennent une version bien différente. D'après la MEL, le refus de laisser l'association jouir de ces locaux désaffectés, c'est une transaction déjà engagée. "Le bâtiment était en état dégradé et a du faire l’objet de travaux par la MEL en raison d’un début de mérule."
"L’association est entrée irrégulièrement et sans autorisation dans les locaux suite aux travaux alors qu’il existait un projet de cession au bailleur social LMH, qui prévoit une réhabilitation du bâtiment"
Métropole Européenne de Lille
Toujours selon les services métropolitains, trois semaines ont été accordées à l'association à partir de mi -novembre pour évacuer leur matériel avant que les scellés ne soient posés. "Un rendez-vous sur site s’est tenu en présence d'une représentante de l'association, le 13 décembre 2022. Il a été constaté que les associations n’avaient pas débarrassé les lieux. La MEL a récupéré la clé lors de ce rendez-vous."
La MEL a indiqué ne pas avoir été contactée par l'association depuis, ce que réfute Sophie Djigo, qui parle de demandes répétées.
"On pouvait s'attendre à plus de soutien"
"On sent que ce dossier est mort, alors qu'on défend tout de même un très beau projet. Le collectif a été très violemment attaqué par Reconquête et le RN en décembre dernier, on pouvait s'attendre à plus de soutien de la part de la MEL" déplore la militante associative. "Pour nous, ce positionnement est tout simplement très ambigu."
Au civil, Sophie Djigo est philosophe et enseignante de classe préparatoire à Valenciennes. Fin 2022, elle a été la cible d'une violente campagne de harcèlement orchestrée par l'extrême-droite pour avoir organisé une sortie pédagogique autour des conditions de vie des exilés de Calais. Elle avait dû être placée sous protection policière.