RER métropolitain à Lille trop cher selon le ministre des Transports ? Les élus du bassin minier montent au créneau et écrivent à Emmanuel Macron

Les présidents de quatre agglomérations du bassin minier ont envoyé un courrier le 22 mars 2024 à Emmanuel Macron lui demandant de clarifier la position de l'Etat sur le RER métropolitain lillois. Un courrier qui fait suite aux propos du ministre des Transports et ex-maire de Dunkerque, Patrice Vergriete.

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"Ces affirmations révèlent d’une méconnaissance du dossier". Quatre présidents d’agglomérations du bassin minier montent au créneau et attaquent frontalement le ministre des Transports, dans un courrier adressé à Emmanuel Macron. Tout est parti d’une réponse de Patrice Vergriete aux lecteurs de la Voix du Nord, lors d’une séance de questions/réponses organisée dans les locaux du journal régional mi-mars 2024.

7 milliards, trop cher ?

Interrogé sur le projet de RER métropolitain lillois, l’ancien maire de Dunkerque répond en toute franchise. "Le projet qui est aujourd’hui sur la table autour de Lille est intéressant mais pas à la bonne échelle : il ne va pas au-delà de la métropole de Lille et du bassin minier". Avant d’ajouter que le projet "coûte très très très cher". Trop ? L’interroge le lecteur. Patrice Vergriete acquiesce, et donne l’exemple du coût du RER métropolitain de Bordeaux, "800 millions", face au coût du RER métropolitain lillois, "7 milliards", pour appuyer son propos.

En janvier 2023, alors qu'il n'était pas encore ministre, Patrice Vergriete avait déjà taclé le projet de RER métropolitain.

Une petite phrase qui pourrait enterrer le projet dans son état actuel ? Les élus locaux du bassin minier n’ont pas attendu la réponse à cette question pour s’insurger. Ils répondent aux deux critiques avancées par le ministre : le coût jugé trop élevé et l’échelle du projet, trop centrée selon Patrice Vergriete sur le bassin minier.

"Un investissement pour l’avenir"

Sylvain Robert, maire PS de Lens et président de l’agglomération Lens-Liévin, avoue avoir "bondi" lorsqu’il a pris connaissance de la réponse du ministre. "En février 2022, Emmanuel Macron a pris un engagement, rappelle l’élu. Dans le cadre du projet ambitieux de rénovation des cités minières et du bassin minier, le projet de mobilité était aussi important que la rénovation de logements pour désenclaver le territoire, faire la liaison avec la métropole, désengorger l’A1. Le président avait alors assuré que l’engagement de l’Etat serait à la hauteur de cette ambition".

La remise en question du projet par Patrice Vergriete ? "Incompréhensible", répond Sylvain Robert, rappelant que des études sont déjà lancées, des chantiers envisagés et tout un territoire "mobilisé" pour voir naître ce projet.

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Sur le volet "financement", le président de l’agglomération Lens-Liévin admet que la somme de 7 milliards d’euros ne doit pas être négligée, notamment lorsque "les finances publiques font la une de l’actualité", souligne-t-il. Mais il considère que cet investissement générera de nombreux gains : "qualité de vie, transports mais aussi développement économique".

Le projet de RER métropolitain lillois nécessite de gros travaux d’aménagement, parmi lesquels la création d’un nouveau barreau ferroviaire long de 37 kilomètres entre Lille et Hénin-Beaumont, la création d’une gare souterraine entre Lille Flandres et Lille Europe et le creusement d’une quinzaine de kilomètres de tunnels sous Lille et les communes voisines. Rien à voir avec Bordeaux donc, ville citée par le ministre des Transports pour comparer les coûts des deux projets.

"La configuration entre les deux métropoles n’est pas du tout la même", indique Sylvain Robert, prenant notamment pour exemple les habitants du bassin minier qui doivent prendre leur voiture faute de mieux pour se rendre au travail à Lille et aux alentours.

Le projet trop centré sur le bassin minier ? "Le million d’habitants en a besoin"

Même s’il juge "intéressant" le projet lillois, le ministre des Transports juge que celui-ci n’est "pas à la bonne échelle". Comprendre entre ces lignes que Patrice Vergriete estime que seul le bassin minier profiterait de ces nouvelles infrastructures au détriment des habitants de la Côte d’Opale notamment.

Sylvain Robert rétorque. "Aujourd’hui, vous avez un TERGV qui relie les villes de la Côte d’Opale à Lille, ce qui n’est pas le cas du bassin minier", précise l’élu. Il cite l’exemple des TER reliant Lens à Lille en... 45 minutes. "De plus, quand vous voyez la saturation de l’A1 et le succès plus que relatif de la voie de covoiturage sur la portion d’autoroute entre le bassin minier et la métropole lilloise, on voit qu’il y a une vraie problématique de mobilité sur un territoire assez proche", poursuit-il.

Selon lui, le million d’habitants du bassin minier "a besoin" de ce projet. "Quand tout se passe bien, on met beaucoup moins de temps en voiture que de prendre le train pendant trois quarts d’heure. Ce qui n’existe que chez nous, précise le maire. Avant d’ajouter : c’est un sujet de désenclavement, de mobilité et un véritable sujet du quotidien".

Le scud de Xavier Bertrand au ministre des Transports et... ex-maire de Dunkerque

Au-delà des présidents d’agglomérations signataires du courrier envoyé à Emmanuel Macron, nous avons interrogé Xavier Bertrand, président LR de la région des Hauts-de-France en lui posant 3 questions.

  • Comment avez-vous réagi aux propos du ministre Vergriete ?

"Pas bien. Comment on peut faire avancer un tel projet indispensable à la région des Hauts-de-France si le ministre des Transports n’en veut pas et n’y croit pas ?

Techniquement, ce dossier n’est pas simple et on est en train de lever les obstacles. Financièrement, on est toujours dans le flou : le président de la République a dit qu’il voulait ce projet, et là on a visiblement un ministre des Transports qui nous dit que ce projet n’est pas bon pour la région".

  • Comment expliquer sa position ?

"Peut-être qu’il veut plus pour Dunkerque. Mais pour la région, pour le bassin minier, pour l’Arrageois, pour le Valenciennois, pour le Dunkerquois, il (ce projet) est bon.

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Xavier Bertrand répond à Patrice Vergriete au sujet du RER métropolitain lillois ©France 3 Hauts-de-France

Si l’Etat nous dit aujourd’hui "on veut faire plus". Très bien, alors que l’Etat nous finance".

  • Aujourd’hui, comment pourrait se faire ce financement de 7 milliards ?

"On n’en sait rien du tout. Il y a eu une annonce un dimanche soir du président de la République. Ensuite on nous a dit qu’il fallait avancer. Je veux bien avancer mais à un moment il faut savoir qui paie parce que je ne veux pas un impôt régional.

Pour la région ça coûtera beaucoup d’argent, parce qu’il faudra financer les nouveaux trains qui circuleront sur ces voies. On aura certainement à participer à l’investissement. Mais aujourd’hui, on est dans le flou le plus complet.

Je demande qu’on mette un terme à l’ambiguïté. Si le ministre des Transports ne veut pas de ce projet, que le Premier ministre et le président de la République nous disent clairement s’ils en veulent oui ou non".

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