Quadraplégique depuis un accident de la circulation en 1991, originaire de St-Omer, Tanguy Revel, 49 ans, ne vit pas comme une "mission" son travail pour favoriser l'accessibilité des personnes handicapées. Juste comme une personne "concernée", et tournée vers les autres. Il nous parle de son métier, de son initiative originale et de la façon dont il juge Lille (où il vit) sous l'angle de l'accessibilité. Portrait.
C'est l'histoire d'un brave et jeune type qui, juste après son baccalauréat voit sa vie complètement bouleversée, en juillet 1991. Au volant, Tanguy rate un virage et se fracture deux vertèbres cervicales. La moëlle épinière est touchée. La voiture n'a pas d'appui-tête, coup du lapin... Depuis Tanguy est quadraplégique : il n'a plus l'usage de ses jambes, n'a plus de sensation sur une partie du tronc et a les mains en partie paralysées !
A l'entendre pourtant, pas de choc ou de traumatisme psychologique... Force de la nature ou pudeur ? Tanguy se souvient plutôt du positif : "en août 1991, j'étais déjà en fauteuil. Fini le lit : on est allés boire un verre avec les amis ! Je me souviens que j'étais très entouré, et très motivé pour commencer mes études en septembre".
Hospitalisé à Berck-sur-Mer, le combat de Tanguy commence alors. Celui de l'optimisme et de la persévérance face à un corps qui ne répond plus. "Je me souviens que les médecins me disaient qu'il me fallait une année off, mais moi je voulais reprendre les études", retrace Tanguy. Et face à l'insistance du jeune homme, l'hôpital accepte qu'il intègre plus tôt des cours regroupés.
De fil en aiguille, le mental se forge, Tanguy part de l'hôpital, est orienté vers un foyer à Villeneuve d'Ascq pour regagner en autonomie : réapprendre, avec le handicap, à se débrouiller dans un appartement ; tout en suivant les cours d'économie et gestion à l'Université catholique de Lille. Lourdement handicapé, Tanguy n'a pas de contre-coup (moralement parlant) et continue à aller de l'avant. Avec un auxiliaire de vie le matin et un étudiant le soir qui l'aident.
Aujourd'hui, Pascal, son employé au pair à Lille, où vit désormais Tanguy, prend le relais... Professionnellement parlant, Tanguy a monté son entreprise, SoluAccess qui vend des solutions d'accessibilité pour les commerçants et pour les différents lieux accueillant du public. "Avec des copains, on avait créé une association en 2004 oeuvrant pour les personnes âgées dépendantes. Notre action se déclinait en SoluDent, SoluOptique etc. pour faciliter l'accès rapide à des soins de ces personnes".
Voilà pour la genèse de SoluAccess où Tanguy travaille seul : "j'ai besoin d'un téléphone, d'un ordinateur et d'un appareil pour les mesures. Pour le reste je fais appel à des prestataires". La loi Handicap de 2005 fait d'ailleurs du bien (obligation 'd'accès à tous' pour les bâtiments accueillant du public en 2015) au business de Tanguy. "Mais le problème est -hormis les bâtiments neufs- qu'il n'y a pas ou peu de contrôle et, pour se prémunir d'une éventuelle amende, il faut justifier ou dire qu'on a engagé des démarches" ; alors pour inciter à montrer l'exemple Tanguy a eu l'idée de réaliser des vidéos sympas mettant à l'honneur les initiatives prises en faveur des personnes handicapées par les commerçants lillois.
Contrairement à Paris, sur Lille, le métro est accessible pour les personnes en situation de handicap. "Le bus également, une rampe automatique est installée au milieu de chaque bus. Il y a aussi le handipole, une espèce de taxi privatif qui pour 2,30 euros vous emmène d'un bout à l'autre de la métropole. Mais il faut réserver et, même s'il y a au moins 30 conducteurs, parfois le service est complet. Par contre, je suis toujours étonné d'entendre de la part de commerçants qu'ils n'ont pas de clientèle en fauteuil et qui laissent entendre qu'ils n'ont donc pas besoin de s'équiper. J'ai envie de dire : équipez-vous, la clientèle viendra".
Pour les autres vidéos voir sur Instagram : la communauté de la rampe