198 organisations, dont de nombreuses associations, syndicats et les partis politiques LFI, EELV et NPA, appelaient à se mobiliser contre "les violences policières, le racisme systémique et pour les libertés publiques" ce samedi 23 septembre. Au moins six "marches pour la justice" ont eu lieu dans les Hauts-de-France.
"Uni·es contre les violences policières, le racisme systémique et pour les libertés publiques", c’est en ces termes que 198 organisations appelaient à la mobilisation samedi 23 septembre. Des marches pour ne pas oublier la mort de Nahel, tué par un policier à Nanterre le 27 juin dernier, mais aussi pour dénoncer plus largement les violences sociales et économiques.
Au niveau national, 30 000 participants étaient attendus dans pas moins de 119 manifestations. Dans les Hauts-de-France, des rassemblements ont eu lieu à Lille, Calais, Dunkerque, Amiens, Beauvais et Laon.
Amiens a ouvert le bal à 10 h 30, avec un cortège qui rassemblait une grosse centaine de personnes autour de revendications nombreuses, mais toutes en lien avec l’aspiration à une plus grande justice sociale.
Dans l'après-midi, 900 personnes ont défilé dans les rues de Lille d'après la préfecture (2 000 selon la Ligue des droits de l'Homme), 40 à Dunkerque, 100 à Beauvais et environ 80 à Laon.
"Aujourd’hui, on n’utilise pas la police pour protéger les manifestations, mais contre les manifestants"
Parmi les militants réunis devant l’hôtel de ville d’Amiens, Kévin Crépin, secrétaire général de l’union départementale des syndicats CGT de la Somme, salue le nombre d’organisations fédérées autour de l’appel unitaire à la mobilisation.
"Les organisations sont unies, car il y a un tournant dans la situation qui nous inquiète, résume Kévin Crépin, un tournant en matière de violences policières, qui sont impunies, un tournant en matière de répression en général. C’est une journée pour la liberté de revendiquer et de manifester, pour la justice sociale aussi, car in fine, c'est ça la question, on constate que tous ceux qui contestent la politique du gouvernement au service du capital et des plus riches doivent se taire."
"On utilise la police contre les quartiers populaires"
Kévin Crépin, secrétaire général de la CGT 80
Sur la question des violences policières, la CGT demande l’interdiction des LBD et l’abrogation de la loi de 2017 qui assouplit l’usage des armes à feu pour les policiers, dénoncée par le syndicat comme un "permis de tuer". Plus largement, la CGT demande un changement de la doctrine de maintien de l’ordre.
"Aujourd’hui, on n’utilise pas la police pour protéger les manifestations, mais contre les manifestants, c’est inacceptable, déplore Kévin Crépin. On utilise la police contre les quartiers populaires (...) cette situation ne peut pas durer." Pour le syndicaliste, cette manifestation n’est pas contre la police, mais pour une police plus républicaine.
Le traumatisme des violences
"On a vu beaucoup de choses contre les gens qui venaient manifester, c’est intolérable, répond comme en écho une manifestante de Lille arborant un gilet jaune. Scalper des filles en les tirant par les cheveux, mettre des gens par terre en les tapant avec leurs matraques, ça fait mal aussi. Il y a eu les tirs de LBD et des gens éborgnés, nous sommes là pour leur dire stop, ça suffit."
"Nous sommes venus car il y a beaucoup de familles de victimes de violences policières, ajoute un homme du cortège lillois. Des personnes ont été éborgnées, d’autres ont perdu un proche, c’était très important pour nous de venir."
À chacun ses raisons
Côté syndicats, l’UNEF était également représentée dans le cortège d’Amiens. "Nous vivions le racisme systémique tous les jours, particulièrement les étudiants internationaux : dès qu’ils arrivent en France ils doivent payer 2770€ pour la licence, 3770€ pour le master, on ne peut pas dire que ce n’est pas du racisme systémique, constate Flavie Quilan-Lacour, présidente de l’UNEF Amiens-Picardie. Nous sommes là pour porter la revendication des mêmes droits d’études pour toutes et tous, quelle que soit la nationalité."
On l’a vu aussi sur les manifestations féministes, quand les femmes essaient de dénoncer les problèmes, elles se font réprimer.
Lucie Houlbreque, bénévole de Planning familial 80
Un peu plus loin, une bénévole du planning familial de la Somme prend la parole. "Nous sommes là pour lutter contre les inégalités sociales puisque de toute façon, ça retombe toujours sur la tronche des femmes, se désole Lucie Houlbreque. Les femmes racisées sont encore plus menacées par la pauvreté et les violences policières, elles sont réprimées quand elles expriment leur colère. On l’a vu aussi sur les manifestations féministes, quand les femmes essaient de dénoncer les problèmes, elles se font réprimer. Donc il est tout à fait logique que le Planning familial soit là !"
La crainte de la division
La marche d’Amiens rassemblait enfin des particuliers, comme Germain, étudiant à l’Université Picardie Jules Verne (UPJV). Le jeune homme est venu car il croit "en la cause pour laquelle on est réunis, contre la répression. Je n’attends plus grand-chose du gouvernement, mais je pense qu’on a toujours une carte à jouer avec l’opposition parlementaire. Il va falloir rester unis et éviter de tous se diviser à l’échéance des élections européennes, il ne faut pas qu’ils partent tous dans leur coin comme ils le font d’habitude. On va voir."
L’attitude circonspecte de Germain résonne avec la division politique créée par cette mobilisation : le Parti socialiste (PS) et le Parti communiste (PC) ont en effet décidé de ne pas participer aux marches de ce 23 septembre. La France insoumise (LFI), Europe écologie les verts (EELV) et le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) avaient au contraire appelé leurs militants à défiler.