L'Autorité de Sûreté Nucléaire dresse un bilan globalement positif de l’activité nucléaire dans les Hauts-de-France, qu’il s’agisse de l’exploitation des six réacteurs de la centrale de Gravelines (Nord) ou des activités industrielles et médicales. Avec toutefois une vigilance particulière en radiothérapie, où des erreurs de cible se sont multipliées.
Le gendarme du nucléaire dresse pour l’année 2023 un bilan “globalement satisfaisant” de l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection dans les Hauts-de-France. Une conclusion présentée vendredi 13 septembre par la branche lilloise de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), qui assure, au nom de l’État et de manière indépendante, le contrôle des activités nucléaires en France.
Et ce tant au niveau des centrales nucléaires que de l’activité médicale, industrielle ou du transport de substances radioactives. Sur cette base, le rôle de l’ASN est ensuite de réglementer et de rendre des avis à l’intention du gouvernement et des professionnels.
À Gravelines, une inversion de la tendance
Concernant la centrale nucléaire de Gravelines et ses six réacteurs de 900 mégawatts gérés par EDF, le “plan rigueur” mis en place depuis plusieurs années commence à porter ses fruits. Le nombre d’événements significatifs déclarés est passé de 120 en 2022 à 89 en 2023 et à 4 pour le niveau 1, le minimum sur l’échelle INES, chiffre au plus bas depuis dix ans .
“L’appréciation est plutôt satisfaisante et rejoint la moyenne, mais notons toutefois une position en retrait avec des performances qui doivent s’améliorer”, a indiqué Bruno Sardinha, chef du pôle réacteurs à eau sous pression (REP) de la division de Lille.
L’appréciation est plutôt satisfaisante, mais notons toutefois une position en retrait par rapport à la moyenne nationale avec des performances qui doivent s’améliorer.
Bruno Sardinha, chef du pôle réacteurs à eau sous pression (REP) de la division de Lille.
Des améliorations sont ainsi attendues concernant des pratiques et des comportements inadaptés, notamment suite à un manque de rigueur sur les conditions d’accès en zone réglementée ou sur les équipements de travail. L’accidentologie reste à un niveau “plutôt élevé” mais avec des accidents moins graves qu’auparavant.
Le défi de la densification industrielle
L’ASN relève aussi des maintenances des installations insuffisamment préparées résultant en des “prolongations importantes des durées d’arrêt des réacteurs”, atteignant au total 400 jours d’arrêt cumulé. Quatre des réacteurs mis en service entre 1980 et 1985 l’ont ainsi été simultanément.
À noter qu’un nouveau centre de crise, lié aux modifications post-Fukushima, doit être mis en service en fin d’année 2024 ou l’année prochaine. Face à la forte dynamique de projets industriels dans le Dunkerquois et la perspective d’installations d’une paire de réacteurs EPR2, l’ASN se veut toutefois vigilante. Elle considère qu’il est “nécessaire d’établir rapidement une vision globale et concertée des différents projets”, avec, comme le précise Bruno Sardinha, une “prise en compte des effets cumulés”.
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— EDF Gravelines (@EDFGravelines) September 9, 2024
Un autre aspect de l’Autorité de Sûreté Nucléaire concerne le nucléaire de proximité, représenté à plus de 60% par le domaine médical. Dans les Hauts-de-France, il est question de 142 services ou établissements médicaux, 123 scanners et 4 600 appareils de radiologie. À cela s'ajoutent encore 600 établissements industriels et de recherche, par exemple des laboratoires et 340 cliniques vétérinaires.
Des erreurs médicales
Ici encore, l’état de la radioprotection s’est maintenu à un niveau satisfaisant, avec toutefois une vigilance particulière en radiothérapie, méthode de traitement des cancers. Des patientes ont par exemple été traitées pour le sein gauche au lieu du droit. “Ces erreurs de latéralités ont des conséquences graves pour les patients victimes, c’est pourquoi nous avons renouvelé nos rappels de rigueur”, a souligné Laurent Ducrocq, chef du pôle nucléaire de proximité de la division de Lille.
Ces erreurs de latéralités ont des conséquences graves pour les patients victimes, c’est pourquoi nous avons renouvelé nos rappels de rigueur.
Laurent Ducrocq, chef du pôle nucléaire de proximité de la division de Lille.
Plus globalement, il pointe du doigt des “fragilités persistantes dans les connaissances des enjeux par les professionnels et les moyens alloués à la prévention des risques”, ainsi que la pénurie de manipulateurs en radiologie qui se confirme.