Le tribunal de commerce de Lille a choisi la Financière immobilière bordelaise pour reprendre 2.659 salariés sur les quelque 3.100 de l'enseigne de prêt-à-porter féminin Camaïeu, qui était en redressement judiciaire, selon un jugement rendu ce lundi 17 août consulté par l'AFP.
"C'est une victoire d'une entreprise, c'est aussi une victoire du droit", a réagi l'avocat de la FIB Olivier Pardo, qui souhaite que Camaïeu "redevienne l'immense entreprise qu'elle a été". Les autres salariés seront licenciés pour motif économique dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
Dans le jugement rendu par le tribunal, celui-ci dit "regretter amèrement la faiblesse des prix de reprise, particulièrement celle de FIB, qui a été qualifiée d'indécente lors des débats. Néanmoins, l'intérêt de l'entreprise reste sa pérennité qui apparaît meilleure dans le projet FIB."Le tribunal de commerce de Lille devait trancher entre deux offres, celle de la Foncière immobilière bordelais (FIB) et celle de l'actuel PDG de l'entreprise, Joannes Soënen. La première, qui a donc été choisie par le tribunal, est portée par l'homme d'affaires Michel Ohayon qui a notamment acquis 22 franchises Galeries Lafayette en régions en 2018. Elle était soutenue par le comité social et économique et par l'intersyndicale CFDT-CGT-FO.
Près de 100 emplois sauvés par rapport à la proposition de l'actuel PDG
Cette offre va donc entraîner la reprise de 511 magasins et de 2 619 salariés, laissant sur le carreau 123 magasins et 527 salariés. Une perte importante mais moindre au regard de la proposition faite alors par l'actuel PDG, Joannes Soënen et trois fonds déjà actionnaires.Cette proposition était soutenue par le syndicat maison majoritaire Unis pour agir ensemble (UPAE). Si elle avait été acceptée, elle prévoyait la supression de 626 emplois et la fermerture de 188 magasins. Sur les 446 magasins conservés, 43 seraient passés sous l'enseigne de prêt-à-porter féminin de la galaxie Mulliez Grain de Malice. L'actuelle direction, sollicitée, ne comptait pas réagir à la décision du tribunal.
Par ailleurs, la FIB a prévu de conserver la logistique actuelle avec le prestataire Dispéo et s'engage à gardier le siège à Roubaix et le bâtiment logistique pendant cinq ans.
"Il y a moins de casse", soulignait Omar Rahni, représentant CGT au CSE. "Et puis comment soutenir une équipe dirigeante qui coule la boîte, la met en redressement, bénéficie des aides de l'Etat, voit l'ardoise effacée et en profite pour fermer des magasins et licencier ?"
Interrogées, les différentes parties n'avaient fait aucun pronostic, assurant que chaque offre avait 50 % de chances de l'emporter. Les différents membres du tribunal étaient eux-mêmes partagés lors de l'audience.
Le groupe était en redressement judiciaire depuis le 26 mai
Fondée en 1984, Camaïeu a été placée en redressement judiciaire le 26 mai, "lourdement impactée par la crise sanitaire et faute d'un prêt garanti par l'Etat qui lui aurait permis de surmonter" cette situation, selon une source proche de la direction.Début mars, "l'entreprise avait commencé à mettre en oeuvre son plan de transformation et un accord de financement était sur le point d'être conclu avec les actionnaires et les banques".
Mais "la crise sanitaire a obligé le groupe à fermer brutalement plus de 800 magasins dans le monde", entraînant un "manque à gagner de 162 millions d'euros", précisait cette source.
CFDT-CGT-FO et des syndicats des filiales belge et luxembourgeoise disaient eux avoir la "profonde conviction" que "dès le mois de mars, tout était organisé" pour "passer par une faillite et non par un plan social négocié". Ce que la direction réfute.
Fin 2018, la société avait été reprise par ses créanciers après une procédure de sauvegarde. En 2016, elle avait déjà négocié avec ses créanciers pour que la moitié de sa dette, qui s'élevait alors à un milliard d'euros, soit convertie en actions.