VIDÉO. Violences sexistes dans le monde politique : la sénatrice Laurence Rossignol revient sur l'affaire Quatennens

L'affaire Quatennens a secoué le parti La France Insoumise ainsi que toute la vie politique française. Les mains courantes et la plainte de Céline Quatennens à l'encontre de son mari, député LFI, ont eu l'effet d'une bombe au sein des partis politiques. Le soutien indéfectible de Jean-Luc Mélenchon à son fils spirituel alors que LFI a une politique en faveur des droits des femmes, a mis le feu aux poudres.

Pour parler de l'affaire Quatennens, nous avons reçu Laurence Rossignol, vice-présidente du Sénat, sénatrice du PS de l'Oise, ancienne ministre en charge du droit des femmes et présidente de l'association L'Assemblée des Femmes.

En tant que femme politique et militante pour les droits des femmes, qu'est ce que vous vous dites quand l'affaire Quatennens éclate ?

Laurence Rossignol : "Au départ, je me dis que c'est une affaire privée qui concerne un homme politique et qu'elle devient une affaire politique après le tweet de Jean-Luc Mélenchon, chef du parti La France Insoumise. Son tweet interroge sur la compréhension qu'ont les hommes politiques des mots qu'ils répètent et qu'ils disent vouloir porter qui sont la lutte des violences sexistes et sexuelles dans les partis politiques. C'est quelque chose évidemment qui n'est pas si simple. Aujourd'hui, il faut intégrer que depuis le mouvement #Metoo, les femmes ne veulent plus de l'omerta, c'est-à-dire de l'impunité dont bénéficient les hommes de pouvoir dans les milieux de pouvoir masculin. Cela concerne la politique, cela concerne la presse, cela concerne le cinéma, cela concerne tous ces lieux à forte concentration masculine et aussi à forte concentration de pouvoir."

Adrien Quatennens aurait -il dû démissionner au lieu de se mettre en retrait ?

"Je pense que cette affaire comme celle de l'affaire Bayou, révèle qu'il est grand temps que nous nous mettions autour d'une table et nous élaborions un code de déontologie politique. Ce que nous savons, c'est qu'on ne peut pas attendre que la justice détermine qui est coupable de qui ne l'est pas. Tout milieu a ses propres règles éthiques. En politique, nous avons les nôtres et en particulier la cohérence entre ce que nous proposons pour la société et la manière dont nous le mettons en œuvre. Nous avons des cas où la justice ne peut pas passer parce que c'est prescrit, parce que la justice fonctionne sur le principe du doute qui profite toujours à l'accusé. En matière de violence sexuelle, c'est souvent défavorable aux victimes. Donc, il faut nos règles pour discuter."

Que pensez-vous des cellules d'écoute des victimes dans les partis politiques ?

"Disons-le clairement, les cellules ne sont pas au point parce que les gens ont des liens. Ils ont milité ensemble. Ils sont amis, ils se connaissent, ils s'aiment ou ils ne s'aiment pas. Il faut externaliser les procédures, il faut des comités mixtes, des personnes politiques et des gens dont c'est le métier."

Isabelle Rome, la ministre de l'Égalité entre les femmes et les hommes aimerait que les cellules incitent les victimes à porter plainte dans un commissariat ? Que lui répondez-vous ?

"Je pense que l'idée qu'il faudrait toujours porter plainte n'est pas une garantie parce que les procédures sont longues, que les plaintes sont souvent classées en matière de violences sexuelles. Aujourd'hui, par exemple, plus personne ne conteste la culpabilité de Patrick Poivre d'Arvor, personne ne dit que les plaignantes sont des menteuses et pour autant la justice n'a pas agit car les faits sont prescrits. Donc il nous faut nos règles qui doivent être connues et transparentes."

L'affaire Quatennens et l'affaire Bayou font-elles reculer la cause des femmes ?

"Toutes ces affaires ne font pas de bien à la cause. Elles mettent en doute la crédibilité des plaignantes parce qu'en arrière-plan, il y a toujours l'idée que celles qui parlent sont des menteuses. Elles mettent en doute la capacité des hommes politiques à mettre en place des procédures équitables qui respectent les droits de la défense. Donc j'espère que l'on va sortir vite par le haut de cette séquence-là. Nous accompagnons une vague d'une grande puissance qui est la vague #Metoo, qui est celle des femmes qui disent ce qui se passe, qui disent qu'elles n'en peuvent plus de cette impunité des auteurs."

Il y aura un avant et un après ces deux affaires ?

"Il y a un avant et un après #Metoo, il y aura un avant et un après ces affaires car on est tous conscients que les cellules politiques mises en place dans les partis politiques ne sont pas infaillibles, loin de là."

Interview réalisée début octobre 2022.

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