À Grande-Synthe, les migrants sont inquiets après la destruction de leur camp

La nuit a été courte et le jour s'est levé mardi sur une grande incertitude pour les 1.500 migrants de Grande-Synthe, près de Dunkerque, dont le camp a été ravagé par les flammes à la suite de rixes intercommunautaires.

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Mardi matin, à 09H00, un groupe de six Afghans vient frapper à la porte du désormais ex-camp de la "Linière", alors que les décombres de 70% des 300 chalets de bois sont encore fumants, et l'odeur de brûlé omniprésente.

"Ils veulent récupérer leurs sacs, leur carte d'identité", explique Wajid, 19 ans, qui devait commencer à travailler comme interprète sur le camp à partir de mardi.


"Je veux absolument ma carte d'identité, si je perds ça aussi, je repars de zéro", se désespère Emal.

Il a ressassé toute la nuit les violents événements de la veille au soir: "Les Afghans étaient en train de jouer au foot. Le ballon a fini par toucher un Kurde, qui a insulté le peuple afghan. Les Afghans se sont attroupés pour attraper le gars, qui a réussi à fuir et rameuter d'autres gens. Du coup, on a dit qu'on voulait discuter et s'excuser, mais les Kurdes sont revenus avec des pistolets et des couteaux et on a vu qu'ils n'en avaient pas l'intention".

Emal admet: "Je trouvais ça normal que les Kurdes soient ici chez eux, c'était leur camp, et nous on avait Calais. Mais comme Calais n'existe plus..."

Le petit groupe d'Afghans repartira quelques minutes plus tard sans avoir pu récupérer leurs affaires, empruntant en file indienne les bas-côtés des rocades desservant le centre-ville de Grande-Synthe, comme de nombreux autres migrants.

En pleine bagarre



A quelques km de là, la salle Victor Hugo fait partie des trois gymnases réquisitionnés pour mettre à l'abri une partie des réfugiés - pas plus de 500, s'inquiète François Guennoc de l'Auberge des migrants, le reste ayant passé la nuit dans la rue.

A l'intérieur de ce lieu dédié aux Kurdes, ces habitués de l'exil forcé essaient, tant bien que mal, de recomposer leur vie, une fois de plus. Des hommes et des femmes à l'air épuisé se reposent sur les lits de camp. Leurs enfants jouent déjà au ballon ou font du tricycle, leurs petits manteaux accrochés aux prises d'escalade artificielles.  Des adolescents font la queue pour se débarbouiller aux lavabos près de l'entrée.


Johat, un des seuls Afghans présents, peut-être toléré parce qu'il a 15 ans, est angoissé: "Je me suis trouvé en pleine bagarre, j'ai réussi à m'enfuir mais depuis, plus aucune nouvelle de mon copain blessé".

Beaucoup sont inquiets de ne pas retrouver leurs proches


"C'est le bazar. Certains ne sont pas hébergés et trainent à Auchan, en ville... Beaucoup sont inquiets de ne pas retrouver leurs proches", témoigne Patrick, volontaire venu prêter main forte.

C'est le cas de Karwan, père de cinq enfants, qui enrage de ne pouvoir entrer dans le gymnase car il est Pakistanais. "Ca me fait bizarre d'être ici à attendre. Au camp on était bien. Je n'aime pas être séparé de ma famille".

A un moment, je portais ma fille dans mes bras, mais je suis tombé


Lundi soir, il était parti acheter du tabac quand il a appris la nouvelle. Il est revenu en catastrophe pour protéger les siens, dont la cabane se situait face au lieu des premiers affrontements. "A un moment, je portais ma fille dans mes bras, mais je suis tombé, des gens m'ont frappé. Mais ce n'est pas grave, tant que mes enfants n'ont rien...", se satisfait-il.

Cet événement le convainc en tout cas encore plus de son objectif initial: rallier l'Angleterre, au plus vite.
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