Porté par Gérald Darmanin, le projet de loi immigration a été largement validé par la droite et l’extrême droite ; il suscite cependant des divisions au sein de la majorité présidentielle et l’indignation de la gauche. Le texte, dont plusieurs mesures pourraient être “contraires à la Constitution”, durcit la politique française en matière d’immigration.
Le projet de loi immigration a été définitivement adopté par le Parlement ce mardi 19 décembre. Après un vote favorable du Sénat hier soir, 349 députés ont voté pour et 186 contre à l’Assemblée nationale. Le texte était porté par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et durci en commission mixte paritaire. Il est salué par l’extrême droite et dénoncé par la gauche. Parmi les mesures du texte : la remise en cause du droit du sol et des prestations sociales pour les étrangers.
La majorité présidentielle divisée
La fracture de la majorité présidentielle autour de ce projet de loi était bien visible lors du vote : 27 députés ont voté contre et 32 se sont abstenus. Le président de la commission des lois, l’élu Renaissance Sacha Houlié, a quant à lui voté contre. Il estime qu’une “trentaine” de mesures du texte serait contraires à la Constitution.
A l’issue du vote, le ministre de la santé Aurélien Rousseau, opposé au texte, a présenté sa démission à la Première ministre Elisabeth Borne.
Celle-ci s’est félicitée de l’adoption d’un “texte efficace et conforme aux valeurs républicaines”. Elle écrit sur le réseau social X : “La majorité a fait bloc, la manœuvre du RN a échoué”. Elle reconnaît cependant que des mesures de la loi immigration sont contraires à la Constitution.
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est félicité de l’adoption d’un texte “fort et ferme”. Lui aussi reconnaît que "des mesures sont manifestement contraires à la Constitution". Comme la Première ministre, il affirme que ce projet de loi aurait été adopté “sans les voix des députés RN”. Un point de vue contesté par la gauche et par l’extrême droite. En effet, le texte aurait été adopté si les parlementaires d’extrême droite s’étaient abstenus, mais pas s’ils avaient voté contre.
Réactions politiques
Le ministre du Logement dunkerquois Patrice Vergriete avait menacé hier soir de démissionner en cas de vote du projet de loi immigration. Il n’a pas encore déposé sa démission.
Pour Adrien Quatennens (LFI), député du Nord, il s’agit bien “d’une loi d’extrême-droite qui reprend très largement le programme du RN”. Il a affirmé que “partout en Europe, l’extrême-droite gagne des positions” et a accusé le gouvernement d’Elisabeth Borne de lui “préparer le terrain” en France. Également dans le Nord, Ugo Bernarcilis (LFI) a déploré : “plus qu'un vote de la honte, ce vote est une bascule”.
La Cimade, association d’aide aux migrant·e·s, a dénoncé sur X “le texte le plus répressif et maltraitant élaboré ces quarante dernières années en matière d’immigration”. L’association avait cosigné un appel à rejeter la loi immigration, avec une quarantaine d’associations, parmi lesquelles la Ligue des droits de l’Homme, la fondation Abbé-Pierre ou encore Utopia 56.
Marine Le Pen, cheffe de file des députés du Rassemblement national à l’Assemblée et députée du Pas-de-Calais, se félicite d’une “une victoire idéologique” suite à l’adoption de ce texte. En effet, le projet de loi rejoint le programme du parti d'extrême droite : il durcit les conditions d'immigration et introduit la “préférence nationale”, qui donne aux Français un avantage sur les étrangers concernant l’obtention de certaines aides sociales. Ces mesures étaient d'ailleurs déjà réclamées par le Front national de Jean-Marie Le Pen.
Sébastien Chenu, porte-parole du groupe RN et député du Nord, s’est quant à lui fendu sur le réseau social X d’un post moqueur à l’adresse de la gauche : “Merci au passage à la France Insoumise-NUPES pour la motion de rejet ayant permis cette Commission mixte paritaire, et donc le durcissement du texte actant ainsi la priorité nationale”.
Violette Spillebout, députée du Nord et porte-parole du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale, a voté pour le texte. “J’ai l’impression d’avoir fait mon devoir”, a-t-elle affirmé, “Tous les jours, les Français nous rappellent qu’ils sont inquiets, qu’ils veulent une immigration maîtrisée, qu’ils veulent vivre en sécurité et en paix.”
Du côté de Calais, la maire Natacha Bouchart s’est réjouie de l’adoption d’un texte “faisant preuve de fermeté en matière de régulation des flux migratoires.”
Comment votre député a-t-il voté ?
Dans le Nord, 13 députés ont voté en faveur de ce texte :
Guy Bricout (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires), Paul Christophe (Horizons et apparentés), Vincent Ledoux (Renaissance), Sébastien Chenu (RN), Charlotte Parmentier-Lecocq (Renaissance), Béatrice Descamps (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires), Félicie Gérard (Horizons et apparentés), Violette Spillebout (Renaissance), Michaël Taverne (RN), Pierrick Berteloot (RN), Matthieu Marchio (RN), Thibaut François (RN) et Victor Catteau (RN).
Six ont voté contre :
Adrien Quatennens (LFI), Ugo Bernalicis (LFI), Fabien Roussel (Gauche démocrate et républicaine), David Guiraud (LFI), Roger Vicot (Socialistes et apparentés), Benjamin Saint-Huile (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires).
Christine Decodts (Renaissance) s’est abstenue. Brigitte Liso (Renaissance) n’a quant à elle pas voté.
Du côté du Pas-de-Calais, 10 députés ont voté pour le texte :
Jean-Pierre Pont (Renaissance), Jacqueline Maquet (Renaissance), Marine Le Pen (RN), Emmanuel Blairy (RN), Pierre-Henri Dumont (LR), Bruno Bilde (RN), Philippe Fait (Renaissance), Caroline Parmentier (RN), Thierry Frappé (RN) et Christine Engrand (RN)
Deux députés ont voté contre :
Bertrand Petit (Socialistes et apparentés) et Jean-Marc Tellier (Gauche démocrate et républicaine).